§2. Des évolutions sociales sources de difficultés bancaires

Pour mettre en perspective les données portant sur les caractéristiques des ménages interdits bancaires ou surendettés, il convient de considérer les éléments identifiés comme causes de ces difficultés bancaires.

A. Des causes conjoncturelles et structurelles

La compréhension des difficultés conduisant à l’interdiction ou au surendettement distingue souvent ce qui est de l’ordre du choc exogène d’un côté et de la mauvaise gestion de l’autre. Nous avons montré les limites d’une telle lecture pour le surendettement (chapitre 1), lui préférant une approche qui tienne simultanément compte des décisions de gestion, du contexte dans lequel elles sont prises, des décisions du banquier et des caractéristiques des produits bancaires. Un tel choix est également pertinent dans le cas de l’interdiction bancaire.

Dans le cas du surendettement où intervient un « accident de la vie » comme un licenciement, il est ainsi nécessaire de prêter attention aux décisions des différents acteurs entre cet incident et le dépôt du dossier pour comprendre les causes d’aggravation de la situation (il se déroule en moyenne deux années aux États-Unis selon Sullivan et al. (2000)). Une telle précaution est tout aussi valable concernant l’interdiction bancaire : « La durée du chômage est également remarquable, puisque au moment de l’interdiction, parmi les personnes qui étaient au chômage, seules 7 % l’étaient depuis un mois ou moins, 33 % de deux à six mois et 61 % depuis plus de six mois (dont 35 % depuis plus d’un an). Ces chiffres laissent présager une dégradation progressive des conditions de ressource de ces ménages, allant de pair avec la diminution des ASSEDICS » (Gallou & Le Quéau, 1999, p. 21).

De même, tout comme pour le surendettement, l’absence de ruptures n’équivaut pas à une absence de contraintes pesant sur la gestion des personnes. L’interdiction bancaire résulte ainsi fréquemment de situations structurellement précaires : 51 % des ménages voyaient leurs ressources varier d’un mois sur l’autre au moment de leur interdiction, et 77 % étaient dans l’attente d’un versement permettant pour 84 % d’éviter leur interdiction (Gallou et Le Quéau, 1999).

Que ce soit des chocs exogènes ou bien la faiblesse ou la discontinuité des revenus, il s’agit là de contraintes conjoncturelles et structurelles qui pèsent lourdement sur la gestion bancaire des personnes et donc sur le déroulement de la prestation de services bancaires. Elles expliquent alors en grande partie la survenue de difficultés comme l’interdiction bancaire ou le surendettement. Il importe à présent de souligner le caractère institutionnel de cet élément explicatif des difficultés d’usage.