Annexe 4 : Synthèse de l’étude pour le Secours Catholique (Gloukoviezoff & Lazarus, 2007 ; Gloukoviezoff & Palier, 2008)

En juillet 2003, le Secours Catholique met en place un groupe de travail composé de responsables du Secours Catholique et d’experts bancaires autour des besoins en services financiers des personnes en difficulté. Les Crédits projet personnel sont le fruit de ce travail de réflexion et ont pour objectif de lutter contre l’exclusion bancaire et l’exclusion sociale. La première convention est signée le 19 octobre 2004 avec le Crédit Mutuel Midi Atlantique. Aujourd’hui, le Secours Catholique a développé 13 partenariats avec des opérateurs financiers différents.

Deux ans après le démarrage de la première expérimentation, le Secours Catholique dans le cadre du Comité d’évaluation des Crédits projet personnel, a estimé nécessaire d’analyser l’impact de ces derniers. En effet, si le microcrédit est un outil reconnu de lutte contre la pauvreté, la mise en œuvre d’un outil aussi novateur – puisque destiné à des projets non professionnels, qui plus est dans un pays qui n’en a pas l’habitude – méritait d’en analyser les impacts dans la vie des emprunteurs, d’en évaluer l’ampleur au regard des situations et de leurs évolutions, et enfin de comprendre les causes de ces résultats positifs ou négatifs.

La question à laquelle cette étude se propose de répondre est donc la suivante :

Est-ce que le Crédit projet personnel tel que proposé par le Secours Catholique est une réponse adéquate aux besoins des personnes confrontées à l’exclusion bancaire et plus largement à l’exclusion sociale  ?

Méthodologie. Une démarche qualitative d’évaluation de l’’impact
La méthodologie utilisée doit permettre d’identifier les impacts produits par l’obtention d’un Crédit projet personnel.
Tout d’abord, nous avons adopté une approche qualitative pour comprendre les mécanismes des changements observés ainsi que le sens et la valeur qui leur est donné par les personnes. Le but n’est donc pas tant de mesurer ce type d’impacts (si tant est qu’ils soient quantifiables) que d’en expliquer les ressorts. Ceci ne nous empêche pas d’évaluer voire même de noter ces impacts : nous utilisons ainsi des « + », « = » et « - » pour évaluer l’ampleur ou la qualité de l’impact imputable au Crédit projet personnel. Cette approche basée sur des entretiens de pratique en situation, nous a permis de construire progressivement des indicateurs d’impacts. De plus, de manière à pouvoir évaluer l’évolution des situations, des représentations et des stratégies mises en œuvre, l’étude est longitudinale : nous avons rencontré les personnes deux fois à un an d’intervalle. Des résultats provisoires ont ainsi été présentés dans un rapport intermédiaire en 2007.
Afin de garantir une bonne représentativité, nous avons recherché la diversité des profils des bénéficiaires de Crédits projet personnel. Ainsi, ils sont « différents » tant par l’objet et la finalité de leur prêt que par leur profil socioéconomique. De plus, nous avons choisi de privilégier chaque fois que cela a été possible les différentes parties prenantes d’un même dossier de prêt c'est-à-dire l’emprunteur, le bénévole et le banquier. Croiser les regards sur une même situation est particulièrement instructif pour décrypter les logiques à l’œuvre mais aussi pour comprendre les raisons de blocages ou d’incompréhensions entre les différents acteurs
Nous avons enfin formulé l’hypothèse que la structure organisationnelle de l’expérimentation exerce une influence sur la nature et l’ampleur des impacts obtenus. Trois partenariats avec des établissements financiers aux caractéristiques différentes (deux banques mutualistes mais dont l’une a mis en place une structure dédiée, et un établissement de crédit spécialisé), ont donc été choisis comme terrain d’enquêtes (soit 6 différents départements dans 3 régions).
Ainsi au total, 68 entretiens ont été réalisés au cours de la première phase en 2007 (27 emprunteurs, 17 accompagnateurs, 8 banquiers, 3 prescripteurs et 13 « cadres » du Secours Catholique et des partenaires bancaires) et 42 lors de la seconde en 2008 (22 emprunteurs, 17 accompagnateurs et 5 banquiers). Seuls 5 emprunteurs n’ont pu être rencontrés lors de la seconde phase de l’enquête. Les entretiens ont tous été enregistrés, transcrits et analysés. Précisons enfin que les noms des personnes citées ne sont bien entendu pas leurs vrais patronymes.

Les Crédits projet personnel du Secours Catholique s’avèrent être une réponse pertinente et adaptée aux besoins de la grande majorité des personnes rencontrées au cours de cette enquête. La situation de tous les emprunteurs s’est améliorée dans au moins une des sept dimensions d’impact identifiés (que nous avons noté de « - - » à « + + » en passant par « = » selon l’effet du crédit sur la situation de la personne) : insertion professionnelle, niveau et nature des ressources, cohésion familiale, vie sociale, vie quotidienne, estime de soi et bancarisation.

Certains de ces impacts étaient espérés, d’autres sont plus inattendus ; l’obtention d’un microcrédit peut avoir des répercussions sur de multiples domaines de la vie des emprunteurs. Ici, c’est un Crédit projet personnel qui a favorisé l’insertion professionnelle d’une mère de famille célibataire, là c’en est un autre qui a permis à une femme veuve de quitter une maison devenue invivable depuis le décès de son époux. Ailleurs, un Crédit projet personnel a assuré le maintien de la vie sociale d’une personne ou a ressoudé une famille en contribuant au retour des enfants auprès de leurs parents. Indirectement, les Crédits projet personnel ont aussi très souvent contribué à redonner confiance en eux aux emprunteurs voire même à restaurer leur dignité. Être en mesure de rembourser un crédit dans de bonnes conditions permet de formuler de nouveaux projets, d’envisager un autre prêt, de se projeter dans l’avenir. Le regard sur les banques – ou plutôt sur l’enseigne qui a octroyé le Crédit projet personnel – se modifie favorablement et une relation bancaire de bonne qualité peut s’établir entrainant souvent avec elle un meilleur usage des services financiers.

La diversité des trajectoires individuelles est la règle : un même type de besoin peut conduire à des impacts très divers et différenciés. C’est notamment le cas du besoin de mobilité, commun à de nombreux emprunteurs. L’étude montre, de manière significative, que Les Crédits projet personnel sont un facteur potentiel d’amélioration tangible des situations des personnes. Néanmoins, ils ne sont pas une solution miracle face aux difficultés rencontrées par les emprunteurs.

Tout d’abord, ils ne peuvent pas permettre à eux seuls une insertion ou réinsertion économique et sociale complète. D’une part, ils ne sont pas suffisants pour surmonter des difficultés macroéconomiques comme le faible dynamisme économique d’une région par exemple : les emplois sont rares, souvent précaires, et l’amélioration des ressources n’est pas toujours conséquente. D’autre part, ils ne peuvent se substituer au don pour nombre de situations pour lesquelles exiger un remboursement serait préjudiciable à la personne.

Ensuite, les impacts obtenus dépendent en partie de la situation initiale des emprunteurs et de leurs besoins. Ainsi, à côté d’un objectif de promotion, les Crédits projet personnel peuvent également servir un objectif de protection. Leur réussite se manifeste alors précisément par le maintien et la stabilité de la situation et non par son amélioration. De plus, ces crédits peuvent également être utilisés pour satisfaire un besoin ponctuel qui sans transformer radicalement la vie de l’emprunteur lui apportera un supplément de bien-être essentiel. La démarche qualitative que nous avons adopté nous a permis de tenir compte de la valeur accordée par les personnes au changement, autrement dit ce qui peut paraître dérisoire pour certains n’en sera pas moins indispensable pour d’autres – le rapport accorde une large place à la parole des personnes afin de rester proches de leur préoccupations et du sens de leur action. Outre la recherche d’emplois, le financement d’une voiture permet très souvent d’améliorer nettement la vie pratique au quotidien. Pouvoir aller faire les courses au discount de la zone commerciale ou conduire son enfant au centre aéré le mercredi après-midi est absolument essentiel pour mener une vie « normale ».

Enfin, les Crédits projet personnel peuvent également produire des « impacts négatifs ». Pour les cinq emprunteurs concernés, ces impacts se sont concentrés soit sur l’estime de soi soit sur la bancarisation, voire les deux en cas d’« échecs ». Ils reflètent ainsi autant les difficultés rencontrées dans la réalisation du projet que celles survenant au cours du remboursement du crédit. Il ne faut pas oublier que le public visé est vulnérable c'est-à-dire est plus sensible aux risques et moins à même de s’en prémunir. Dès lors, le moindre aléa peut faire basculer une situation précaire, l’isolement familial et social est alors un facteur aggravant.

L’ampleur et la diversité des impacts obtenus par chaque personne suite à un Crédit projet personnel nous ont conduits à distinguer quatre types d’impact global : les « réussites fortes », les « réussites localisées essentielles », les « réussites localisées limitées » et les « échecs ».

En cas de « réussites fortes », la quasi-totalité des indicateurs d’impact sont positifs voire très positifs. Les répercussions observées dépassent largement la réalisation du projet initialement défini. Pour plusieurs, le but était de s’en sortir voire même de « changer leur vie » : le crédit leur a alors servi de « tremplin » pour dépasser les obstacles. La plupart avait un objectif professionnel qui par sa concrétisation a permis de réaliser d’autres projets. Mme Seigner nous a ainsi confié « revenir de loin » et nous a fait part de sa fierté aujourd'hui d’être en pleine création d’une entreprise de services à la personne.

Les « réussites localisées essentielles » correspondent à des impacts plus concentrés sur certains domaines mais qui apportent des améliorations profondes des situations des personnes. Le Crédit projet personnel a permis de réaliser le projet initial et d’en ressentir des effets bénéfiques qui le dépassent mais le changement est moins radical. Sont davantage concernées des personnes qui souhaitaient améliorer leurs conditions de vie.

Les « réussites localisées limitées » sont des situations où des impacts positifs sont observés mais restent de faible ampleur. Comparativement aux « réussites » précédentes, l’impact est ici circonscrit la plupart du temps au champ initialement défini. M. Lepardieu a bien acheté les matériaux de construction pour améliorer son abri-logement mais les travaux n’ont pas encore débuté, Mme Khalil a pu concrétiser sa promesse d’embauche dans un cabinet immobilier mais n’en retire pas un salaire suffisant. .

Enfin, en ce qui concerne les « échecs » ce sont les impacts négatifs qui prennent le pas sur les autres : l’estime de soi étant notamment fortement altérée. Mme Michel regrette d’avoir obtenu ce Crédit projet personnel qui est « venu à elle » plus qu’elle ne l’a souhaité ; elle a le sentiment d’avoir été « embobinée » et de ne pas être parvenue à satisfaire correctement les besoins qui étaient initialement visés (raccordement de son cabanon au réseau électrique et à l’eau).

Cette typologie permet d’affirmer que la réussite d’un Crédit projet personnel ne se confond pas avec la réalisation du projet initialement formulé. Plusieurs emprunteurs ont – par choix délibéré ou contraint – affecté les fonds à d’autres fins que celles prévues et ont tout de même obtenu des impacts positifs. Monsieur Chamfort avait pour projet l’achat d’un scooter et le financement du permis de conduire. Il a finalement utilisé son crédit de 1500 euros pour le scooter – ce qui lui permet d’accepter davantage de missions intérim – et pour améliorer le confort sommaire de son studio : un nouveau lit, un table et des chaises.

De même, rencontrer des difficultés de remboursement ne compromet pas la possibilité d’obtenir une « réussite forte » ou « localisée essentielle ». En revanche, lorsque le remboursement du Crédit projet personnel échoue en dépit de la volonté de l’emprunteur, cela traduit généralement une dégradation de la situation initiale (même si cette dégradation n’est pas causée par la mise en place de ce crédit).

Mais si les Crédits projet personnel sont très souvent une réponse pertinente aux besoins des personnes et si leurs conséquences négatives peuvent être limitées en cas de difficultés, c’est également parce que le dispositif comporte en plus du financement, un volet accompagnement. Cette seconde dimension qui recouvre à la fois le diagnostic et le suivi, joue un rôle essentiel bien qu’il n’en existe pas de forme unique. Ainsi, une « réussite forte » pourra être obtenue avec un suivi extrêmement léger alors qu’un suivi intense pourra être insuffisant pour éviter un « échec ».

C’est la phase de diagnostic qui détermine les caractéristiques du suivi mis en œuvre. En favorisant une prise en compte globale de la situation de l’emprunteur ainsi que l’évaluation personnalisée de son projet et de sa capacité à le mener à bien par lui-même, la phase de diagnostic doit permettre de définir le type de suivi nécessaire. Surtout, elle offre la possibilité d’établir une relation de confiance entre l’accompagnateur et l’emprunteur, facteur essentiel pour la qualité du suivi. C’est donc la personnalisation qui doit être le maître mot de l’accompagnement.

Dans la pratique, les caractéristiques de l’accompagnement ne sont pas seulement définies par les besoins de l’emprunteur mais aussi et surtout par l’orientation qui est donnée à leur action par les accompagnateurs et l’expérimentation à laquelle ils participent. Les modalités de mise en œuvre des Crédits projet personnel ainsi que leurs résultats dépendent en effet de la prégnance d’une « philosophie » (crédit ou besoin) ainsi que de la propension à prendre des risques. Si la propension à prendre des risques influe principalement sur le degré d’ouverture de l’expérimentation aux profils ou projets risqués et donc sur la probabilité que des difficultés ne surviennent, la philosophie dominante exerce une influence plus forte sur l’ampleur et la variété des impacts obtenus.

Les accompagnateurs et expérimentations marqués par la « philosophie crédit » se donnent pour objectif de lutter contre l’exclusion bancaire en donnant accès aux emprunteurs à une forme appropriée de crédit. En raison des liens entre exclusion bancaire et exclusion sociale, ils participent indirectement à la lutte contre l’exclusion sociale comme en témoignent les impacts positifs pour les emprunteurs qu’ils accompagnent. Toutefois, leur diagnostic et leur suivi ont pour finalité de favoriser le bon remboursement du Crédit projet personnel et non d’intervenir en profondeur pour tenter de résoudre les potentiels problèmes économiques et sociaux des emprunteurs.

Ceux marqués par la « philosophie besoin » donnent aux Crédits projet personnel une finalité de lutte contre l’exclusion sociale. Si leur accompagnement entend également favoriser le remboursement du crédit, il prend appui sur cet outil pour résoudre les difficultés connexes que connaît éventuellement l’emprunteur. Ces deux philosophies ne s’opposent pas. Elles constituent un continuum sur lequel les accompagnateurs se situent. Il apparaît néanmoins que selon le poids relatif qui leur est accordé, les caractéristiques de l’accompagnement proposé sont sensiblement modifiées.

Les accompagnateurs les plus marqués par la « philosophie besoin » ont tendance à proposer un accompagnement « soutenu » caractérisé par un diagnostic très sélectif et un suivi intense au risque d’être parfois tutélaire. Ce type d’accompagnement favorise l’obtention d’impacts forts au sein de l’ensemble des dimensions de la vie des emprunteurs (les « réussites fortes ») au détriment des situations où les impacts, essentiels pour le bien être des personnes, se focalisent sur certains aspects de leur vie sans en entraîner une transformation profonde (les « réussites localisées essentielles »). Il risque également de voir le flux de Crédits projet personnel extrêmement réduit.

À l’inverse, les accompagnateurs les plus marqués par la « philosophie crédit » ont tendance à proposer un accompagnement « quasi-absent » caractérisé par un diagnostic sommaire pouvant prendre une tournure très administrative et par un suivi extrêmement léger n’intervenant que lorsque des mensualités impayées sont signalées. À l’inverse du précédent, ce type d’accompagnement dont les objectifs en termes d’amélioration globale de la situation sont moins ambitieux, est plus propice à l’obtention de « réussites localisées essentielles » (la satisfaction d’un besoin essentiel pour l’emprunteur mais ponctuel) au détriment des « réussites fortes ».

Ces deux types d’accompagnement ont en commun de proposer des caractéristiques trop standardisées pour véritablement donner toute leur place aux spécificités des emprunteurs et permettre une plus grande variété d’impacts. Ainsi, ce sont les accompagnateurs et expérimentations modérément marqués par l’une ou l’autre philosophie qui parviennent à obtenir ces deux types de réussite en proposant un accompagnement « occasionnel ». Sa spécificité est d’être composé d’un diagnostic poussé mais ouvert à la diversité des besoins et des projets, et d’un suivi personnalisé c'est-à-dire adapté aux besoins des emprunteurs et à l’évolution de leur situation.

L’orientation de l’accompagnement et donc ses caractéristiques et les types d’impact global obtenus, ne dépendent pas seulement des bénévoles du Secours Catholique mais également de l’influence du partenaire bancaire. La comparaison des trajectoires des emprunteurs ayant rencontré des difficultés selon le type d’impact global obtenu, montre que la possibilité de s’appuyer sur un suivi pour lequel la collaboration entre accompagnateur et banquier est structurée favorise la neutralisation des conséquences éventuelles de ces difficultés.

De ce point de vue, le fait que le partenariat se développe directement avec les caisses locales d’un établissement bancaire ou avec une structure dédiée n’a pas les mêmes conséquences selon le type d’accompagnement proposé. Plus il est sommaire plus le cadre proposé par le partenaire bancaire et les outils dont il dispose pour trouver des solutions permettent de pallier les limites de l’accompagnement. En effet, lorsque le suivi proposé est de type « quasi-absent », la relation principale s’établit entre l’emprunteur et l’établissement bancaire. S’il s’agit d’une caisse locale, cette relation risque de présenter les insuffisances qui ont précisément conduit à prévoir un accompagnement dans le cadre des Crédits projet personnel. À l’inverse, lorsque l’accompagnateur est en mesure de proposer un suivi personnalisé, la collaboration avec les caisses locales est tout à fait satisfaisante. Elle permet d’ailleurs d’éviter un risque de la structure dédiée qui est de rendre plus compliquée la sortie de l’emprunteur du dispositif dédié pour rejoindre une agence et devenir un client de « droit commun ».

La diversité des types d’accompagnement proposés par les bénévoles étant inhérente à cette activité, leur homogénéisation ne peut-être qu’un objectif illusoire. En revanche, il est indispensable de tenir compte de ces différences pour structurer un partenariat avec l’établissement financier qui permettent autant que possible d’en limiter les éventuelles conséquences néfastes pour les emprunteurs.

En dépit des améliorations encore à apporter, les Crédits projet personnel s’avèrent être un outil d’inclusion bancaire particulièrement efficace dans la mesure où ils contribuent le plus souvent à modifier les représentations des emprunteurs à l’égard de l’univers bancaire et parfois à développer une véritable pédagogie bancaire. Toutefois, ces résultats positifs obtenus par les clients ne peuvent être convertis en impact que dans la mesure où l’autre partie de la relation – la banque – modifie également ses pratiques. C’est la question des impacts des Crédits projet personnel sur les parties prenantes qui est alors posée.

Dans le cadre de l’expérimentation des Crédits projet personnel, les différents partenaires tentent d’ajuster et d’améliorer leurs pratiques avec des réussites diverses. Ce rapport montre notamment la nécessité de structurer davantage la collaboration entre accompagnateur et banquier lorsque le suivi proposé est de type « quasi-absent », ainsi que de préciser les modalités d’intervention de la garantie.

Si l’on considère les impacts sur leurs pratiques au-delà des seuls Crédits projet personnel, il est certain que la participation à cette expérimentation est un élément positif pour les bénévoles du Secours Catholique. Ils changent leur regard sur les personnes en situation de pauvreté et modifient les caractéristiques des relations qu’ils établissent avec ces personnes. Si ces impacts se généralisaient, ils seraient très certainement bénéfiques à l’action du Secours Catholique en termes d’inclusion sociale y compris et peut-être surtout lorsque la réponse au problème d’une personne n’est pas un crédit mais un don.

Pour les partenaires bancaires, en revanche, si une partie des salariés a également changé de regard sur ces emprunteurs, les pratiques bancaires « de droit commun » n’ont pas encore été influencées par les résultats positifs de l’expérimentation des Crédits projet personnel. Notamment, le bon remboursement de ces crédits par ces emprunteurs ne suffit pas toujours à en faire des clients à part entière expliquant que certains recourent de façon successive aux Crédits projet personnel. C’est pourtant cette évolution des pratiques bancaires « de droit commun » qu’il est indispensable d’obtenir pour que cette expérimentation contribue pleinement au développement d’une société plus inclusive.