Concernant l’objet que nous nous proposons d’investiguer : l’aide à autrui professionnalisée, nous avons vu précédemment qu’un lieu privilégié d’observation de cet objet est le champ de l’intervention sociale.
Au regard des enjeux qui traversent actuellement ce champ, c’est-à-dire l’émergence de nouvelles pratiques et de nouvelles professions qui viennent brouiller les pistes précédemment tracées par le travail social, il nous a paru intéressant de pouvoir rencontrer, d’une part, des praticien-ne-s pouvant représenter les professions “traditionnelles” du travail social, et d’autre part, des praticien-ne-s représentant les nouvelles professions créées dans le champ de l’intervention sociale. Le fait d’interroger des praticien-ne-s issu-e-s de chacune de ces catégories présente un double intérêt : tout d’abord, celui de pouvoir comparer les propos tenus par les aidant-e-s formées en travail social à ceux des nouvelles professions du social ; ensuite, celui de mener une investigation transversale aux lieux (structures qui les emploient) où s’exercent l’activité professionnelle et aux spécificités des missions confiées à chacun-e. Ce dernier aspect correspond ainsi en partie à un échantillonnage délibérément hétérogène, pertinent au regard du nombre restreint de participant-e-s rencontré-e-s. L’effectif restreint est cependant au profit d’une approche intensive de leurs propos, ce qui fournit tout de même un grand nombre d’observations via l’importance du corpus : environ 800 pages d’entretiens (dans un format de texte identique à celui-ci).
Une variabilité sera-t-elle repérable, entre ces praticien-ne-s qui déploient leur activité dans des contextes institutionnels différents, et qui diffèrent également par leur niveau de formation à l’intervention sociale ? Afin que l’éventuelle variabilité repérable entre ces deux groupes ne soit pas liée au fait d’avoir des pratiques très différenciées, nous avons ciblé des praticien-ne-s ayant en commun une activité d’accompagnement individuel en rapport avec le dispositif RMI (même si pour la plupart, cette activité ne représente qu’une partie de leur temps de travail, l’autre partie pouvant être consacrée à un encadrement de groupes, ou à un accompagnement dans le cadre d’autres dispositifs). Tou-te-s consacrent la majorité de leur temps d’exercice professionnel en entretiens de face-à-face conduits avec les personnes accompagnées.
Nous avons ainsi choisi d’interroger :
Nous regroupons la participante ayant un diplôme de conseillère en économie sociale et familiale (CESF) avec les assistantes sociales (AS), car ce diplôme, quoique moins ancien, fait partie des professions du travail social. De plus, il est acquis dans les mêmes écoles et la formation, plus courte d’une année, est relativement proche de celle des AS. Enfin, si la pratique des CESF est davantage axée sur la question du budget, elle présente de grandes similitudes avec celles de leurs collègues AS : le dispositif est similaire (rencontres en face-à-face dans un bureau, le plus souvent), et les questions abordées sont souvent identiques (difficultés à l’origine de la demande, budget, vie familiale, projets…).