Avant de présenter le guide d’entretien initialement constitué, il paraît utile d’indiquer quelle était la formulation initiale de la problématique, et les premiers axes de recherche tracés. Notre posture d’interrogation de l’objet “aide à autrui” a été évolutive, au cours de ce travail, mais tout particulièrement dans le temps de la phase exploratoire. Aussi la première formulation de la problématique n’est-elle qu’un point de départ dans la trajectoire effectuée. Si le point d’arrivée diffère du point de départ, le questionnement est toujours resté ancré dans le champ de la psychologie sociale : nous visons à étudier les articulations entre le niveau individuel et le niveau social, pour cet objet de l’aide à autrui. Ces précisions nous semblaient nécessaires avant d’énoncer la formulation initiale de la problématique :
Quels enjeux psychiques 106 et quelles représentations sociales fondent, alimentent et structurent la dynamique de la relation d’aide, du côté de l’aidant, dans le contexte institutionnel du champ social ? Comment peut-on mettre en lumière les liens unissant ces deux niveaux ?
A ce moment, nous n’avions pas encore dégagé la notion “d’aide à autrui”, et faisions appel à la notion de “relation d’aide” pour désigner l’interaction entre aidant-e et aidé-e. Ce n’est que plus tardivement que nous avons perçu le fait que cette formulation comportait un présupposé – celui d’une aide basée sur le lien existant plutôt que sur l’échange de biens matériels ou symboliques.
Le projet de l’investigation des représentations organisant la pensée et les conduites des praticien-ne-s du champ de l’intervention sociale s’est constitué dès l’origine. Mais notre perspective a beaucoup évolué, principalement dans le sens d’un plus grand intérêt porté au contexte socioculturel, comme troisième terme d’un système complexe où aspects intrapsychiques, représentations professionnelles et contexte lié aux rapports sociaux et à la culture s’intriquent étroitement pour constituer la réalité sociale de l’aide à autrui. Les concepts d’historicité et d’ancrages des représentations se sont dans le même temps révélés comme pertinents pour l’analyse des nouages et interactions entre ces différentes dimensions de l’objet que nous étudions.
Nous pensons à présent que ce terme, très flou, car renvoyant à l’ensemble des processus psychiques à l’œuvre pour un individu, ne nous permet pas de définir une perspective suffisamment précise pour questionner notre objet : l’étendue et la variabilité de ces enjeux, d’une personne à l’autre, est telle que ce point de vue n’aurait correspondu qu’à un survol de la question que nous abordons, et n’aurait pas ouvert la possibilité d’une compréhension plus générale de la pensée qui se constitue autour des pratiques d’aide à autrui.