Chapitre VIII – Analyse des enjeux de l’interaction aidant-e/aidé-e 

Après avoir centré notre intérêt sur les conceptions du rôle de l’aidant-e professionnalisé-e que les entretiens donnent à voir, puis sur les modèles qui structurent plus généralement le discours des praticien-ne-s rencontré-e-s, nous allons à présent nous pencher plus spécifiquement sur les enjeux de l’interaction aidant-e/aidé-e, tels qu’ils peuvent être analysés à partir des propos tenus par les aidant-e-s interrogé-e-s. Les conceptions et modèles qui soutiennent et guident l’exercice de la pratique orientent le développement de cette interaction, qui influence réciproquement les systèmes d’interprétation construits et mis en œuvre au fil des expériences réalisées par les praticien-ne-s. Ces différents aspects de la pratique (versant de son intelligibilité, versant des enjeux mobilisés dans l’interaction, constitutifs du même phénomène) s’éclairent mutuellement.

Ce dernier chapitre consacré aux résultats de l’investigation menée à Rillieux-la-Pape sera l’occasion de progresser dans le second axe d’interrogation tracé dans les prémisses de ce travail : nous examinerons ce que les représentations professionnelles viennent révéler des dynamiques inconscientes et interpersonnelles à l’œuvre dans l’interaction aidant-e/aidé-e. Au cours de la phase exploratoire, nous avions commencé à saisir l’importance des processus identificatoires, dont nous développerons ici l’analyse. Mais la question des conflits qui peuvent se développer entre aidant-e et aidé-e n’avait pas pleinement émergé, dans ce temps d’exploration : nous allons voir qu’elle n’est pourtant pas négligeable, car elle vient interroger l’idéal de l’aide relationnelle, où le rôle se conçoit sur le mode d’un accompagnement maïeutique, par l’écoute, de l’aidé-e sur le chemin de son désir, vers la « réalisation de soi » – vision enchantée que le surgissement du conflit vient (et sans doute salutairement) troubler. Ce chapitre sera, à partir ces observations, l’occasion de progresser dans l’axe transversal de notre problématique, qui concerne l’investigation des aspects qui soutiennent le positionnement éthique des aidant-e-s, dans l’interaction avec les aidé-e-s, ou qui, au contraire, y font obstacle.