4.2.3. Perception de l’environnement et des nuisances dues aux transports

Les simulateurs de conduite représentent un cas particulier : selon les circonstances, ils peuvent être considérés comme des EIAH, des outils d’évaluation des fonctions exécutives des conducteurs, sains ou diagnostiqués pour divers problèmes relatifs à la neuropsychologie, des aides au diagnostic de patients présentant des troubles de l’orientation topographique, ou encore des outils d’évaluation de l’environnement de conduite. Cependant, ils ne sont pas notre sujet d’étude, c’est pour cela que nous ne développerons pas de partie qui leur soit spécifique.

Comme nous l’avons déjà dit plus avant Rohrman, Palmer et Bishop ont prouvé que la simulation virtuelle offrait un support valide et acceptable pour toute tâche perceptive, sous réserve d’une qualité élevée et adaptée de la simulation (2000).

Depuis, plusieurs recherches sur la perception de l’environnement et la perception des impacts environnementaux des transports ont été mises en œuvre avec pour support des environnements virtuels (par exemple Champelovier, Hugot, Lambert, Lombardo, Maillard & Martin, 2005). Les interactions entre les modalités visuelle et sonore ont été démontrées dans de nombreuses recherches portant sur la perception de l’environnement (voir section 3.2., page 36 à 38). De même, que le phénomène de conflit perceptif, illustré par la notion d’incongruence, a fait l'objet de plusieurs travaux dans le domaine des impacts environnementaux des transports et de la simulation d'environnement. Pour cela, nous nous sommes intéressés aux Environnements Virtuels bimodaux (visuels et sonores) pour lesquels il existerait un conflit perceptif ou un effet de surréalisme, comme Volz a pu le mettre en évidence en 2002.

En 2003, Bishop et Rohrman ont mené une nouvelle étude intitulée : « Subjective response to simulated and real environments : a comparison » , afin d'évaluer la validité de l’utilisation d'un environnement généré par ordinateur, en comparaison avec la perception du même environnement en milieu réel. Un modèle informatique d'un véritable parc urbain a été développé. Deux versions ont en fait été créées et utilisées : l’une diurne et l’autre nocturne ; de plus des animations de 3 minutes permettaient une « visite » à pied à travers le parc. Le niveau de détails visuels était élevé (selon les concepteurs) : tous les arbres du parc ont été simulés, les bâtiments et les surfaces dures ont été correctement texturés – extrêmement travaillés. Des véhicules en mouvement ont également été inclus. Une bande son a été enregistrée sur place le long de la voie routière pour être ensuite ajoutée pour le doublage des animations vidéos. La méthode d’évaluation utilisée était celle du questionnaire. Celui-ci a été conçu afin de mesurer les réponses et réactions cognitives et affectives à la suite de l’exposition des sujets à l'environnement. Les thèmes des questions comprenaient également les impressions vis-à-vis de la région représentée, la rétention des informations et la compréhension du contenu ainsi que de l’évaluation des simulations et de leur réalisme. Quatre groupes de participants ont été constitués. Tous ont à la fois vu les animations et ont été emmenés pour se promener dans le parc réel, de jour ou de nuit. Pour la moitié d'entre eux l'ordre de la simulation et la réalité s'est inversée. Les résultats détaillés montrent que le temps passé, ainsi que l’argent dépensé pour créer des environnements simulés très détaillés n’engendrent pas nécessairement les réponses correspondant le mieux à celles observées dans l’environnement réel. Il n’y aurait pas de corrélation entre le réalisme de la simulation et les réactions des sujets face à l’environnement virtuel. Toutefois, les différences observées entre le jour et la nuit, sont foncièrement les mêmes dans les environnements simulés et dans l’environnement réel. De plus, le réalisme perçu et évalué par la notation dans le questionnaire rempli par les participants était généralement encourageant. Les conclusions ont donc poussés ces équipes à poursuivre leurs investigations. Ils considèrent que l’utilisation des EVs est justifiée pour les études de perception de l’environnement.

En 2003, avec Ijsselsteijn, Kooijman & Schuurmanns ont présenté une étude dont l’objectif était d’explorer la comparabilité des résultats des recherches en milieu réel avec ceux obtenus en milieux virtuels. Une centaine de participants ont exploré un espace identique dans la réalité et dans un environnement simulé par ordinateur. En outre, la présence de plantes dans l'espace a été manipulée : 2 environnements différents en fonction de la présence et du type de plantes ont été développés. S'appuyant pourtant sur une vaste série de mesures, les des résultats obtenus étaient très mitigés. Les performances des participants concernant la taille et la précision de la carte mentale cognitive que les sujets devaient se représenter à la suite des tests, étaient meilleures dans les conditions d'environnement réel. Cependant, malgré toutes les mesures effectuées et résultats obtenus, l'expérience montre que le comportement des sujets dans les environnements virtuels présentent des similitudes importantes à celui observé dans l'environnement réel. Même s’il persiste des différences importantes, les auteurs ont conclu que les Environnements Virtuels constituent et constitueront une vraie nécessité, mais aussi un sujet de recherche très important pour la psychologie de l'environnement.

Plus récemment, en 2006, De Kort et son équipe (De Kort, Meijnders, Sponselee, & Ijsselsteijn, 2006) ont montré que l’effet des environnements dits « réparateurs », c’est-à-dire pouvant aider à la récupération des ressources d'attention (après épuisement) ou à réduire le stress émotionnel et psychophysiologique, pouvait être obtenu non seulement avec des environnements réels, mais aussi avec des environnements virtuels ou médiatisés (transmis par un médium quel qu’il soit).

Parallèlement, les chercheurs asiatiques travaillent aussi à l’évaluation de l’environnement et à la validité de l’utilisation des Environnements Virtuels. Ainsi, Lim, Honjo & Umeki (2005), ont présenté une étude sur la comparaison de l’évaluation de paysages à partir de photographies, d’environnements virtuels (dans ces deux cas l’expérience avaient lieu en laboratoire) et la perception des mêmes paysages simulés présentés par l’interface de l’internet.

Les résultats de l'expérience menée en laboratoire et de l’expérience réalisée par le biais de l'Internet ont été comparés. Dans les deux expériences, la simulation représentait un jardin paysager. Avec trois médias représentant le même paysage (des photographies, des images infographistes statiques et/ou des images infographistes permettant une promenade). Les chercheurs ont enregistré les impressions des sujets après chaque scène. Leurs réponses aux trois stimuli ont été analysées statistiquement (analyse de profil, ANOVA et T-Test). Ils ont aussi demandé aux participants lequel des médias représentait, selon eux, le mieux le paysage réel. L'analyse des profils montre des résultats semblables dans l'expérience en laboratoire et face à l'Internet. Le niveau de réalité ressenti était, par ordre décroissant, les Photographies, la Promenade – représentée par des images de RV- et les images infographistes Statiques, que ce soit alors en laboratoire ou dans le cas de l’expérience par Internet. Les résultats ont donc montré que la Réalité Virtuelle pourraient être utilisées comme un stimulus efficace pour l'évaluation de paysage tant pour des travaux menés par le biais de l'Internet que dans un laboratoire.