Chapitre 7 (Cadre expérimental) : Expérience Principale

L’expérience principale mise en place pour ce travail de doctorat consiste en une étude véritablement exploratoire : elle vise à permettre de définir les techniques, outils et méthodes d’investigation relatives aux environnements virtuels les plus adéquats pour répondre à la problématique de l’évaluation des impacts environnementaux des transports. De plus, ces techniques doivent pouvoir être utilisées au LSEE de l’INRETS, laboratoire visant à la mise en situation de riverain d’une infrastructure de transport, et permettre de prévoir les réactions possibles vis-à-vis de scènes qui n’existent pas dans la réalité (ou pas encore). Pour cela les réponses pouvant être observées dans la réalité vont être comparées à celles obtenues en laboratoire. En conséquence nous avons opté pour l’évaluation et la comparaison de l’efficacité, au niveau du sentiment de présence, de trois types de simulation. Ceci, à l’aide d’une part des méthodes traditionnelles d’évaluation de ce sentiment de présence (questionnaire), et d’autre part des mesures indirectes du sentiment de présence obtenues grâce aux effets de contexte et d’amorçage, observés dans la tâche de catégorisation pré-testée dans l’expérience précédente.

Tout d’abord pour le travail mené sur le terrain nous avons émis l’hypothèse suivante : si la classification d’images associées à un film projeté en arrière plan donne lieu à une meilleure exécution et de meilleures performance (temps de réponse plus rapides et meilleur taux de bonnes réponses) que pour des images non reliées au film, alors il est possible d’observer les mêmes types de résultats dans la réalité avec des personnes vivant sur l'emplacement du site de tournage du même film. La différence de condition expérimentale ne porte plus sur le lien avec le film projeté en fond, mais sur la relation entre les images, le contexte environnant et le paysage réel que les sujets voient depuis leur habitation. Ainsi les performances à la tâche de classification en catégorie « artefact vs naturel » d’images associées au paysage et au contexte environnant seront meilleures que les performances pour catégoriser des images non reliées.

Ensuite, pour la partie expérimentale réalisée en laboratoire, nous avons supposé que le sentiment de Présence ressenti dans un environnement virtuel permet l’activation des connaissances et représentations relatives à l’environnement simulé. Subséquemment, comme nous voulions déterminer le type de simulation le plus adapté pour évaluer la perception des impacts environnementaux des transports en laboratoire, notre troisième hypothèse générale est qu’une des 3 séquences serait plus efficace que les autres pour permettre aux participants de se mettre en situation de riverain d’une infrastructure de transport. Il semblerait assez évident d’envisager que la séquence vidéo soit la plus efficace car la plus réaliste et donc la plus fidèle à la représentation de la réalité. Toutefois, un film vidéo reste une représentation en 2 dimensions, et est aussi plus associé à l’idée du cinéma qu’à celle de se projeter dans la scène comme le sont les environnements virtuels. De plus, l’un des intérêt des environnements virtuels est de pouvoir simuler des éléments n’existant pas encore dans la réalité. Nous avons donc fait l’hypothèse, que la réalité augmentée, mixe et compromis entre la vidéo et la séquence 3D (parfois perçue comme peu convaincante ou réaliste selon les populations testées), serait celle qui permettrait aux participants d’atteindre le plus facilement le sentiment de Présence dans la scène. Nous pensons de plus que c’est face à cette séquence que l’intensité de la Présence est la plus élevée, et que c’est ce type de film qui permet le mieux de reproduire les réponses comportementales observables dans la réalité.

Ainsi, concernant les paradigmes expérimentaux choisis pour définir des critères implicites d’évaluation de la Présence et donc de l’efficacité des simulations, la mise en place du protocole expérimental devait permettre de fournir des éléments de réponses aux deux hypothèses suivantes :

- Hypothèse 1 : l’immersion et le sentiment d’être Présent dans une scène, même fictive, activent différentes représentations relatives à la situation représentée ou simulée. Ainsi, les performances à une tâche de catégorisation seront meilleures (latences plus courtes et taux de bonnes réponses plus élevés) pour des images ayant un lien avec la situation dans laquelle le sujet est exposé (la situation peut être réelle ou simulée par un film vidéo, une séquence de Réalité Augmentée ou de Réalité Virtuelle).

- Hypothèse 2 : plus le sentiment de Présence est difficile à atteindre, plus les capacités attentionnelles du sujet sont mobilisées sur le film et la situation, et moins il est aisé de réengager son attention sur un événement étranger à la situation. Aussi lors d’une tâche de détection de signal sonore, type « bip », nous faisons l’hypothèse que les performances seront proportionnelles à l’intensité du sentiment de Présence dans la scène. Plus le sentiment de Présence est intense, plus les performances à une autre tâche attentionnelle seront élevées.

Deux groupes de participants ont été constitués. Rappelons qu’il s’agit de comparer les réponses et comportement identifiables et mesurés dans la réalité à ceux observables dans un environnement simulé en laboratoire. Le premier groupe de participants se compose donc de sujets vivant sur le site choisi et recréé lors des simulations. L’intérêt est de permettre, spécifiquement sur ce groupe, de réaliser une comparaison domicile / laboratoire. Le deuxième groupe, dit groupe contrôle a été recruté d’une part pour permettre l’étude de la perception et des comportements de sujets moins susceptibles de chercher les différences ou les points communs précis avec leur environnement de vie réel, et donc moins conditionnés à se focaliser sur la qualité des simulations . D’autre part, l’intérêt d’ajouter un groupe contrôle est qu’il est habituellement rare de pouvoir expérimenter avec des participants vivant sur les sites simulés, cet échantillon est donc plus représentatif des groupes généralement testés.

Le groupe de riverains a été testé deux fois, une première fois à son domicile, et une seconde fois au Laboratoire de Simulation et d’Evaluation de l’Environnement (LSEE).

Le groupe contrôle a été testé une seule fois au LSEE.

Pour chaque session de test (au domicile pour les riverains, comme au LSEE pour les deux groupes), les participants devaient réaliser deux types de tâches cognitives - une tâche de catégorisation et une tâche de détection de signaux sonores – puis répondre à un questionnaire d’auto-évaluation.