Contexte de sa mise en œuvre et limites de l’analyse

Afin de réaliser une enquête dans des conditions de représentativité acceptable, nous avons intégré nos questionnements à une recherche de portée plus générale sur la mobilité des jeunes adultes de l’agglomération lyonnaise.

Le projet global dans lequel s’est inscrite la dimension quantitative de notre projet s’est déroulé entre mai 2000 et mai 2003, dans le cadre d’un appel d'offre « Aide à la décision publique et privée » proposé par la région Rhône-Alpes. Il avait pour principal objectif d’étudier les trajectoires résidentielles ainsi que les processus de dispersion des jeunes dans la région Rhône-Alpes, en prenant l’agglomération lyonnaise comme point central de ses analyses. Cette étude de la mobilité a été conduite de pair avec celle des processus d’autonomisation. Le pilotage du projet a été assuré par Bernard Bensoussan (Chargé de Recherche CNRS) et mis en œuvre par lui et son équipe « Les Etudiants et la Ville » (Groupe de Recherche sur la Socialisation – UMR 5040 / Institut des Sciences de l’Homme). Brigitte Baccaïni, alors Chargée de Recherche à l’INSEE, a été associée au projet ; ainsi que la structure Ardèche Images pour les aspects de l’étude relatifs aux dimensions audiovisuelles.

L’enquête quantitative qui a été élaborée dans ce cadre était une enquête téléphonique. Elle avait pour ambitieuse vocation de dépasser les approches quantitatives habituelles en allant au plus près des pratiques. Par ce dispositif, nous cherchions à élucider les agencements de positions dans différents champs (résidence, formation, profession) à partir desquels les jeunes ont dû arbitrer pour construire leur histoire, l'objectif étant de dégager une typologie des pratiques résidentielles des jeunes qui soit éclairée par les différents registres de leurs pratiques.

Nous avons choisi de travailler à l'échelle de l'agglomération lyonnaise afin de pouvoir tenir compte des contextes d’origine et de résidence dans l’analyse des modes de différenciation des itinéraires et des pratiques résidentielles des jeunes adultes. La connaissance des contextes, des milieux résidentiels, des types d'habitat présents dans l’agglomération devait nous permettre de mieux prendre en compte les incidences des contextes spécifiques de résidence (types de commune, types des quartiers, types de logements) sur la mobilité et les conditions d'autonomisation de la population étudiée.

Il est important de souligner que dans le cadre de notre travail de thèse, la population interrogée a d’abord été fonction des critères énoncés ci-dessus relatifs au projet mené pour la Région Rhône-Alpes. Toutefois, ceux-ci n’entraient pas en contradiction avec nos objectifs. Le premier était de permettre une comparaison entre enfants issus de parents séparés et les autres. Cette étude menée en population générale correspondait à ces critères. Ensuite, il était important qu’une représentativité soit assurée sur une échelle territoriale suffisamment importante pour approcher des situations issues de différents milieux sociaux – ce qui était le cas de ce dispositif. Enfin, il nous fallait pouvoir apprécier finement les situations et contextes de vie des personnes interrogées et la démarche globale de ce projet allait dans ce sens.

L’on sait par des études de l’INED, par exemple, que la cartographie des divorces n’est pas la même en Ile-de-France et en province ; et que d’un département à l’autre, de grandes variations existent [Boigeol., Commaille, Munoz-Perez, 1984]. Le fait de résider en milieu rural, par exemple, n’a pas les mêmes incidences non plus que le fait d’habiter l’agglomération lyonnaise. Toutefois, il est important de repréciser que d’une part, ce ne sont pas les divorces qui sont ici analysés mais les régimes relationnels intergénérationnels, probablement moins sensibles aux changements de contextes de vie. D’autre part, le fait d’avoir mobilisé dans la plupart des analyses des décohabitants suppose que ce biais du contexte de résidence des parents soit en partie amoindri.

Mais précisément, cette spécificité de la décohabitation de la population sollicitée dans la majeure partie des analyses implique d’autres biais. Qu’ils soient plus souvent jeunes délocalisés, par exemple18., a probablement quelques incidences les résultats obtenus, sans qu’il soit réellement possible de démêler dans quel sens cela a pu orienter les résultats. Il est délicat de signifier quelle est la spécificité de cette population par rapport à l’ensemble des 18-30 ans autrement que par cette caractéristique urbaine récente. L’échantillon interrogé n’est en aucun cas le reflet d’une certaine catégorie sociale de la famille d’origine puisque les quotas utilisés pour constitués les échantillons ont tenu compte des proportions en termes d’activités (actifs, en formation ou chômeurs), de ménages (cohabitants, seuls, en couple ou en colocation) et d’âges (pour chaque âge entre 18 et 30 ans) pour les enquêtés eux-mêmes, et cela pour chaque terrain d’enquête

Il nous semble que l’on peut ainsi circonscrire nos analyses et établir qu’elles correspondent à ce que l’on peut observer pour des jeunes de 18-30 ans résidant au moment de l’enquête en milieu urbain ou périurbain. Les résultats proposés sont donc à majorer ou minimiser si l’on voulait généraliser ces observations aux 18-30 ans de l’ensemble du territoire national. Les processus décrits sont en revanche probablement assez représentatifs de la réalité des pratiques, seuls leurs poids respectifs seraient modifiés.

Notes
18.

Sur les 540 décohabitants de la base de données, 63 % des mères ne vivent pas dans le Rhône, ce qui suppose qu’une part proche des décohabitants de notre base de données vient d’un autre département.