La répartition des rôles lorsque les parents sont ensemble

Comme nous venons de le voir, on ne parle pas des mêmes choses à ses enfants suivant que l’on est le père ou la mère. Ainsi, lorsque les parents sont ensemble, les mères ont plus souvent que les hommes tendance à parler des autres membres de la famille [Graphique 44]. C’est même le sujet le plus souvent abordé dans les conversations, que ce soit avec les mères (pour plus de 8 personnes sur 10), ou dans une moindre mesure avec les pères (7 enquêtés sur 10). Avec elles, les jeunes adultes parlent également plus souvent qu’avec les pères des autres dimensions relationnelles, que cela concerne les amis mais également les relations avec le ou la petite amie ou conjoint de l’enquêté, ce qui était prévisible au regard des précédents résultats. En ce sens, les conversations à propos des membres de la famille relève plus de dimensions relationnelles qu’organisationnelle ou informatives. « Parler de la famille » peut revêtir des réalités différentes : donner des nouvelles des frères et sœurs constitue un registre de conversation différent de celui qui consiste à discuter des difficultés rencontrées par ceux-ci. Nous pouvons donc supposer, au vu des autres informations, que l’on ne parle pas de la même façon de « la famille » avec son père qu’avec sa mère.

En revanche, un certain nombre de thèmes semblent pouvoir être sujets de conversations indifféremment avec le père ou la mère. Ainsi, les enquêtés déclarent parler de leur travail avec le père et la mère dans de mêmes proportions (c’est même un sujet particulièrement prisé). Il en va de même pour les études lorsque l’enquêté est en formation.

La santé du jeune adulte a également ce statut de thème abordé autant avec le père qu’avec la mère. Ce résultat est assez surprenant dans la mesure où ce qui touche au corps est habituellement du ressort des compétences maternelles [Kaufmann, 1992].

Le seul domaine dans lequel le père est plus souvent mobilisé que la mère concerne les aspects les plus fonctionnels des communications téléphoniques, à savoir tout ce qui touche aux dimensions pratiques et organisationnelles du quotidien.

Graphique 44. Thèmes abordés par le père et la mère (séparés ou ensemble) pendant les communications téléphoniques avec le jeune adulte décohabitant (%)
Graphique 44. Thèmes abordés par le père et la mère (séparés ou ensemble) pendant les communications téléphoniques avec le jeune adulte décohabitant (%)

Ces résultats correspondent aux observations faites dans d’autres études148 sur la perception très différente du téléphone qu’ont les hommes par rapport aux femmes. Gérard Claisse montre notamment comment, pour les hommes, le téléphone est « ‘ plus fondamentalement un moyen leur permettant d’atteindre un objectif, d’organiser leur emploi du temps, leurs activités149 », tandis que les femmes n’auraient d’autre finalité que la communication interpersonnelle. Ainsi, il oppose deux représentations de ce média : le téléphone-outil pour les hommes et le téléphone-parole pour les femmes. Les résultats obtenus dans le cadre de notre enquête entérinent cette analyse, tout au moins concernant les thèmes de conversation les plus typiques : les aspects pratiques, seul sujet où les pères sont plus souvent mobilisés que les mères ; et les dimensions relationnelles, registres dans lesquels les mères sont significativement plus souvent sollicitées.

Dans cette répartition des rôles, accentuée par le fait d’être en couple, comment les parents gèrent-ils l’usage du téléphone quand il y a eu séparation ?

Notes
148.

Voir notamment dans la revue Réseaux n°103.

149.

Claisse, 2000. p 69.