Comparaison entre les parents séparés des appels passés à leur initiative suivant le degré d’autonomisation de leurs enfants

Etant donnée la faiblesse des effectifs, nous ne retiendrons que les variations très importantes entre deux états.

Si les mères sont plutôt moins souvent à l’initiative des appels après 26 ans, comme c’était le cas pour celles qui sont mariées, ce « décrochement » corrélé à l’âge dans l’initiative des appels a lieu plus tôt pour le père. Dès 23 ans, ils se positionnent moins souvent dans la posture de l’appelant et laisse aux jeunes adultes l’initiative des appels et ainsi, de la relation. Sans l’influence de la mère au domicile, ce changement s’effectue plus tôt que pour les pères mariés.

Tableau 59. Initiative des appels suivant les indicateurs d’autonomisation des jeunes adultes dont les parents sont séparés (% colonne)
  Age de l’enquêté Statut d’activité de l’enquêté Ménage de l’enquêté Présence d’enfant au domicile de l’enquêté
  18-22 23-26 27-30 actif étudiant sans activité seuls couples colocataires oui non
La mère appelle 56 64 47 54 58 60 70 49 44 80 52
L’enquêté appelle 44 36 53 46 42 40 30 51 56 20 48
Le père appelle 50 36 40 42 50 18 46 41 33 46 40
L’enquêté appelle 50 64 60 58 50 82 54 59 67 55 60

Sous-population des décohabitants dont les parents sont séparés, sans veuf, et dont les DEUX parents ont des communications téléphoniques avec eux.

Graphique 51. Initiative des appels des parents suivant les indicateurs d'autonomisation des jeunes adultes dont les parents sont séparés (en %)
Graphique 51. Initiative des appels des parents suivant les indicateurs d'autonomisation des jeunes adultes dont les parents sont séparés (en %)

Le changement de statut entre étudiant et actif n’apparaît pas comme un élément susceptible d’influencer le rapport à l’initiative des appels entre les mères et les jeunes adultes. C’était pourtant plutôt le cas pour les parents mariés. Nous l’avons vu, la question de l’emploi est pourtant centrale dans les préoccupations des mères séparées. Mais le fait est, comme cela a également été dit, que ces jeunes adultes ont plus souvent que les autres travaillé pendant leurs études. La distinction entre la situation d’étudiants et d’actifs est ainsi, sans doute, moins évidente et n’entraîne pas en soi de variation dans l’organisation des régimes de communications téléphoniques.

Les pères accusent pour leur part un soudain changement de comportement vis-à-vis de leur descendant sans activité. La faiblesse des effectifs nous amène à rester prudent dans l’interprétation de cette observation, surtout qu’elle s’oppose à ce qui a été décrit à propos des initiatives d’appels lorsque les parents sont mariés : le père prenait alors plus souvent l’initiative, mais pour des populations spécifiques.

Le changement de contexte résidentiel, lequel ne voyait pas ou peu de changements de comportement de la part des parents mariés, amène des variations notables dans les pratiques téléphoniques entre mères et descendants. La mise en couple fait chuter la part des mères appelantes. Est-ce que « la peur de déranger », mise en avant par Martine Segalen [1999], devient très importante à cette occasion du fait de l’attention que l’on accorde à une relation de couple quand on connaît sa fragilité ? Est-ce un marqueur fort d’un accès à une certaine autonomie pour ces mères séparées qui les amène, dès l’installation en couple de leurs descendants, à moins exercer leur parentalité en considérant que désormais, ils sont « grands » ? En tous les cas, les effets de l’installation en couple ne sont pas du tout les mêmes sur le comportement des pères puisque les incidences semblent nulles.

La présence d’enfant était un élément compliqué à prendre en compte pour les parents mariés car il ne concernait qu’une petite part des enquêtés dont les caractéristiques sociales étaient marquées. Que dire alors de ce qui se passe pour les jeunes adultes issus de parents séparés ? L’effectif est en effet très restreint et les caractéristiques sociales de ces enquêtés sont très diverses et ne correspondent pas particulièrement au milieu populaire identifié dans le cas des parents mariés. La présence d’un enfant fait significativement augmenter la proportion des appels à l’initiative de la mère. Nous pouvons ici supposer qu’il ne s’agit pas tant d’une soudaine intention de prendre à nouveau soin des jeunes adultes, mais ce serait plutôt l’expression d’un désir d’affiliation. La séparation des parents met à mal les liens d’alliance, et l’on peut se demander, dans le cas des mères tout au moins, si la dimension de la filiation ne devient pas centrale. Les effets de la présence d’une nouvelle génération sont peu évidents dans le comportement des pères