Un « appareil-à-penser » modulable

Depuis la première constatation de l’existence d’une « littérature étrangère en langue française » par l’abbé Henri Grégoire55 en 1808 et la première utilisation du mot « francophonie » par Onésime Reclus56 en 1880, l’idée de la francophonie a fait son chemin : elle s’est d’abord ouverte à tous les espaces qui utilisaient la langue française comme outil d’écriture (rappelons que le texte de l’abbé Grégoire ne se référait qu’à l’Afrique Subsaharienne), pour ensuite reconnaître la multiplicité et la diversité de ces espaces57. Et, même si aujourd’hui une polémique est engagée au sujet de l’appartenance des écrivains francophones à un champ littéraire « français » (entendons « franco-français ») ou « francophone », dont l’un aurait un peu plus de prestige que l’autre58, les productions francophones ont su montrer, au fil du temps, que l’appellation « étrangère » n’était plus représentative ; on lui préfère désormais le terme – au pluriel récent – de « francophonies ».

Par ailleurs, au sujet de cette opposition entre les champs « franco-français » et « francophones », il peut également être intéressant de constater que les écrivains francophones ne semblent pas de fait délibérément s’exclure de l’un des deux camps, mais plutôt, qu’à l’inverse, il ne leur est accordé aucune place dans le plus académique des deux. Des ouvrages, tel que Le Temps des lettres (parution relativement récente : 2001), proposant de s’interroger sur les périodisations de l’histoire littéraire française au XXe siècle, ne mentionnent pas une seule fois l’existence, pourtant nées sur le territoire national même, de littératures non-franco-françaises (le terme approprié fait défaut…). Se questionnant plus particulièrement sur « quand commence le XXe siècle littéraire [français] », Michel Bernard59 cite : Mauriac, Cendras, Saint-John Perse, Bernanos, Cocteau, Céline, Eluard, Giono, Montherlant, Pagnol, Artaud, Breton, Tzara, Aragon, Michaux, Ponge, Queneau, Yourcenar, Sartre, Gracq, Beckett, Duras, Robbe-Grillet, et encore Verhaeren, Jarry, Schowb, Hérédia, France, Loti, etc. Nous voyons que, pêle-mêle, se retrouvent dans ces exemples les représentants d’une foultitude de mouvements et courants littéraires français recouvrant l’ensemble du siècle : Exotisme, Symbolisme, Surréalisme, Structuralisme, Absurde, Oulipo, Nouveau Roman, etc. que ces auteurs soient ou non natifs de France, que le français soit ou non leur langue maternelle. Y figurent donc des auteurs francophones, ou tout du moins francophiles, mais cette franco-phonie/philie ne reste réservée qu’à l’espace européen… Et nous voyons dans cette sélection que le dehors de l’Europe n’existe que par des auteurs natifs du centre : Michaux, Duras, Loti, etc. Que faire par exemple de Césaire, ici absent ? Doit-on penser là qu’en plus d’une dichotomie entre les champs « franco-français » et « francophones » il en existe une seconde, entre une francophonie européenne et une autre non européenne ? Pourtant, Aimé Césaire est européen, et français. Nous voyons qu’une telle omission dans une analyse, rappelons-le, parue en 2001, tend à réinstaurer un ordre littéraire similaire à celui pré-colonial où le centre ne serait non plus l’empire colonial, mais le continent européen, celui des anciennes nations colonialistes…

Toutefois, de l’idée d’une francophonie à celle des francophonies, les frontières de cet espace littéraire se sont considérablement ouvertes. Qu’en est-il alors du rôle de l’écrivain francophone ? Le déplacement de sens engendré par le pluriel a-t-il modifié la fonction de l’écrivain francophone ou, à l’inverse, ne serait-ce pas davantage un changement dans le rapport qu’entretiennent ces écrivains à la langue française qui a pu forcer la pluralisation du champ littéraire francophone ?

Dans le contexte colonial du début du XXe siècle, au sujet des écrivains de la Négritude, Jean-Paul Sartre s’exprimait encore ainsi :

‘C’est dans cette langue à chair de poule, pâle et froide comme nos cieux et dont Mallarmé disait qu’ « elle est la langue neutre par excellence, puisque le génie d’ici exige une atténuation de toute couleur trop vive et des bariolages », c’est dans cette langue pour eux à demi morte que Damas, Diop, Laleau, Rabéarivelo vont verser le feu de leurs ciels et de leurs cœurs : par elle seule ils peuvent communiquer ; semblables aux savants du XVIe siècle qui ne s’entendaient qu’en latin, les noirs ne se retrouvent que sur le terrain plein de chausse-trapes que le blanc leur a préparé : entre les colonisés le colon s’est arrangé pour être l’éternel médiateur ; il est là, toujours là, même absent, jusque dans les conciliabules les plus secrets. Et comme les mots sont des idées, quand le nègre déclare en français qu’il rejette la culture française, il prend d’une main ce qu’il repousse de l’autre, il installe en lui, comme une broyeuse, l’appareil-à-penser de l’ennemi. Ce ne serait rien : mais, du même coup, cette syntaxe et ce vocabulaire forgés en d’autre temps, à des milliers de lieues, pour répondre à d’autres besoins et pour désigner d’autres objets sont impropres à lui fournir les moyens de parler de lui, de ses soucis, de ses espoirs.60

La langue est un outil, non seulement littéraire, mais encore politique : c’est une langue oppressive qui permet à l’un-dominant d’asseoir son pouvoir sur l’autre-dominé. Et l’omniprésence du colon soulignée par Jean-Paul Sartre exprime bien comment cette langue, répondant à « d’autres besoins et pour désigner d’autres objets », a pu s’imposer jusqu’à forcer les imaginaires à se construire autrement, à se dire autrement. Langue médiatrice donc, qui fait de l’oppresseur un « éternel médiateur » entre lui et le colonisé, et bien plus encore, entre les colonisés eux-mêmes. Mais à force de broyer « l’appareil-à-penser de l’ennemi », le poète de la Négritude n’est-il pas parvenu à modifier son statut ? La langue française est ici un espace de conciliation qui permet, en un point encore central, de faire graviter autour d’elle des aires culturelles assujetties par la colonisation. Ainsi, du fait des exils, du fait du déplacement – bien réel – des écrivains vers la sphère du premier des trois cercles concentriques, la perception de cette langue, ainsi que son utilisation, n’ont-elles pas à leur tour pu être déplacées ?

Dans cette perspective, s’interrogeant sur le « souci de la médiation » chez Maximin, Bernard Mouralis reprend le terme de « médiateur » employé par Jean-Paul Sartre pour l’attribuer non plus aux colons, mais à ceux qu’il nomme les « écrivains de l’exil » :

‘Et c’est sur ces « chemins océans » que Maunick situe – la remarque vaut évidemment aussi bien pour les autres « écrivains de l’exil » – ces médiateurs qu’ont été pour lui Césaire ou Milosz, bref tous ceux qui ont préféré avoir pour patrie le langage plutôt qu’un territoire géographique et dont les « italiques » (Maunick, 1990) viennent nourrir son texte.61

Alors que l’un attribue la fonction de « médiateur » aux colons, l’autre l’attribue aux « écrivains de l’exil ». Ne s’agit-il là que d’une divergence de point de vue ? Il semblerait que non. Aux déplacements géographiques ont suivi des déplacements langagiers. Et c’est ainsi que, à la suite des modifications des frontières, à la suite du rapprochement entre eux des différents cercles, l’espace de conciliation qu’était la langue du colon (« éternel médiateur » selon Sartre) s’est changé en un espace plus large, plus ouvert d’où s’est effacée la notion de territoire. Rien d’éternel dans cette fonction, précise donc Bernard Mouralis qui, à l’inverse, préfère aujourd’hui la déplacer en l’attribuant à d’autres : à ceux-là même qui ont instauré, « comme une broyeuse, l’appareil-à-penser de l’ennemi », Maunick, Césaire, Milosz et les « autres “écrivains de l’exil” ». En parlant de ces « autres », Mouralis pense-t-il également, comme Edouard Glissant, à Saint-John Perse, Segalen, Kateb Yacine, Cheik Anta Diop, Léon Gontran Damas, etc., tous ces poètes qui ont « aboli la notion même de centre et de périphérie »62 ? La langue n’est plus limitée par des frontières nationales, elle devient sa propre « patrie » ; « patrie » désormais ouverte à l’ensemble des espaces où se sont entrechoquées les cultures. « L’appareil-à-penser » de l’un l’est devenu pour l’autre qui a su s’approprier ce nouvel outil, le rendre sien, sans pour autant se dénaturer. Métamorphose donc de l’outil langagier qui, par le jeu des déconstructions et reconstructions, a changé, car assimilé par de nouveaux imaginaires, par de nouvelles possibilités de dire. Dans le prolongement des voix de la Négritude (africaine et antillaise), se font ici entendre celles d’auteurs ayant également conquis « l’appareil à penser de l’ennemi ». Nous pensons notamment aux voix de la Créolité antillaise qui, en 1989, clamaient : « Nous l’avons conquise, cette langue française »63, actant ainsi de l’investissement réalisé. Ne peut-il pas en être de même pour l’écriture créolophone de Monique Agénor ? Cette écriture, s’inscrivant certes non pas dans une Créolité antillaise mais dans une Créolie réunionionnaise 64 a également été façonnée, comme a tenté de le montrer Loriane Pédurant65 dans son étude comparative des romans d’Agénor et de Confiant, par un processus de créolisation similaire à celui des écrivains créolophones des Antilles. Bé-Maho et Comme un vol de papang’ marquent tous deux la présence simultanée de plusieurs « appareils-à-penser » langagiers : le créole, le français, le malgache. Nous pouvons d’ailleurs notifier la présence d’un glossaire à la fin de chacun de ces deux textes : les termes et expressions qui y sont présentés appartiennent aux registres du créole réunionnais et du malgache, s’insérant au sein du livre dans un langage fortement marqué par la présence du français, et attestant ainsi de la pluralité des imaginaires en présence (ainsi que de la pluralité des lecteurs auxquels s’adresse le livre)66. Qu’en est-il alors pour l’écriture de Jean Lods, auteur réunionnais, mais dont le langage ne propose pas une mixité aussi marquée ? Et la question vaut également pour Nabile Farès et Jean-Marie G. Le Clézio : l’absence visible de langues propres à leurs espaces d’origine vaut-elle pour une invisibilité totale de ces imaginaires ? Si la créolité relevée chez les écrivains créolophones des Antilles comme de La Réunion se lit avant tout par la mise en mots d’une pluralité langagière, les expériences de nos auteurs non-créolophones ne semblent pas pour autant exemptes de métissages. L’altérité semble pouvoir s’y lire par d’autres biais, démontrant ainsi que dans la pluralité francophone le recours à la créolisation langagière n’est pas la seule modalité possible de rencontres et d’échanges avec l’Autre ; ce que nous verrons par la suite.

Présentant une réflexion sur les questions induites par la francophonie littéraire, et se référant aux travaux anthropologiques de Balandier, Michel Beniamino propose la définition suivante de la francophonie :

‘La francophonie littéraire constitue, selon moi, la forme moderne d’un ensemble de phénomènes liés à la rencontre avec l’Autre – dont on peut mettre en débat les origines historiques (peut-être la Renaissance) – mais dont la spécificité – ce qui marque sa rupture par rapport aux problématiques antérieures – serait de lier la perspective de l’altérité à la question de la langue au sens socio-symbolique et socio-linguistique dans une perspective de domination.67 ’

Si la « rencontre avec l’Autre » s’est toujours réalisée dans un rapport de domination et si le rapport dominant/dominé tend aujourd’hui, du fait de la décolonisation, à s’effacer, il ne disparaît pas pour autant puisque distribué d’une autre façon. Les enjeux du rayonnement culturel de la langue française à travers le monde, par exemple, peuvent en apporter un témoignage. Les questions de la nationalisation et de l’universalisation du français ne relèvent d’ailleurs pas d’une prise de conscience contemporaine, puisqu’elles sont déjà antérieures à l’abolition de l’esclavage et, selon le propos de Michel Beniamino, elles pourraient encore remonter à la Renaissance68. A titre d’exemple, il peut être judicieux de rappeler les travaux de l’abbé Grégoire et notamment son Rapport sur la nécessité et les moyens d’anéantir les patois et d’universaliser l’usage de la langue française (paru en 1794)69 dont le titre même est très évocateur, ou encore de citer Lamartine déclarant à la Chambre des députés près d’un demi-siècle plus tard, en 1841, que concernant la France : « sa grande place dans le monde lui a été dessinée par la main de ses artistes, par la plume de ses écrivains, plus large et plus incontestée que par l’épée même des soldats »70. Devrons-nous alors lire dans les différents processus de modulation, comme par exemple la créolisation, l’expression d’enjeux, en plus d’identitaires, politiques ? Si en filigrane persiste donc un rapport de domination, il n’en est pas moins sûr que l’utilisation faite de la langue ne soit encore aujourd’hui qu’une utilisation contradictoire, allant, comme le soulignait Sartre, toujours en sens opposé, c’est-à-dire dans le sens de la lutte face à une force dominante. Au couple dominant/dominé se substituerait le couple dominant/résistant, où l’enjeu de l’Un serait de travailler autrement, par une autre manière de la (dé)construire, la langue de l’Autre. Cette perspective est-elle politique chez nos auteurs ? Ne relève-t-elle pas d’un désir de comprendre les expériences passées et présentes afin de pouvoir habiter leurs mondes, le Monde ?

Les nouvelles voix francophones ont intégré l’outil linguistique français, et même si la parenté avec des auteurs de littérature française antérieurs à la colonisation (antérieurs à l’expansion du français) n’est pas toujours révélée, avouée ou affirmée, il va de soi que cette langue reste un attelage linguistique charroyant en elle un imaginaire, un « appareil-à-penser ». Dès lors, cette constatation ajoutée à celle de l’ouverture – ou tout du moins de l’élargissement – des frontières, favorisant ainsi les rencontres entre les divers « appareils-à-penser » plus ou moins contaminés par la langue, permet d’émettre l’hypothèse d’un renouvellement langagier… l’hypothèse de la naissance de nouvelles manières de dire, de nouvelles formes d’expression, car désormais ouvertes à une multitude grandissante d’aires culturelles où, par ailleurs, étaient déjà présentes d’autres langues.

La langue française, qui a été « cette syntaxe et ce vocabulaire forgés en d’autre temps, à des milliers de lieues, pour répondre à d’autres besoins et pour désigner d’autres objets », au sein de ces aires s’est muée en une langue nouvelle, bien évidemment pas « étrangère », devenant au fil du temps, non plus l’outil de « l’ennemi », mais un outil langagier commun. Il est devenu l’une des manières de pouvoir dire, de s’exprimer, de témoigner, etc., et ce, qu’il soit utilisé en présence d’autres langues ou pas. Il ne s’agit donc plus d’un espace littéraire fermé, uniquement lié aux colonisations, mais davantage d’un lieu de rencontres et d’échanges où viennent se croiser l’ensemble des aires culturelles francophones, ouvertes les unes aux autres, se faisant écho, et par le jeu des déplacements, tendant à effacer les frontières. Le choix de notre corpus voudrait donc rendre compte de cette pluralité ainsi que de cette ouverture. Par conséquent, afin de mettre en lumière ces éléments, il peut maintenant être utile de préciser quelques fondements biographiques et critiques concernant nos auteurs. Il s’agira là de fondations qui nous permettront, par la suite, de mieux cerner les présences et les mouvements qui régissent et structurent leurs textes.

Notes
55.

Henri Grégoire, De la littérature des Nègres, Paris, Maradan, 1808.

56.

Onésime Reclus, France, Algérie, Colonies, Paris, Hachette, 1880.

57.

Concernant l’évolution du terme francophone, Jean-Marc Moura propose l’historique suivant : « Le terme francophone, adjectif et substantif, est attesté, on le sait, en 1880, dans l’ouvrage du géographe Onésime Reclus, France, Algérie, et colonies. Il signifie alors : “qui parle français” et désigne les habitants de langue française d’entités nationales ou régionales où le français n’est pas langue unique. Le mot entre dans le dictionnaire en 1930 (Supplément au Larousse du XX e siècle), mais demeure peu utilisé. Il ne se répand vraiment qu’après la Seconde Guerre mondiale. Le substantif francophone, qui en est dérivé et attesté lui aussi en 1880 chez Reclus, désigne un ensemble ou une partie du monde francophone (La francophonie ; la francophonie suisse). Il est rarement utilisé avant 1962, lorsque la revue Esprit consacre un numéro au “Français langue vivante” qui s’intéresse à la francophonie. L. S. Senghor en propose alors une définition : “La francophonie, c’est cet Humanisme intégral, qui se tisse autour de la terre : cette symbiose des “énergies dormantes” de tous les continents, de toutes les races, qui se réveillent à leur chaleur complémentaire” (p. 844). Le terme s’écarte ainsi de la notion géographique et linguistique de Reclus pour s’apparenter à celle de francité, désignant, par-delà la langue, l’esprit de la civilisation française, la Culture française (L. S. Senghor, Discours de l’Université de Laval, 1966, “La Francophonie comme culture”). Les mots se sont chargés d’ambiguïtés interprétables selon les situations et les intentions ». Et, « pour une critique de la francophonie », l’auteur recommande la lecture de : G. Ossito Midiohouan, Du Bon usage de la francophonie, Porto-Novo, éd. cnpms, 1994 ; Jean-Marc Moura, Littératures francophones et théorie postcoloniale, Paris, PUF, 1999, note 2, p. 9.

58.

A ce sujet, consulter l’article de Bernard Mouralis intitulé « La condition de l’écrivain francophone », in Le Magazine Littéraire,Paris, mars 2006, n°  451« Défense et illustration des langues françaises », p. 38-40.

59.

Michel Bernard, « Quand commence le XXe siècle littéraire ? Essai de réponse statistique », in Michèle Touret et Francine Dugast-Portes, 2001, op. cit., pp. 195-209.

60.

Jean-Paul Sartre, 1949, op. cit., p. 244.

61.

Bernard Mouralis, in Najib Zakka (dir.), 1993, op. cit., p. 229-230.

62.

Edouard Glissant, Poétique de la Relation (Poétique III), Paris, Gallimard, 1990, p. 41.

63.

Jean Bernabé, Patrick Chamoiseau et Raphaël Confiant, Eloge de la créolité, Paris, Gallimard, (1989) 1993, p. 46.

64.

Terme apparu sous la plume de Jean Albany dans Vavangue, en 1972 (Paris, Chez l’auteur), puis explicité dans son Supplément au p’tit glossaire : le piment des mots (Paris, Chez l’auteur, 1983 [1974]) : « C’est la recherche de l’identité réunionnaise […]. C’est la prise de conscience que les réunionnais se sentent un peu différents des autres, que l’homme créole a une place spécifique dans l’Univers… » (p. 23). A partir de la fin des années 1970, et sous l’insufflation d’Albany, ce mouvement a été porté à La Réunion par des écrivains tels que Gilbert Aubry et Jean-François Samlong (De l’élégie à la créolie, Réunion, U.D.I.R., 1989). Notons ici qu’avant d’avoir publié son premier roman, Monique Agénor a participé à la réalisation d’une revue éponyme, en y proposant des photographies de paysages de l’île (Créolie. Poésies réunionnaises, Réunion, U.D.I.R., 1984).

65.

Loriane Pédurant, Comparaison de l’expression de la créolité dans les romans de Monique Agénor et de Raphaël Confiant, D.E.A., Jean-Claude Carpanin Marimoutou, Université de La Réunion, 2000.

66.

C’est « précisément dans cette négociation des thèmes, des voix et des discours [entre autres marqués par la présence de glossaires] », souligne Carpanin Marimoutou, que le texte réunionnais semble parvenir à se constituer comme tel… (« L’exote exotique. Entre “récit exotique” et “roman colonial”, le “roman réunionnais” », in Cahier CRLH-CIRAOI (textes réunis par Alain Buisine et Norbert Dodille), n°5, « L’Exotisme », Paris, Didier-Erudition, 1988, p. 261.

67.

Michel Beniamino, « La francophonie littéraire » in Lieven D’Hulst, Jean-Marc Moura (dir.), Les Etudes littéraires francophones : état des lieux, France (Lille), Conseil Scientifique de l'Université Charles-de-Gaulle - Lille 3, 2003, p. 20.

68.

Pour plus de précisions concernant ce sujet, consulter : Jacques Leclerc, L’Aménagement linguistique dans le monde, Québec, TLFQ, Université de Laval, <http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/index.shtml>, (2006).

69.

Henri Grégoire, Rapport sur la nécessité et les moyens d’anéantir les patois et d’universaliser l’usage de la langue française : essai historique et patriotique sur les arbres de la liberté, France (Nîmes), C. Lacour, 1995.

70.

Alphonse de Lamartine, « De la propriété littéraire. Rapport fait à la Chambre des députés par M. de Lamartine », in Jocelyn, Paris, Furne, V. Lecou, Pagnerre, 1855, p. 446.