Ruptures assignifiantes et abstractions

La fièvre

Le maillage discursif se tisse à partir des éléments du monde réel, puise ses sources dans le concret, mais il n’est pas pour autant concret, c’est-à-dire à l’image de ses réalités matérielles et palpables. Il est abstrait, non pas en tant qu’ « épuration » ou « dépouillement » de la représentation (il n’est effectivement pas « coupé de la réalité »389), mais en tant que fragmentation et explosion des possibilités de représentation de l’environnement réel. En conclusion de Mille Plateaux, Gilles Deleuze et Félix Guattari rappellent que :

‘Les machines abstraites opèrent dans les agencements concrets : […] c’est-à-dire par les pointes de décodage et de déterritorialisation. Elles tracent ces pointes ; aussi ouvrent-elles l’agencement territorial sur autre chose, sur des agencements d’un autre type […], et constituent des devenirs. Elles sont donc toujours singulières et imminentes.390

Qu’est-ce qui constitue la singularité et l’imminence des œuvres ? Sur quoi s’y ouvre le nouvel agencement langagier et imaginaire ? En somme, comment se tordent, se brisent, se rompent les lignes de fuite et les accroches au dehors des textes jusqu’à former des « agencements d’un autre type » ? Et de quel(s) type(s) ?

Les quatre auteurs de notre corpus ont tous des attaches à d’anciens mondes régis par ce que Nabile Farès a nommé « la loi d’étouffement vital » (MA, p. 66). Leurs textes mettent tous en scène des subordonnés de l’Histoire, des êtres qui n’ont pas eu droit à la parole : les personnages lodsiens tentent de se libérer d’un joug familial qui les astreint au silence, Parlpa, lui, est muet, Minia s’est vue dépossédée de ses carnets, les coolies ont été mis en quarantaine historique, et les personnages de Farès disent d’eux-mêmes qu’ils sont de « Grand[s] muet[s] » (MA, p. 66). Tout est encombrement, silence imposé par une force oppressante qui dessine le réel selon des besoins politiques et/ou économiques en ignorant la singularité des voix qu’elle recouvre : c’est pour piller les ressources malgaches que s’installent les colons français ; les coolies constituent une main d’œuvre ouvrière mise à la disposition des propriétaires terriens mauriciens ; le mouvement de la révolution populaire algérienne a été récupéré par les hautes instances politiques, etc. La langue, en tant qu’objet organique même, est à chaque fois coupée. A l’image du « filet amarré » de Parlpa, tous ces personnages sont contraints au silence, écrasés sous les lourds plis de leurs histoires respectives, vivant dans l’inconfort de situations pesantes. Mais, ces Grands muets ne veulent pas se résigner : ils parlent tous, par le livre, tentant de faire entendre dans les grondements du monde la singularité et l’imminence de leurs voix.

La littérature est engagement, la littérature est, selon la formule d’Homi K. Bhabha, « cet acte d’écriture du monde »391. Elle permet de rompre les silences, de reconduire ce qui a été éconduit. Comment dès lors produire un discours qui ne soit plus le strict reflet d’un ordre oppressif refusé, rejeté ? Comment retourner cet ordre pour faire entendre ses échos étouffés, en lieu et place de ses grondements assourdissants ? Comment dire, crier, hurler ce qui ne veut pas être entendu ?

Le troisième livre de la trilogie de La Découverte du Nouveau Monde, L’exil et le désarroi, symbolise d’emblée une rupture en proposant de faire entendre au lecteur, avant même qu’il n’ait pu ouvrir le livre, le projet du texte à venir. Sur la jaquette du livre est dessiné un arbre-mots. En lieu et place d’un tronc est écrit : « Oui : je te raconterai son histoire : pour que tes jambes ne tremblent plus ; pour que tes mains ne tremblent plus ». Autour, dans le feuillage de phrases qui reprennent celles du tronc, poussent entre autres mots : « Liberté », « Vie » et « Sens ». Au niveau du sol, se déploie dans la terre, de part et d’autre de l’arbre, la phrase : « Racines des arbres dans les terres ». L’ensemble de ces éléments agencés sous une forme hybride de dessins et de mots inscrit le discours à venir au « cœur de l’arbre ouvert dans l’exil ». Dès lors, le livre qui s’annonce, dans sa globalité, se présente comme une forêt d’arbre-mots, dont chaque ramification, chaque branche, chaque fruit, chaque racine, symbolise des exils. Ils déploient leurs maux dans la multiplicité des voix mémorielles qui seront invoquées. L’arbre dessiné en couverture de L’exil et le désarroi est programmatique : comme il fait rhizome avec le corps du texte, plongeant ses racines dans les histoires à venir (« Racines des arbres dans les terres »), il annonce la manière dont les mots feront rhizome entre eux et feront rhizome avec le monde392 :

‘L’arbre est parcouru de mots, phrases, idées qui expriment plusieurs équivalences entre les volontés de vivre, ou, de mourir, ou, plus simplement se taire : fuir le langage, et, l’amour, dans la rivalité du temps, de l’espace, accomplir le non-sens, ou, lorsque la crise a lieu, dire l’irréductible espoir de maintenir le vrai dans l’exiguïté même de la matière et du champ. (Farès, E&D, p. 28)’

Nabile Farès ne semble pas concevoir le langage comme une forme figée se pliant aux exigences de normes trop strictes. A l’inverse, il préfère réaliser ce qui est désigné là par le « non-sens » : ce qui est mis en oeuvre dans chacun de ses texte, c’est une politique de la désorientation et du désoeuvrement. Politique dans laquelle, comme dans les histoires narrées, le lecteur se trouve confronté aux incompréhensibles mouvements des exils. Le livre tout entier se construit non pas comme un roman, un recueil ou une toute autre forme établie, mais comme un dessin, abstrait, agençant les mots sur les pages comme autant de lignes, de formes, de couleurs, etc. Le langage devient un jeu, et par ce jeu il réfute le cloisonnement et s’ouvre à une multitude de possibilités : si « la crise a lieu », elle est littéraire. Le « vrai » qui se dit, se dévoile et se montre au lecteur « dans l’exiguïté même de la matière et du champ », celle du livre, est celui d’un langage autre, pluriel, qui fait écho aux mouvements des exils narrés. L’exil et le désarroi n’est en fait pas la mise en mots du désarroi consécutif aux exils, ni même sa mise en scène, mais il en est sa mise en espace, en forme et en mouvement, à la manière d’un arbre dont les racines vont puiser, au hasard des sols, leurs nourritures, dont les fruits poussent au hasard des branches, dont les feuillages tremblent selon les mouvements du vent. L’éclatement typographique et la fragmentation narrative qui se lisent dans le corps même du texte, l’inscrivent dans un écosystème littéraire qui fonctionne selon les principes de l’arbre dessiné : le livre « est parcouru de mots, phrases, idées » qui poussent et vivent comme autant de fruits, de feuilles, de branches, de racines, qui peuvent être lu, ou tout simplement vu. Et, dans les bruissements que font ces éléments en se mouvant et se déployant, ce qui s’entend, également, ce sont les voix des Grands muets, de ceux dont la langue avait été coupée : « Ne tremble plus, je te raconterai son histoire », pousse de part et d’autre du cœur de l’arbre.

Cette ramification qui se greffe sur un tremblement mémoriel, l’acte discursif qui doit venir stopper les tremblements d’une histoire fiévreuse, est aussi, tout comme l’arbre-mots de Farès (celui qui annonce la forêt-livre), celui de « La Yamuna » dans La Quarantaine de Le Clézio. Tout ce roman repose sur un silence : celui des coolies bannis depuis plusieurs générations sur une île, au large de – en marge de – Maurice. Les personnages y sont isolés à cause de l’épidémie de fièvre qui sévit, les décimant un à un. Ainsi, dans cet « endroit hors du monde » (p. 162) où tous meurent, tous deviennent des « fossoyeurs » : comme les parias, les européens font brûler des bûchers pour leurs morts (p. 195). Et si les hommes sont malades, s’ils sont fiévreux à en mourir, c’est à cause du sort qui leur est réservé : ils sont mis à l’écart de toutes sociétés, condamnés à devoir errer dans une périphérie perçue comme austère. Cette fièvre qui décime coolies et européens métaphorise par conséquent, d’une manière globale, leur état social393 :

‘Personne ne vient dans le cimetière, il y a quelque chose de surnaturel dans ce chaos de roches et de tombes renversées par les cyclones. Quelque chose qui trouble et fait battre mon cœur, comme si le regard des immigrants abandonnés était encore vivant, tendu vers l’horizon, une longue vibration qui résonne dans le socle de l’île. C’est cette vibration que j’ai entendue, lorsque je me suis couché l’oreille contre la terre, la première nuit que nous avons passé à Palissades. (Le Clézio, LQ, p. 149)’

Ces voix, bien qu’enfermées à jamais dans le cimetière de Plate, ne meurent pas : elles se tendent vers l’horizon, elles vont « à Vrindavan, le pays de la rivière Yamuna »394, elles font couler « la rivière Yamuna » dans les creux du discours, au travers du corps du narrateur. « Il me semble que la vibration est en moi, à l’intérieur de mes viscères », confiera Léon (p. 192). « La Yamuna » n’est pas un plateau narratif comme les autres : il s’entrelace à celui de « La quarantaine », le serpente, remplissant ses interstices pour en faire déborder une indicible mémoire.

Le grondement de la terre perçu par Léon, « comme une plainte de l’au-delà » (p. 148), vient conférer une « sorte de netteté irréelle » (p. 177) à des voix pourtant fantomatiques. Il vient rendre, dans les creux du discours, ce qui a été dépossédé dans les affres de la déportation : le droit à la parole, le droit à la présence historique et langagière. Cette « longue vibration qui résonne dans le socle de l’île » est un « tremblement de la mémoire » (p. 271). Elle est la poussée hors du cimetière de l’île des voix jusque là enfouies dans l’oubli, celles que personne n’écoutaient, ni ne visitent aujourd’hui. Ceux qui n’avaient pas eu droit à la parole, ceux qui avaient été contraints à se taire, « hors du monde », à fuir la répression anglaise (p. 197-205) pour migrer vers Maurice, inaccessible horizon d’attente, se font entendre par le biais d’une « vibration »… vibration qui est le plateau narratif intitulé « La Yamuna », et qui conte le long voyage d’Ananta et de sa mère Girbala, de l’Inde vers Maurice. En ce sens, « La Yamuna » est une trace, telle que l’entend Edouard Glissant :

‘La trace […] est ce par quoi, sur quoi, en quoi le tremblement avance. Elle résiste à la recherche de la transparence (et pouvons-nous dire, à l’analyse ?)395 mais elle approche les liaisons magnétiques […]. Elle parcourt à travers nos accumulations, nos assonances, nos répétitions, nos circularités. La trace ne consent pas aux économies rusées de l’expression, non plus qu’elle n’autorise les répliques littérales de nos réalités, les duplicats sans ouverture ni invention.396

« La Yamuna » est une remontée de la trace indienne, permettant de se porter attentif à l’écoute des tremblements mémoriaux, des diversités étouffées. Mais cette trace n’est effectivement pas une réplique littérale de notre réalité, elle est opaque. Elle se livre dans le texte par une rupture narrative, marquée par des ruptures phoniques et typographiques. Ce n’est effectivement pas la même typographie : « La Yamuna » s’énonce en marge du texte (avec un retrait plus important), intervenant de manière intempestive, serpentant de manière aparallèle dans la narration principale. Ce n’est pas non plus le même personnage qui s’exprime dans le plateau de « La quarantaine » et celui de « La Yamuna » qui le traverse. « La quarantaine » est narrée par l’un des deux Léon, l’ancêtre du XIXe, alors que « La Yamuna » est narrée par l’autre Léon, celui du XXe (qui narre aussi les premiers et les derniers plateaux du roman) :

‘Je pense à Ananta comme à quelqu’un que j’aurais connu, une aïeule dont je porterais la mémoire, et dont l’âme serait encore vivante au fond de moi. Je ne sais d’elle que ce nom, et qu’elle avait été arrachée à la poitrine de sa nourrice assassinée, à Cawnpore, pendant la grande mutinerie des sepoys en 1857. Ce que m’a raconté ma grand-mère Suzanne, quand j’étais enfant, la légende de mon grand-oncle disparu. (Le Clézio, LQ, p. 281)’

Si l’histoire d’Ananta est celle du « grand-oncle disparu », sa « légende », c’est parce que ce personnage, alors reclus sur Plate, avait rencontré et aimé Surya, la fille d’Ananta. Pour le Léon du XXe siècle, remonter la trace des origines indiennes de celle qu’a aimé son ancêtre, c’est aller plus loin dans la compréhension de sa propre histoire. C’est faire rhizome avec le monde, en refusant de se fermer à la seule histoire des européens ayant voyagé sur l’Ava, mais du même coup, c’est faire exister et reconnaître dans sa filiation – en lui – la trace indienne rencontrée deux générations plus tôt. Comment comprendre les raisons qui ont poussé son grand-oncle à demeurer sur Plate, avec Surya, à disparaître de l’histoire familiale, si ce n’est en interrogeant l’histoire de celle avec qui il est entré en relation ? Ce n’est donc pas la même histoire qui lézarde les chroniques de « La quarantaine », car ce n’est ni le même espace, ni le même temps : « La Yamuna » opacifie le discours, le pluralise (dans le plateau « La quarantaine », le lecteur passe de un à deux discours), car elle vient rompre la linéarité et la signifiance du plateau principal, car elle se déroule dans un temps antérieur, entre l’Inde et l’île Maurice, dans un autre monde, un autre paysage référentiel. C’est le déploiement du rhizome par la jonction simultanée de plusieurs humanités, dans des temps et des espaces distincts, celles d’hier et celles d’aujourd’hui, celles de l’Inde et celles de l’Europe, qui errent entre les espaces de leurs parcours. Comme le précise Glissant au sujet de l’opacité : « L’opacité n’est pas l’obscur seulement, l’opacité figure ce qu’un lieu appose à un autre lieu comme liberté de sa relation »397. Puis encore, avait-il écrit quelques années plus tôt dans sa Poétique de la Relation au sujet de l’opacité, inhérente à l’errance :

‘L’errant récuse l’édit universel, généralisant, qui résumait le monde en une évidence transparente, lui prétendant un sens et une finalité présupposés. Il plonge aux opacités de la part du monde à quoi il accède. La généralisation est totalitaire : elle élit du monde un pan d’idées ou de constats qu’elle excepte et qu’elle tâche d’imposer en faisant voyager des modèles.398

La structure même du roman montre qu’il y a refus de l’ « évidence transparente », refus de la « généralisation totalitaire » et des modèles qu’elle fait voyager (ce que nous rappelait encore le recours à un langage herméneutique dans Le Chercheur d’or et Voyage à Rodrigues). Ce qui erre dans La Quarantaine, et non ne voyage, ce sont les voix perdues au milieu des océans, entre les espaces qui auraient dû être habités : l’Inde est perdue à tout jamais, Maurice se refuse. Il y a bien, dans l’expérience de « La Yamuna », apposition de lieux : ce qui s’est passé en Inde, puis sur le bateau, entre l’Inde et l’île Plate, en direction de Maurice, interfère avec ce qui se passe dans le maintenant de la narration. Cette remontée est « un voyage comme le sommeil, comme l’engourdissement qui suit une longue maladie » (p. 318), celle de l’histoire fiévreuse de l’exil, du parcours de l’une à l’autre rive. La crise qui a lieu dans cette expérience d’ « engourdissement » – crise déclenchée par les fièvres métaphoriques donc – opacifie le discours, l’obscurcit. Il y a interruptions répétées de la narration principale pour laisser place à l’écoute des tremblements, pour laisser place à la remontée de la trace originelle. C’est un acte, celui de la reconnaissance pour le personnage énonçant « La Yamuna » de la diversité de ses origines, de l’entrée en lui de voix autres. « Comme on glisse le long d’un rêve, à l’envers » (p. 324), l’œil glisse le long de « La Yamuna », rappelant les démarches tant de Lods, Agénor ou Farès. Chacun des auteurs remonte une trace, que ce soit en invoquant, respectivement, les voix de l’enfance, les voix ancestrales malgaches, ou celles de la mémoire berbère. La fonction de cette opacification du discours, de cette remontée phonique de la trace en se portant attentif à ses tremblements mémoriels, étant de rendre – comme le souligne Homi K. Bhabha en s’appuyant sur l’expérience de littératures sud-africaines – la parole aux « subordonnés », ceux qui vivent dans l’inconfort d’une non-reconnaissance historique et publique399 :

‘Privé et public, passé et présent, le psyché et le social développent une intimité interstitielle qui questionne les divisions binaires selon lesquelles ces sphères d’expérience sociale sont souvent opposées sur le plan spatial. Ces sphères de la vie sont liées par une temporalité « entre-deux » qui prend la mesure de l’installation au foyer tout en produisant une image du monde de l’histoire. C’est le moment de la distance esthétique qui offre au récit un double tranchant, qui comme le sujet métis sud-africain, représente une hybridité, une différence « au sein de », un sujet habitant la frange d’une réalité « entre-deux ». Et l’inscription de cette existence limite habite une temporalité immobile et un environnement étrange[r] qui crée l’ « image » discursive au carrefour de l’histoire et de la littérature, formant un pont entre le foyer et le monde.400

On peut lire cet étrange « entre-deux » dans les expériences de chacun des narrateurs de notre corpus. Dans chacun des cas, prend forme ce « pont entre le foyer et le monde » : narrer l’histoire de son grand-oncle disparu, c’est pour Léon questionner l’histoire de la déportation des coolies ; narrer l’histoire de sa grand-mère malgache pour Minia, c’est questionner l’histoire de la colonisation malgache ; narrer l’histoire de son exil pour Abdenouar, c’est questionner l’histoire de l’étouffement berbère et des invasions successives qui ont conduit le pays à sa perte, etc. Il y a, dans chacun des cas, imbrication des sphères, publique et privée, du « passé historique » et du « présent narratif »401. Ce que Glissant nomme « opacité », Bhabha le nomme « distance esthétique » : il y a « double tranchant » d’histoires qui se croisent et s’entrelacent, se mêlent jusqu’à obscurcir la globalité du discours, le fractionnant, le pluralisant, et témoignant de facto de la multiplicité et de la diversité des traces inscrites dans/par les sujets. Il n’y a dès lors plus opposition frontale entre Occident et Orient, continent du Nord et continents et îles du Sud, mais imbrication complexe de l’ensemble des lieux, tant temporels que spatiaux.

Ecrire les fièvres et les crises historiques, renvoyer les échos des vibrations et des tremblements mémoriaux, c’est lier ensemble, en un même espace, la totalité des fils identitaires ; cet espace est le livre. Mais du même coup, il prend forme dans cet espace mêlé un langage opaque, abstrait et délirant, ouvert à tous les possibles, à tous les modes de contacts.

Notes
389.

Dans son ouvrage questionnant la notion d’abstraction dans les arts picturaux, Georges Roque propose un historique de l’opposition entre les termes « abstrait/concret » qui ont fait polémique au cours de ces derniers siècles ; Georges Roque, 2003, op. cit., p. 120-134.

390.

Gilles Deleuze et Félix Guattari, 1980, op. cit., p. 636-637.

391.

Homi K. Bhabha, 2007, op. cit., p. 46.

392.

Afin de prolonger ce propos concernant le dessin qui figure sur la couverture de L’exil et le désarroi, nous pouvons également renvoyer aux lectures complémentaires de Charles Bonn (op. cit. 1986), de Hédi Abdel-Jaouad (op. cit., 1998), et de Anette Dressel (Ecriture et espace dans l’univers romanesque de Nabile Farès, DNR, Charles Bonn, Université Paris 13, 1989) qui y voient respectivement une problématisation de la parole dans un rapport à l’incandescence du langage et à la thématique du feu ; la « pratique d’un surréalisme tendu vers la mise en œuvre d’un “langage objet” » (p. 87) ; et la condition de l’émergence d’un langage ludique et subversif. Toutes ces lectures, bien que ne s’inscrivant pas dans les mêmes perspectives, s’accordent sur un point : cet arbre fait apparaître le sens des mots dans la marge du discours, dévoilant selon les modalités d’un « dire errant » et d’une « écriture de la marge » pour Bonn, ou d’une « écriture talismanique » pour Abdel-Jaouad, « des vérités que le langage ordinaire ne peut exprimer » (p. 93).

393.

Comment ne pas penser ici aux premières nouvelles de Le Clézio (La Fièvre), et notamment à Beaumont subissant sa rage de dent, ou encore à Roch qui, souffrant d’une forte fièvre, se met à délirer et à errer au ban de la société niçoise (ou peut-être est-ce lui qui rejette cette société plutôt qu’il ne se fait rejeter…).

394.

« Chez nous on ne dit pas mourir. On dit qu’on va à Vrindavan, le pays de la rivière Yamuna », dit Surya, initiant Léon à sa culture (LQ, p. 271). 

395.

Nous soulignons…

396.

Edouard Glissant, 2006, op. cit., p. 188. 

397.

Ibid., p. 187.

398.

Edouard Glissant, 1990, op. cit., p. 33.

399.

Homi K. Bhabha, 2007, op. cit., p. 41.

400.

Ibid., p. 47.

401.

Id., p. 50.