3.5.3.2.Les corrélats phonologiques

Les résultats du test d’évaluation des capacités de lecture nous conduisent à de multiples discussions. Tout d’abord, suite aux analyses statistiques, nous avons observé des effets de prononçabilité et de longueur des pseudo-mots sur les temps de réponse des sujets. Une suite de lettres non prononçable est très rapidement traitée par le groupe HP alors qu’aucune différence entre les groupes n’est observée quand les suites de lettres sont prononçables. Nous suggérons que le groupe BP aurait des difficultés à traiter des suites de lettres qui ne suivent pas les règles phonotactiques de leur langue. Des suites de lettres non prononçables ne suivent pas ces règles d’enchaînement et de combinaison, le groupe BP serait plus perturbé par ces enchaînements ce qui pourrait rendre compte d’un déficit de segmentation en graphèmes nécessaire pour répondre à la tâche. Puis, au niveau descriptif, nous avons observé un déficit du codage de la position des lettres dans le groupe BP. Ce traitement a lieu lors de l’analyse des chaînes de caractères dans l’étape visuelle. De même, un effet de longueur des mots a été observé : plus les mots sont longs, plus les temps de réponse sont longs. Cet effet indique que les non-mots de deux syllabes sont traités plus lentement par le groupe BP. Ce traitement rend compte des transformations des codes graphémiques en codes phonologiques dans l’étape phonologique. Pris ensemble, ces résultats permettent de suggérer que les difficultés du groupe BP pourraient être liées à un mauvais encodage des codes graphémiques et donc une mauvaise représentation des formes graphiques des lettres. Cette représentation graphémique entre en jeu, en lecture, principalement, dans la voie phonologique de reconnaissance des mots, lors de l’étape de conversion des graphèmes en phonèmes. La voie phonologique permet de traiter les mots rares ou les pseudo-mots comme ceux utilisés dans notre expérience de compression temporelle (Modèle de la double voie, (Coltheart, 1978)). Nous suggérons que dans cette voie, la représentation graphémique des participants BP, soit perturbée. Une mauvaise représentation graphémique conduit à des difficultés d’appariement des unités graphémiques avec les unités phonologiques (temps de réponse plus longs). Par conséquent, l’activation du lexique par le biais des codes phonologiques ou directement par les codes graphémiques est moins efficace et la reconnaissance des mots est ainsi altérée. Cette explication pourrait rendre compte des basses performances de reconnaissance auditive des pseudo-mots de notre groupe BP. La compression temporelle affecte les indices acoustiques du signal conduisant à un traitement et un encodage encore plus problématique du signal pour le groupe BP.