4.4.2.Les causes génétiques

La dyslexie est considérée comme un trouble neurologique avec des origines génétiques et elle aurait des corrélats neurobiologiques universels importants (Paulesu et al., 2001). Les chercheurs ont exploré la relation entre les troubles liés à la dyslexie et la variabilité génétique qui représente environ 0.1 % de notre génome. Plusieurs études en génétique ont montré des liens entre les difficultés d’apprentissage des dyslexiques et les chromosomes 2, 3, 6, 15, 18 et X (Cardon et al., 1994 ; Fisher et al., 2002 ; Fisher et al., 1999 ; Gayan et al., 1999 ; Schulte-Körne et al., 1998 ; Schumacher, Hoffmann, Schmäl, Schulte-Körne, & Nöthen, 2007). Même si la probabilité qu’il existe un seul et unique gène de la dyslexie paraît faible, l’étude de Taipale et ses collaborateurs (2003) a révélé l’existence d’un gène, le DYX1C1, qui serait un bon candidat à l’origine de la dyslexie développementale. La relation entre la dyslexie et le chromosome 15 a été suggérée en premier, en 1983, par Smith et ses collaborateurs (Smith, Kimberling, Pennington, & Lubs, 1983). Puis, le lien particulier avec le locus DYX1 sur le chromosome 15q21 a été confirmé (Morris et al., 2000 ; Schulte-Körne et al., 1998). Ce gène DYX1C1 est impliqué dans le développement et la maturation du cerveau. Il se retrouve dans les cellules neuronales et gliales du néocortex et joue un rôle dans la migration neuronale (Wang et al., 2006). La migration neuronale lors du développement embryonnaire du néocortex serait perturbée par le dysfonctionnement de ce gène (translocation au niveau du gène), ce qui donnerait lieu à la désorganisation neuronale observée au niveau cérébral chez certains dyslexiques (Rosen et al., 2007). Néanmoins, ce gène découvert chez une population finlandaise, ne serait pas associé à la dyslexie dans d’autres populations : américaine, anglaise, italienne et canadienne (Marino et al., 2005 ; Meng, Hager et al., 2005 ; Scerri et al., 2004 ; Wigg et al., 2004). Par conséquent, l’absence de réplication des résultats de Taipale et al. (2003) semble indiquer que ce gène ne jouerait pas un rôle significatif dans le développement de la dyslexie dans des populations non finnoises. Selon Schumacher et al. (2007), le rôle de deux autres gènes dans la dyslexie paraît plus convainquant : DCDC2 et KIAA0319 sur le chromosome 6 (pour une revue voir Fisher & Francks, 2006). Une inhibition de ces deux gènes aurait en effet pour conséquence de perturber la migration neuronale corticale et l’activité des régions cérébrales de l’hémisphère gauche, deux caractéristiques physiopathologiques de la dyslexie (Meng, Smith et al., 2005 ; Paracchini et al., 2006). Cependant, il est difficile d’établir des liens solides de cause à effet avec les troubles d’apprentissage de la lecture. De même, le gène ROBO1 sur le chromosome 3 (Hannula-Jouppi et al., 2005 ; Nopola-Hemmi et al., 2001) jouant un rôle dans la migration neuronale serait en lien avec les difficultés de lecture chez l’Homme. Bien que des gènes aient été identifiés comme ayant un lien avec la dyslexie développementale, autant par leur rôle dans la migration neuronale que par leur situation corticale au niveau des aires du langage, des explications supplémentaires restent à apporter. Les recherches sur les origines génétiques de la dyslexie sont encore incomplètes, de nouvelles études doivent être entreprises afin de clarifier les relations entre les arrangements génétiques observés et les mécanismes neuronaux mis en cause dans les difficultés d’apprentissage de la lecture.

Dans la partie suivante, nous présentons les anomalies anatomo-fonctionnelles de la dyslexie développementale, en commençant par les études pionnières post-mortem jusqu’aux techniques d’imagerie cérébrale les plus récentes.