3.2. La crainte de la dépendance : la fuite du lien

A priori, Michel ne demande rien et semble se contenter de sa situation. Bien que très réduite, la sphère de ses relations semble le satisfaire. Ce qui interpelle c'est son inquiétude face à la dépendance. Pourquoi ce besoin de réduire tout lien qui le lierait à autrui ? Pour Michel que signifie «devoir» quelque chose à quelqu'un ?

Nous ne possédons que peu d'éléments sur sa vie, ce qui est fréquent chez les personnes que nous rencontrons. Cependant ses paroles indiquent qu’il considère la liberté comme une absence de lien. D'ailleurs, être lié par une dette, se faire «prendre» dans un lien lui apparaît comme une menace. Nous pouvons entrevoir dans ce refus de la dette, un refus d'avoir été «fait» par autrui. Reconnaître le besoin, le manque, la dépendance signifie «je ne me suis pas fait tout seul». Lorsque Michel annule la dette qu’il pourrait contracter (envers autrui, envers lui), il se dispense de la relation et du lien. Il évacue également l'idée qu'il est issu d'une filiation, de parents ou de géniteurs. «N’avoir aucune charge» véhicule son sentiment de se situer en dehors de la loi, du don et de l'échange. Les expressions « partir les mains vides » ou « ne rien vouloir porter » pourraient imager son choix. «Je veux vivre comme si personne ne comptait pour moi et vice versa», nous dit-il en quelque sorte. Ce qui signifie également vivre en retrait de la société, ne rien payer, rejeter la plupart des institutions et des usages sociaux.