5.2. Aménagement d’un cadre : un appui sur le mythe comme théorie du soin

Afin de transformer « ça » (le dépôt, l’obscène, le trop intime) je le rends public. Ainsi, traduit dans un code qui est partageable, une transformation s’opère. Ici, c’est le code d’une communauté : celle de l’université et celle de la recherche. Le mythe est également une forme qui rend possible, par le biais du jeu de l’imaginaire, de partager, de rendre public et de symboliser son expérience propre en lien avec les sujets de l’étude.

Au titre de la question de distance qui est problématique avec ces sujets, la transformation et la métabolisation de ces expériences ne sont pas uniquement une mise à distance de l’expérience. Il s’agit également de l’appropriation de l’expérience par le clinicien. C’est dire que la capacité réceptive de l’objet, que le clinicien met en œuvre en direction des sujets de l’étude, il doit lui-même l’organiser pour que ses propres expériences subissent une « sédimentation » avant de pouvoir se les approprier. J’ai donc été amenée à laisser filtrer, à trier, à analyser, à décider, à choisir ce qui m’appartient ou non. Peu à peu s’accomplit un travail de « filtrage » qui consiste à retenir ou à écarter ce qu’il est possible de faire figurer dans mon cadre interne, ce travail progressif contribue à ce qui fait mon cadre.

Les principales idées fortes de ma clinique concernent l’approche, la rencontre et le cadre de l’accompagnement de ces sujets dont les problèmes principaux sont:

A partir de cette clinique, le mythe aide à comprendre ce à quoi on est confronté. Face à des éléments aussi dérangeants, on est contraint de passer par un rapport qui fait appel à une phase mythico-poétique (R. Kaës). En effet, le mythe fournit un mécanisme de dégagement grâce à sa dimension « comme si » qui permet de s’appuyer sur des personnages puisés dans la culture ambiante.

Les rapports d’hostilité et d’agressivité qui caractérisent l’histoire et les relations de ces sujets, et occupent l’avant-scène immédiate, peuvent, par le biais du mythe, être traités autrement. Leur investissement est alors déplacé sur des objets qui subissent et transforment l’excitation et le rapport à l’auto-conservation dont il est question. Les éléments obscènes et dérangeants de cette clinique font resurgir la nécessité du recours à des personnages ainsi qu’à des éléments concrets et des structures frontalières qui servent de délimitation. Le mythe joue ce rôle de contenant. Les mythes subissent des réinterprétations selon l’époque, les changements de mentalités et les besoins de déplacement psychiques de ceux qui y font appel.