Chapitre I : les causes internes de la crise de l’économie algérienne

Introduction

L’analyse de l’économie algérienne relative à la période entre les deux transitions (transition au socialisme puis transition au libéralisme) a fait l’objet de nombreux écrits. Aussi, notre but n’est pas d’en étendre la liste, mais de reprendre l’analyse sous l’angle qui répond le mieux au besoin de notre étude.

Au lendemain de l’indépendance, l’économie Algérienne était marquée par une désarticulation, une extraversion et de nombreux déséquilibres. La désarticulation apparaît à travers la faiblesse des liens existant, d’une part, entre les secteurs de l’agriculture et de l’industrie et à l’intérieur de chacun des deux secteurs, d’autre part. En effet, l’industrie n’utilisait que 25% des produits de l’agriculture locale et ne lui offrait que 8% de sa valeur.

Ces chiffres prouvent également le niveau élevé de l’extraversion de l’économie algérienne avec 80% des échanges commerciaux s’effectuant avec la France. Cette extraversion a été aggravée par la sortie des capitaux provoquée par le départ massif des colons, ce qui explique le déficit quasi chronique de la balance des paiements durant cette période. Les déséquilibres caractérisaient aussi l’économie au double plan : d’abord régional entre zones rurales–zones urbaines, puis sectoriel entre les différents secteurs d’activité économique : secteur primaire, secteur secondaire, secteur tertiaire.

Au plan politique, la fragilité du pouvoir en place, s’appuyant sur des alliances de classes hétéroclites, a eu un impact négatif sur la réorganisation de l’Etat aux plans économique et social, se manifestant à travers des ambiguïtés et des tergiversations quant à la voie de développement à emprunter  pour sortir l’économie de la crise. Ce constat a été mis en évidence par A. Benachenhou en écrivant : « au lendemain de l’indépendance, pendant plus de trois années, l’équilibre des forces sociales est tel qu’aucune d’entre elles ne parvint à imprimer au développement économique en Algérie une ligne conforme à ses propres intérêts. » (A.Benachenhou, 1980, page 12).

Ce n’est qu’après le coup d’Etat de juin 1965, que le nouveau pouvoir va prendre en charge la gestion de l’économie nationale avec la mise en place d’un secteur public élargi à tous les domaines de l’activité économique, écartant ainsi de fait la voie capitaliste dedéveloppement. Le choix de la voie socialiste, à partir de la décennie soixante dix, s’inscrit d’après le discours officiel, dans une logique de construction d’un Etat indépendant politiquement et économiquement, consacrant ainsi la rupture avec la division internationale du travail et le capital international. Cette option s’est traduite à travers la conception et la mise en œuvre de la stratégie de développement. De même que sont intimement liés à cette conception et à cette mise en œuvre les dysfonctionnements qui en découlent.

L’objet de ce chapitre est de montrer dans quelle mesure la stratégie de développement des années soixante dix, telle qu’elle a été conçue et mise en œuvre, constitue la cause principale de l’avènement de la crise économique et sociale en Algérie.