Section 1 : les limites de la stratégie de développement des années 70 : l’ambiguïté des textes législatifs.

Les premiers textes officiels relatifs aux fondements doctrinaux du choix de l’Algérie pour une stratégie socialiste de développement, sont consacrés dans la charte nationale de 1976 (adoptée par référendum du 27 juin 1976) et la constitution adoptée la même année. Certains points comme la nationalisation, l’industrialisation et la réforme de l’agriculture ont, toutefois, été évoquésdans la charte d’Alger d’avril 1964 et la charte de Tripoli de juin 1962.

L’option en faveur du socialisme engage l’Algérie à intérioriser les principes fondamentaux régissant ce mode de production. Ces principes ont fait l’objet de nombreux travaux et débats controversés entre spécialistes des deux courants de pensée : socialistes et libéraux. Il n’est pas nécessaire de revenir sur ces débats. Par contre, il apparaît essentiel de présenter ces principes dans la mesure où ils ont présidé à l’élaboration de cette stratégie.

Auparavant, il convient de rappeler que le socialisme algérien est un socialisme hybride aux fondations fragiles qui, tout en s’inspirant du socialisme soviétique comme voie de développement économique, rejette l’idéologie marxiste-Léniniste considérée comme contraire aux principes de l’islam et de l’arabisme M.Ecrement (1986).

On reprendra à W. Andreff ce qu’il appelle les « critères opérationnels » pour définir les économies socialistes : « Il est donc plus opérationnel d’utiliser des critères d’une moindre esthétique conceptuelle et de moindre précision théorique, mais plus opérationnels pour définir l’espace dénommé ‘économies socialistes’  et pris comme objet de ce livre ». (W. Andreff, 1993, p.15). Ces critères sont :

  • La propriété étatique de la plupart des entreprises industrielles et des banques ;
  • La collectivisation de l’agriculture, intégrée en majorité à des fermes d’Etat et à des coopératives ;
  • La planification centralisée et directive de l’activité économique ;
  • Une stratégie de développement basée sur l’industrialisation rapide, avec une priorité donnée aux industries lourdes ;
  • La volonté autarcique de réduire le commerce extérieur avec les marchés internationaux capitalistes ;
  • La restriction ou l’interdiction des investissements directs étrangers ;
  • Un parti unique au pouvoir.

La majorité de ces critères est d’ordre économique, pour le reste ils relèvent du politique. Pour les besoins de notre étude, nous insisterons sur les premiers bien que les derniers aient joué un rôle souvent plus important. A cause des contradictions et des ambiguïtés que renferment les textes de loi qui les traduisent, ces critères sont à l’origine des nombreux dysfonctionnements de l’économie nationale.