1. Le rôle, l’octroi des ressources et la conditionnalité du FMI

1.1 Le rôle du FMI

La lecture de l’article premier des statuts du FMI permet de cerner les attributs du fonds dont les principaux sont :

  • De promouvoir la coopération monétaire internationale
  • De favoriser la stabilité des changes et des prix afin d’éviter les dépréciations concurrentielles des changes.
  • De permettre le développement du commerce international en vérifiant que le niveau de réserves de changes est suffisant. Ceci, doit permettre d’accroître le niveau de l’emploi et du revenu réel des pays membres.
  • D’aider les pays membres en proie à des déséquilibres de la balance des paiements, en mettant temporairement à leur disposition les ressources du Fonds moyennant certaines garanties.

Ces fonctions ont connu plusieurs évolutions dues au nombre de plus en plus grand des interventions du Fonds, d’une part, et au changement du contexte international d’autre part. La multiplication des infractions aux règles du système de Bretton woods pour ne citer que l’arrêt de la convertibilité en 1971 et le flottement des taux de change des changes en 1973, amena le FMI à procéder aux premiers amendements dont celui de septembre 1967 portant sur la création d’une unité de compte international : le droit de tirage spécial (DTS) et celui d’avril 1976 relatif à l’abandon du système des parités fixes.

Mais c’est surtout à partir des années quatre vingt, avec le tarissement des liquidités internationales sur les marchés financiers que le Fonds va jouer le rôle d’intermédiaire entre ces derniers et les pays endettés afin de désamorcer la crise d’endettement dû aux problèmes de manque de liquidité d’une part et d’insolvabilité d’autre part.

Face à l’insolvabilité des pays endettés, le Fonds verra son rôle se renforcer et ses interventions se multiplier à la faveur du plan Baker. Ce plan qui porte le nom de son concepteur (secrétaire d’Etat américain au trésor), prévoyait l’octroi de crédits supplémentaires et de nouveaux tirages en direction de ces pays afin de leur permettre d’assainir leurs comptes extérieurs.

En contrepartie, les pays devaient appliquer des politiques économiques appelant à plus d’ouverture et à des taux de change flexibles. Ces politiques qui prônent la nouvelle idéologie du Fonds et synthétisées dans ce que J.Williamson appelle le « Consensus de Washington », portent le nom de facilités d’ajustement structurel (FAS) et facilité d’ajustement structurel renforcé (FASR), dans le jargon du Fonds.

Il s’agit de mesures d’assouplissement dans le traitement de la dette, devant permettre aux pays les plus endettés de rééchelonner le remboursement de leur dette. La mise en œuvre de ces mesures est rendue possible grâce à l’organisation des créanciers réunis au sein du Club de Paris pour les créanciers publics et au sein du club de Londres pour les créanciers privés. Le Fonds va alors jouer un rôle de médiateur entre les emprunteurs et les deux Clubs. Les créances détenues sur des pays endettés et dont le Fonds se porte garant, seront ainsi rééchelonnées mais pas celles du Fonds qui demeurent non rééchelonnables et non effaçables car  la protection des ressources du Fonds est une garantie pour la préservation de leurs propres engagements (M. Aglietta et S. Moatti 2000).

A la fin des années quatre vingt, ce plan a montré ses limites se traduisant par l’échec des politiques économiques mises en œuvre dans de nombreux pays qui n’arrivent plus à rompre avec le cercle de l’endettement, ce qui a fait naître un nouveau concept « la dette perpétuelle ». Par ailleurs, le Fonds Monétaire exhorte les banques à renoncer à une partie de leurs créances vis-à-vis des pays les plus pauvres.

Toutefois, face à l’évolution du marché financier, avec notamment la montée des flux de capitaux privés et la titrisation , on assiste à une nouvelle génération de crises que le Fonds Monétaire est de nouveau appelé à dénouer, en assumant un nouveau rôle et en recourant à de nouveaux instruments.

C’est dans cette optique, qu’un nouveau plan a été conçu par le nouveau secrétaire d’Etat américain N. BRADY dont les résultats seront plus fructueux que ceux du plan précédent. A la faveur de ce plan, les banques peuvent échanger leurs créances contre des titres de moindre valeur faciale ou assortis de taux d’intérêts inférieurs aux taux du marché, allonger les échéances de la dette ou enfin accorder de nouveaux crédits.

En contrepartie, les pays doivent se conformer aux accords de confirmation préalablement négociés avec le Fonds. Ces accords étaient, néanmoins, assortis de conditionnalités plus affinées et plus strictes. Les programmes de réduction de la demande sont sans grande efficacité s’ils ne sont pas accompagnés d’une réforme structurelle combinés à un ensemble d’opérations de désendettement. Grâce à ce plan les banques privées se sont désengagées en transformant leurs créances en titres « collatéralisés » qui pouvaient être soit achetés par des investisseurs institutionnels soit par des firmes multinationales pour financer des investissements directs (échanges de dettes contre des actions).

Pendant les années quatre vingt dix, avec l’éclatement du bloc socialiste, le Fonds va orienter son soutien aux pays de l’Europe de l’Est et de la Russie. Son intervention au sein de ces pays sera alors justifiée par le poids de la dette qui pesait lourdement sur leurs équilibres extérieurs. Des programmes d’ajustement fondés sur l’ouverture extérieure et une réduction de l’intervention de l’Etat (Consensus version deuxième génération) vont leur être imposés afin de faciliter leur transition à l’économie de marché.

Cependant, les crises financières induites par la globalisation financière vont, encore une fois, remettre en cause la pertinence de certaines recommandations préconisées par ces programmes telle que l’ouverture financière. Les responsables du fonds se rendent finalement compte qu’aucun programme ne peut être mené à bien s’il n’est pas accompagné de réformes portant sur le développement des institutions publiques et privées indispensables au bon fonctionnement d’une économie de marché comme le renforcement du cadre légal de l’activité économique, le renforcement de l’Etat et des structures de gouvernance de l’économie (M.Aglietta et S. Moatti 2000).