Durant les années cinquante, un cadre d’analyse théorique a été développé par un groupe d’experts du Fond Monétaire International, plus communément appelé : l’approche monétaire de la balance des paiements ou modèle de J. J Polak (1957). Ce modèle est spécialement conçu pour les petites économies ouvertes et est toujours utilisé comme référentiel théorique dans l’élaboration des programmes d’ajustement structurel à cause de sa simplicité.
Le modèle de Polak est conçu pour le court terme et vise avant tout le rétablissement de l’équilibre de la balance des paiements. Il s’inspire de la théorie quantitative de la monnaie qui stipule que la masse monétaire n’a pas d’influence sur la production et l’emploi mais qu’en revanche le niveau général des prix est fonction de la quantité de monnaie mise en circulation.
Cette Théorie trouve ses origines dans les travaux de J. Bodin (XVIe siècle), de D. Hume et des classiques du XIXe siècle, D.Ricardo, J.B Say et L.Walras. Au début du XXe, I. Fisher donna une formulation mathématique à la théorie quantitative de la monnaie. Considérée comme un prolongement de ces travaux, l’approche monétaire de la balance des paiements a été développée par Milton Friedman dans Essai d’économie positive (1953) et Inflation et systèmes monétaires (1968) puis par Dornbusch (1973, 1980), Frenkel et Johnson (1976) et Khan et Knight (1981).
Dans le cadre d’une petite économie ouverte, le modèle de Polak51 pose comme principales hypothèses :
Dans cette approche, on attribue l'origine des déséquilibres de la balance des paiements à l'excès de création monétaire. Le modèle, qui permet de calculer le montant de crédit compatible avec un objectif fixé de niveau des réserves extérieures, comprend 5 équations.
La demande de monnaie est stable et proportionnelle au revenu, ce qui s'écrit :
M
d
= kY
t
(1)
M d :La demande de monnaie
k : L'inverse de la vitesse de circulation de la monnaiek = 1/v et 0 < k<1
Y t :Le revenu national ;
L'offre de monnaie (Mo) dépend de la contrepartie interne (C) et externe (R) :
Mo = C + R(2)
C : Le crédit intérieur,
R
: Les avoirs extérieures ;
Sur le marché de la monnaie, l'offre est égale à la demande de monnaie, soit :
M
d
= Mo(3)
L’égalité (3) nous permet d’écrire :
M d = Mo = C + R ;
En termes de variation l’égalité précédente s’écrit :
Mo t = ΔC t +ΔR t + Mo t-1 (4)
Cette équation stipule que la masse monétaire à l’instant t est égale aux variations des avoirs extérieurs et du crédit intérieur plus la masse monétaire de la période précédente.
Les importations sont fonction du revenu :
Mt = m/Yt 0 < m <1 (5)
Le solde de la balance des paiements (les avoirs extérieurs) est égal à la somme des soldes de la balance commerciale et des capitaux :
ΔRt= Xt – Mt+ Kt
En combinant les équations (4) et (5) nous obtenons :
Mot= ΔCt + Xt – Mt+ Kt + Mot-1
En supposant que les trois variables exogènes ont un même coefficient, on peut écrire :
Vt =Xt + Kt+ ΔCt
Le modèle pour les trois variables endogènes est le suivant :
Mt = m/Yt0 < m <1(1’)
Y t = (1/k) Mot0 < k<1(2’)
Mot = Vt - Mt + Mot-1(3’)
Toute variation de l’une des composantes des variables exogènes entraîne un effet en chaîne sur les importations Mt par l’intermédiaire de la variation de la masse monétaire et du revenu national.
Mais la variation de Mt entraîne à son tour une réaction inverse sur la masse monétaire et le revenu, donnant naissance à une seconde vague d’effets et ainsi de suite.
Afin de mieux rendre compte de ce processus, nous allons écrire chaque variable endogène en fonction des variables exogènes et des variables endogènes décalées.
En substituant l’équation (2’)dans (1’) puis en remplaçant Mt par sa valeur dans (3’) nous obtenons une solution pour Mot :
Mot = V t- - (m/k) Mot + Mot-1
En l’arrangeant l’écriture précédente peut s’écrire de la façon suivante :
Mot = [k/(k+m)] Vt + [ k/(k+m)] Mot-1où
Mot-1 = [k/(k+m)] V t-1 + [ k/(k+m)] Mot-2
En remplaçant Mot-1 par sa valeur dans (3)’nous obtenons une équation en différence et une solution pour chacune des variables endogènes précédentes :
Mot = [k/ (k+m)] Vt+ [k/ (k+m)] 2 V t-1 + [k/(k+m)] 3V t-2+ … (3)’’
Yt= [1/(k+m)] Vt+ [k/(k+m)] 2V t-1 + [k 2/ (k+m) 3 ] V t-2+ …(2)’’
Mt = [m/(k+m)] Vt+ [km/(k+m)] 2V t-1 + [k 2/(k+m) 3 ] V t-2+ …(1)’’
La forme de ces variables est une suite géométrique de raison (k/k+m). Si la valeur de ce coefficient est inférieure à 1 alors nous aurons des suites géométriques avec des valeurs finies.
Le modèle formé par les équations (1)’’, (2)’’ et (3)’’ nous permet ainsi de mesurer l’impact à l’infini des variables exogènes retardées V t sur les variables endogènes. C’est donc un modèle dynamique et stable puisque la valeur de [k/(k+m] <1.
Dans cette approche, le rétablissement de l'équilibre de la balance des paiements passe par la réduction du crédit intérieur. Il est alors préconisé une réduction du financement monétaire de l'Etat et du crédit à l'économie. Une autre approche qui emprunte au Keynésianisme ses instruments d’analyse, est également utilisée par le Fonds en complément de celle développée par Polak. Il s’agit de l’approche de l’absorption développée par S.Alexander en 1952.
- J. J Polak : “Monetary analysis of income formation and payments problems” , 1957, P.150
- Dans une publication parue en 1971, J. J Polak et V. Argy présentent séparément les deux versions du modèle,
pour les pays développés et pour les pays en développement.