2.1 Les origines de la création monétaire.

L’analyse de l’offre de monnaie est à rapprocher de sa contrepartie qui comprend les créances sur l’extérieur (création monétaire d’origine externe) et le crédit intérieur (création monétaire d’origine intérieure). Le graphe suivant montre l’évolution sur la période 1975-1992 de la structure de la contrepartie de la masse monétaire ;

Graphe n°12 : Evolution des composantes de la contrepartie de la masse monétaire de 1975 à 1992 (en croissance annuelles)

Source : données de la Banque d’Algérie

La lecture de ce graphe montre que ces agrégats monétaires ont suivi des trajectoires divergentes durant toute la période. En effet, le rythme de progression de ces indicateurs a connu un premier fléchissement en 1986 suite à la chute des recettes en devises et un second repli en 1989 induit essentiellement par la baisse du niveau de réserves de changes.

L’analyse en termes de contribution à la création monétaire, montre que durant la décennie soixante dix et notamment après le premier boom pétrolier, la part des avoirs extérieurs dans la création monétaire était relativement importante. A partir de la décennie quatre-vingt et plus particulièrement, à partir de 1986, la baisse des recettes en devises se traduira par une destruction monétaire. Ainsi, bien que les avoirs extérieurs ne constituent qu’une partie de la contrepartie de la masse monétaire, leur impact sur l’offre de monnaie est assez important, d’autant plus qu’ils sont sujets à des fluctuations imprévisibles et incontrôlables.

Les crédits alloués à l’Etat et à l’économie ont évolué à un rythme divergent. Jusqu’en 1989, le taux de croissance du crédit à l’Etat était plus important, mais au-delà la tendance s’est inversée en faveur du crédit à l’économie. Cette situation traduit les effets de la politique monétaire marquée par le désengagement de l’Etat dans le financement de l’économie et la redynamisation de l’activité des banques commerciales comme le préconise la loi sur a monnaie et le crédit. Par rapport à la période précédente, ce sont donc les crédits à l’économie qui ont constitué la principale source de création monétaire au cours de cette période.

Tableau n°32 : Evolution du crédit des banques commerciales (Unité : millions de dinars.)

Source : données de la Banque d’Algérie

Dans le cadre de la mise en œuvre de la politique de limitation du crédit, les autorités monétaires ont eu recours principalement à l’action directe et accessoirement à l’action indirecte en agissant sur les taux d’intérêt.

L’action directe s’est traduite par un plafonnement des crédits bancaires accordés aux 23 grandes entreprises publiques les plus déstructurées financièrement, par l’instauration d’un sous plafond de réescompte des crédits accordés à ces entreprises, par le plafonnement du taux de réescompte appliqué aux banques commerciales et enfin par la limitation des interventions de la banque centrale sur le marché monétaire. Toutefois, en 1992, la Banque d’Algérie a procédé à l’abolition du plafonnement des opérations de crédit des banques commerciales.

L’analyse de l’évolution des taux de réescompte permet de constater qu’après une longue période de stabilité marquée par une politique monétaire qui ne se préoccupait pas du coût de l’argent, celui-ci a connu une première augmentation significative suite à la promulgation de loi bancaire de 1986 en passant de 2,75% en 1987 à 5 % en 1988, puis une seconde augmentation à la faveur de la promulgation de la loi sur la monnaie et le crédit en passant de 7% en 1989 à 10,5 % en 1990 pour se stabiliser au taux de 11,5% après.

Graphe n°13 : Evolution du taux de réescompte

Source : données de la Banque d’Algérie

L’action indirecte s’est opérée à travers la libéralisation des taux d’intérêt pratiqués par les banques commerciales. Cette libéralisation reste toutefois limitée puisque les taux débiteurs ont été plafonnés à 20%. Cette limitation a eu un impact sur les taux créditeurs et par voie de conséquence sur les taux d’intérêt réels qui demeurèrent négatifs durant cette période se traduisant par une faible mobilisation des ressources.

Par ailleurs, l’étroitesse du marché monétaire a induit de faibles taux de refinancement des banques commerciales auprès de ce marché, alors que le refinancement auprès de la banque d’Algérie demeure très important, comme le montre les chiffres suivants relatifs aux sources de refinancement des banques commerciales :

Tableau n°33 : Sources de refinancement des banques commerciales (Unité : millions de dinars)

Source : données de la Banque d’Algérie

Cette structure de refinancement traduit ainsi la persistance du manque d’efficacité du système financier. Par ailleurs, durant cette période la Banque d’Algérie continue d’apporter son concours à l’Etat encore plus que par le passé et ce en dépit des limites imposées au découvert du trésor auprès de la banque centrale par la loi sur la monnaie et le crédit.

Tableau n°34 : Concours de la banque centrale au trésor public (Unité : millions de dinars)

Source : données de la Banque d’Algérie.

Ces données montrent le rôle important que continue de jouer la banque centrale dans le refinancement systématique de l’Etat. Cette situation engendre un double effets ; celui d’étouffer l’investissement privé et donc la croissance par impossibilité de se trouver des financements nécessaires et celui né de la nécessité de consacrer des sommes de plus en plus importantes au versement des intérêts de la dette publique ( J.M Daniel 1995).