Quelques travaux de recherche sur les représentations sémiotiques

De nombreux cadres théoriques ont été proposés afin de comprendre ce que les signes évoquent ou représentent. Pierce a étudié la logique et l’interprétation adaptative des phénomènes observés dans l’environnement (Duval, 2006). Il a ainsi proposé une classification des signes, suivant qu’il y avait ressemblance (dessin d’une voiture) ou non (le mot voiture) entre le signe et l’objet représenté, ou qu’il y avait une relation de causalité comme la fumée, signe qu’il y a un feu. Saussure, lui, a exploré une approche linguistique de la sémiotique, étudiant la langue naturelle, système sémiotique bien particulier. Jakobson a étudié les phénomènes de codage et de transmission de l’information. Plus largement, de Platon à Piaget, en passant par Saint Augustin, nombreux sont ceux qui ont réfléchi sur les signes. Plus récemment, Duval (1995 ; 2006) a montré l’importance de la relation entre signe et connaissance, en particulier dans le cas des mathématiques. Reprenant l’ensemble des cadres théoriques de la sémiotique, il a constaté – et il avoue que cela peut paraître provocant (ibid. p.70) – qu’aucun ne pouvait rendre compte d’une approche cognitive des signes mathématiques. Réutilisant une telle approche, mais dans le cas de la chimie, Khanfour-Armalé et le Maréchal (soumis) font une analyse cognitive des nombreuses représentations utilisées dans la pratique et l’enseignement de cette discipline, en particulier les représentations liées aux substances.

La chimie est souvent décrite comme une articulation de trois types de connaissances, macroscopiques, microscopiques et symboliques (Jonhstone, 1993). La plupart des enseignants semblent surutiliser le niveau symbolique dans leur cours au détriment des autres types de connaissances, et une grande majorité d’élèves est capable de résoudre les problèmes mettant en jeu ce niveau sans pour autant atteindre une compréhension conceptuelle suffisante (Gabel, 1993). Par exemple, la manipulation des équations chimiques peut être facilement traitée avec l’outil mathématique sans que les opérations effectuées prennent un sens chimique (Krajcik, 1991). Les nombreux travaux qui étudient l’utilisation de représentations en chimie ne se recommandent pas d’un cadre d’analyse bien élaboré. Pourtant, l’utilisation des représentations semble importante pour favoriser la visualisation des phénomènes microscopiques et ainsi aider les élèves à résoudre les problèmes (Turner, 1990). Kozma et Russell (1997) ont cherché à comprendre l’encodage visuel des représentations en chimie à partir de tâches de tri et de transformations de représentations classées en graphes, animations et vidéos.

Les recherches cognitivistes ont donné naissance à de nombreuses études sur le rôle des représentations figuratives dans les processus d'apprentissage, tant en situation de laboratoire, en utilisant les TICE (El Bilani, 2007), les films (2005) qu'en milieu scolaire (Peraya, 2005). Beaufils (2000) propose la séparation et la mise au même niveau d'un monde des signes et de la réalité, et il place un "monde des idées" qui constitue la base des activités cognitives de l'apprenant, l'espace de "l'alchimie de la cognition".

Les exemples de systèmes sémiotiques habituellement cités sont les langues naturelles et symboliques, les graphes, les figures géométriques, etc. L’importance de l’influence des graphes pour la représentation de mesure sur l’apprentissage a été montrée, par exemple dans la traduction des résultats des titrages acides-bases (Le Maréchal & Naïja, 2008). Les tableaux sont également très utilisés dans l’enseignement surtout depuis que la présentation sous forme de tableau d’avancement a été introduite dans l’enseignement en France (Le Maréchal et al. 2004). Les systèmes sémiotiques constituent les degrés de liberté dont un sujet peut disposer pour s’objectiver à lui-même une idée encore confuse et pouvoir la communiquer. Cette facilité permet d’enseigner un concept aussi délicat que l’énergie en chimie par des représentations élaborées spécialement pour l’occasion (Le Maréchal & El Bilani, 2008). Étant donné la place qu'il occupe dans les textes scientifiques, dans la littérature de vulgarisation et en didactique des sciences (biologie, physique et chimie), les représentations sémiotiques occupent une partie de ce chapitre de la thèse.