Le paradigme d’amorçage à court terme.

Pour réaliser notre objectif, nous avons utilisé un paradigme d’amorçage à court terme. Ce paradigme présente l’avantage de permettre la manipulation du temps de présentation d’un stimulus ou, plus exactement, du délai entre l’apparition d’une amorce et l’apparition d’une cible à traiter (Stimulus Onset Asynchrony, SOA).

Selon nous, ce protocole expérimental permettrait de dissocier les deux principales étapes qui nous intéressent : les étapes d’activation et d’intégration sous-jacentes à l’émergence d’une connaissance en lien avec un stimulus perçu.

Nous supposons en effet que si l’on présente une image amorce d’un objet à un individu, l’image va activer chez ce sujet les divers composants relatifs à l’objet, des composants visuels bien entendu, mais aussi d’autres composants non perceptuellement présents, comme les composants moteurs ou auditifs, donc purement mnésiques. Mais cela ne signifie pas que les composants visuels activés ne soient pas eux-mêmes des composants mnésiques. Nous avons vu que les zones sensorielles sont également des zones mnésiques.

Ce qui est intéressant, c’est que selon l’intervalle (SOA) entre l’image amorce et l’image cible, les composants activés par l’amorce auront ou non le temps de s’associer les uns aux autres. Afin de distinguer les étapes qui nous préoccupent, nous supposons que l’effet d’amorçage sur un objet cible sera différent selon l’état « d’aboutissement » de la connaissance suscitée préalablement par l’amorce.

Nous proposons que présenter un stimulus un temps très court, permettra seulement l’activation des composants sensori-moteurs constitutifs du stimulus. Dans ce cas précis, la connaissance émergente en lien avec l’objet amorce sera constituée de composants activés indépendamment les uns des autres. Selon nous, cette indépendance se traduira par des effets d’amorçage spécifiques de chaque composant sur le traitement de la cible, si elle partage certains de ces composants. Cette idée est illustrée dans la partie SOA « court » de la figure 14. Nous parlerons d’effets additifs de chaque composant (composant 1, composants 2...).

En revanche, avec un SOA un peu plus long, les processus d’intégration pourront se mettre en place et la connaissance qui émergera à partir du stimulus amorce sera différente de la simple addition des composants élémentaires. Selon nous, la représentation mentale intégrée suscitée par l’amorce ne pourra faciliter le traitement de la cible que lorsque cette dernière correspondra à une représentation mentale identique ou tout du moins en grande partie similaire. Les composants ne pourront s’exprimer qu’en fonction des autres composants : cette dépendance se traduira selon nous par une interaction entre les composants étudiés. La partie SOA « long » de la figure 14 illustre l’idée que l’amorce intégrée ne peut faciliter le traitement de la cible que si les deux entités sont similaires.

Figure 14. Illustration de l’influence des processus d’activation et d’intégration sur le phénomène d’amorçage.
Figure 14. Illustration de l’influence des processus d’activation et d’intégration sur le phénomène d’amorçage.

Des effets additifs sont attendus lorsque les composants sensori-moteurs de l’amorce ne sont pas encore intégrés les uns aux autres. En revanche, lorsque le SOA a permis leurs intégrations, seule une interaction peut être observée.