Discussion

Les résultats que nous avons obtenus supportent pleinement les différentes hypothèses que nous avons formulées au début de ce chapitre.

Dans un premier temps, il est intéressant de constater que la catégorisation des cibles, qui n’implique pas directement le traitement de composants moteurs par ailleurs, est pourtant influencée par le facteur geste. La similarité entre le geste impliqué par l’amorce et le geste impliqué par la cible facilite le traitement de la cible. Les connaissances que nous avons des objets de notre environnement sont donc composées entre autres, d’éléments moteurs constitutifs des aspects fonctionnels des connaissances relatives à ce type d’objets.

Par ailleurs, il s’agit bien de l’activation de composants mnésiques puisqu’ils ne sont pas directement sollicités par la situation. Ils sont selon nous le résultat d’une diffusion d’activation en parallèle des composants visuels activés directement par l’image.

Mais la principale hypothèse à l’origine de cette expérience concernait les processus d’activation et d’intégration, correspondant à des stades différents de l’émergence d’une connaissance. Conformément à nos attentes, nous avons obtenu une double interaction entre les facteurs « geste », « catégorie » et « SOA », qui indique que les influences de chaque facteur varient en fonction du temps qui sépare la présentation de l’objet amorce et de l’objet cible.

Avec un SOA de 100 ms, les effets d’amorçage sont observés lorsque les objets amorce et cible nécessitent des gestes d’utilisation similaires. Les résultats montrent également qu’avec ce délai, un objet amorce appartenant à la même catégorie sémantique qu’un objet cible impliquera un effet d’amorçage, quels que soient les gestes d’utilisation des objets. Ces résultats montrent donc selon nous, que, lorsque le premier objet est présenté, il active la représentation mentale qui lui est associée ; si cette représentation partage une quelconque similarité avec la représentation activée par le second objet, le traitement de ce dernier sera plus efficace.

Mais les résultats confirment également que les effets d’amorçage varient en fonction du temps. Lorsque l’amorce est présentée 300 ms plutôt que 100 ms, la facilitation du traitement de la cible ne peut plus se faire uniquement à partir de la similarité d’un composant isolé. Les effets d’amorçage ne sont observés que lorsque l’amorce et la cible appartiennent à la même catégorie sémantique, c’est-à-dire lorsqu’ils partagent un grand nombre d’autres composants (sensoriels, moteurs, …) et qu’ils partagent également un geste d’utilisation semblable1.

Notes
1.

Cette expérience à donné lieu à la publication d’un article dans la revue Acta Psychologica (Labeye, Oker, Badard, & Versace, 2008).