Henri De Lubac souligne qu’il existait au Moyen Âge la même idée à partir des points de vue différents : le refus de s’en tenir au seul sens de la lettre 174 . À la suite des Pères de l’Église, les exégètes médiévaux ont sans cesse dans leur pensée le texte de saint Paul : « La lettre tue, c’est l’esprit qui vivifie ». Mais cette « lettre qui tue », ce n’est pas la réalité historique, c’est l’interprétation littérale. Dans la continuité d’Origène ou d’Augustin, on cherchera ainsi l’intelligence spirituelle. L’« histoire » de l’Ancien Testament préfigure la « grâce » de l’Évangile : Richard de Saint-Victor l’exprime en comparant l’histoire au bois et l’allégorie, ou sens mystique, à l’or 175 .
La littérature chrétienne du Moyen Age représente une masse énorme de textes, sur une durée de plus de huit siècles, ou même d’un millénaire 176 . François Bousquet définit ce Moyen Age, non pas été un temps « moyen » ou de transition, mais comme un prodigieux temps d’invention, particulièrement dans la rencontre de la culture et de la foi 177 . C’est une « christianisation » de la mémoire et de l’imaginaire collectifs : les interprétations idéaliste ou mystique, et réaliste. Nous allons le voir notamment autour de l’Apocalypse.
Henri DE LUBAC, Exégèse médiévale. Les quatre sens de l’Ecriture, Première partie II, p.439.
Nous reprenons la citation d’H. DE LUBAC, op. cit., Première partie II, p.512.
Le Moyen Age peut se dire comme un millénaire, si on tient compte de la période de transition entre l’âge patristique et la renaissance carolingienne.
François BOUSQUET, « Le Moyen Age », Histoire chrétienne de la littérature. L’Esprit des lettres de l’Antiquité à nos jours, (dir. Jean DUCHESNE) … p.263.