3.2.2. La recréation d’un corps

Or, l’accomplissement n’est pas autre que la recréation d’un corps dans l’Apocalypse. Le monde ancien est disparu, le monde nouveau est arrivé : « Et je vis un ciel nouveau et une terre nouvelle, car le premier ciel et la première terre ont disparu et la mer n’est plus » (21, 1). C’est la création d’un monde nouveau, comme un lieu corporel où il y a articulation, harmonie et vie : ce monde nouveau est à la fois Épouse et cité, intime et collectif, singulier et universel. Il estdescendu du ciel d’auprès de Dieu, sur la montagne, non pas sur la terre. À l’horizon de l’Apocalypse, l’accomplissement est une recréation. Dans ce monde nouveau, dans un corps nouveau, une nouvelle relation est établie entre Dieu et Humanité : « Ils seront ses peuples et lui sera le Dieu qui est avec eux  » (21, 4).

Comme « le lin pur » et « des œuvres justes des saints » sont configurés, la préparation du vêtement et l’écoute de la parole sont étroitement liées l’une à l’autre : « Heureux ceux qui lavent leurs robes, afin d’avoir droit à l’arbre de vie, et d’entrer, par les portes, dans la cité » (22, 14). C’est pour entrer dans la cité où il y a la vie et la joie.

Nous comprenons maintenant pourquoi il y a devant le trône et devant l’Agneau « une foule immense » revêtus des robes blanches et des palmes à leurs mains au centre de l’Apocalypse : 7, 9. Ainsi, la couleur de la nouvelle robe est blanche. Cette foule immense de ceux qui ont lavé leur robe dans le sang de l’Agneau pourrait confirmer qu’il s’agit de l’Incarnation. En vue du corps : « Ils viennent de la grande épreuve. Ils ont lavé leurs robes et les ont blanchies dans le sang de l’Agneau. C’est pourquoi ils se tiennent devant le trône de Dieu et lui rendent un culte jour et nuit dans son temple » (7, 14-15).

Le texte n’oublie pas d’insister sur la distinction entre l’écoute et la non-écoute à partir de la précision du dedans et du dehors : « Dehors les chiens et les magiciens, les impudiques et les meurtriers, les idolâtres et quiconque aime ou pratique le mensonge! » (22, 15). Il s’agit encore de l’effet parabolique. Nous retrouvons ici une loi de la cité, d’un corps nouveau où il n’y a que la vérité absolue (cf. 21, 27).

C’est avec et dans ce corps nouveau que s’accomplit la figure de la Femme, manifestant les deux mondes différents (le monde de Ap. 12 et le monde de Ap. 17) qui sont autant d’éléments nécessaires à son accomplissement (Ap. 19 et 21). Un tel parcours n’exprime rien d’autre que l’itinéraire humain qui chemine à travers des épreuves vers l’aboutissement. Nous sommes là devant un impossible absolu, non pas vraiment une chose, mais un réel au cœur même des écritures.

Nous pourrons établir la structure de la Béatitude qui correspond à celle de la victoire dans le chapitre précédent :

Ainsi, la joie d’entrer dans la cité s’identifie à la joie de demeurer auprès de Dieu. Il n’y a qu’une place de reconnaissance du côté de l’humanité. Il s’agit pour l’humanité de reconnaître son identité, de demeurer auprès de Dieu dans l’écoute de la parole de Dieu et dans des effets de sa propre parole. Il s’agit de parcourir le chemin de la parole. Le sujet lecteur se trouve dans cette attente tout comme la figure l’est.