La seconde génération : la navigation industrialisée.

L’invention de la machine à vapeur et son utilisation pour la propulsion des navires modifient sensiblement les navigations maritimes, fluviales et fluvio-maritimes. La taille des unités s’accroît, et leurs capacités de chargement avec. Les temps de parcours se raccourcissent. Des services réguliers sont mis en place sur les plus grands bassins européens : Danube, Rhin et Seine. Cependant les fleuves laissés jusqu’alors en leur état naturel ne répondent plus aux nouvelles exigences de navigation. Les nouvelles unités de transport ont besoin d’un tirant d’eau plus important et d’une meilleure prévention des risques : signalisation des écueils, des bancs de sable… Rissoan (1995) mentionne un note administrative de 1871 adressée au ministère français des Travaux publics soulignant le problème d’insuffisance de mouillage sur la Seine : « en portant à trois mètres le tirant d’eau, on arriverait à transformer la Seine en un véritable bras de mer… 2  ».

Les navires fluvio-maritimes restent des caboteurs de taille limitée de 400 à 700 tpl (tonnes de port en lourd). La dimension des cales est contrainte par la quantité de charbon nécessaire au voyage et par l’espace occupé par les machines.

La taille des navires augmentant, il est de plus en plus difficile de remonter les fleuves. Les ports migrent vers l’aval, pour s’installer en fond d’estuaire. Rissoan (1995) reprend l’exemple rhénan pour illustrer cette migration des ports vers l’aval des voies navigables. Jusqu’au XVème siècle Cologne est considéré comme un port de mer. À partir de cette date, les ports d’Arnhem et Nimègue deviennent les débouchés maritimes les plus actifs du Rhin. Au XVIIIème Dordrecht devient la principale destination des navires de mer sur le Rhin avant que Rotterdam, Anvers et Amsterdam le supplantent au XIXème siècle.

Sur le Rhône, priorité a été donnée au chemin de fer. En 1827 les frères Seguin obtiennent la concession de la ligne de chemin de fer entre Saint-Étienne et Lyon. La ligne obtient un succès immédiat. Le trafic de marchandises passe de 350.000 tonnes en 1834 à 612.000 tonnes en 1839. En 1842 une loi sur les chemins de fer met en place l’axe Paris-Lyon-Marseille, axe complètement achevé en 1856. La rapidité des relations ferroviaires et une infrastructure fluviale mal adaptée ont eu raison du fluvial et du fluvio-maritime. Au milieu du XIXème la profondeur maximale à l’étiage (période de basses eaux) ne dépasse pas 0,80 mètre. Le faible tirant d’eau et des ponts « trop bas » pénalisent les échanges par voies navigables et les bloquent parfois. Rissoan (1995) évoque pour la période 1853-1877, une durée annuelle du chômage en basses eaux de 70 jours environ. En 1854 le trafic fluvial rhodanien ne dépassait pas 440.000 tonnes et chutait à moins de 120.000 tonnes en 1880.

Au fil du temps, les machines à vapeur sont progressivement remplacées par des moteurs diesel. La dimension des cales augmente avec l’introduction de l’architecture « tout à l’arrière pont ouvert ». Le moteur est placé à l’arrière du navire et non plus au milieu comme sur les bateaux à aubes. L’ouverture du pont est alors augmentée. Le port en lourd des caboteurs s’accroît. Cependant, l’irrégularité des cales laisse de nombreux espaces vides.

Les années 70 sont celles d’une nouvelle conception navale. Cette nouvelle architecture adapte le fluvio-maritime aux contraintes d’un transport moderne et intermodal.

Notes
2.

Cité par R PLANCHAR (1985)