A. Fluvio-maritime et accessibilité des voies navigables.

Charlier et Fohal (2005) étudient l’avant pays nautique de quatre ports intérieurs ayant des activités fluvio-maritimes : Bruxelles, Duisbourg, Liège et Paris. Les auteurs démontrent que le concept d’avant pays nautique s’applique également aux ports intérieurs. Vigarié (1979) définit le concept d’avant pays nautique comme étant : « la partie de l’espace océanique universel couverte par les routes maritimes avec lesquelles ce port est en relation durable ». Il s’agit de l’ensemble des relations maritimes qu’un port côtier ou intérieur développe avec d’autres ports.

L’avant pays maritime est proche du concept d’aire de navigation que nous avons développé auparavant : la zone géographique (maritime) qu’il est possible de desservir avec des navires fluvio-maritimes au départ d’un port intérieur dans des conditions économiques attractives.

Charlier et Fohal (2005) appliquent pour la première fois le concept d’avant pays à des ports intérieurs. Ils établissent une cartographie des relations maritimes pour chacun des ports étudiés. Leur travail s’appuie sur une base de données reprenant l’ensemble des trafics maritimes par origine/destination, nature des cargaisons (type de produits et poids) de chacune des quatre autorités portuaires.

Ils calculent par la suite des indices de spécialisation permettant d’identifier à l’import comme à l’export les catégories de produits ou les pays sur ou sous-représentés par rapport à la moyenne de l’échantillon considéré. Leur analyse des trafics fluvio-maritimes comprend également un graphe d’accessibilité des voies navigables européennes : graphique repris ci-dessous.

Graphique 18 : Accessibilité des voies navigables européennes (CIEM 2005).
Graphique 18 : Accessibilité des voies navigables européennes (CIEM 2005).

Source ; Charlier et Fohal (2005).

Charlier et Fohal (2005) mesurent cette accessibilité par le nombre de navires fluvio-maritimes susceptibles de naviguer sur les différentes voies d’eau considérées. Elle dépend du gabarit de chaque infrastructure fluviale : tirant d’eau, tirant d’air et dimensions des écluses – longueur et largeur des sas d’écluses. Cette analyse de l’accessibilité est réalisée à partir d’une base de données regroupant l’ensemble de la flotte fluvio-maritime européenne.

Le canal de Manchester est l’infrastructure capable d’accueillir le plus grand nombre d’unités avec plus de 2.200 navires fluvio-maritimes. Le bassin Rhône-Saône se classe quasiment au dernier rang des voies navigables européennes, avec seulement une trentaine de navires susceptibles de fréquenter l’axe.

Paradoxalement il n’existe pas de relation entre le dimensionnement de l’infrastructure et ses trafics. « En 2004, le port de Bruxelles a réalisé un trafic maritime inférieur à 100.000 tonnes, contre plus de 1.400.000 t pour le port de Duisbourg et 400.000 t pour celui de Paris » Charlier et Fohal (2005), le canal de Bruxelles se situe au second rang en termes d’accessibilité quant au Rhin, il est accessible à moins de 500 navires fluvio-maritimes. Dans le même ordre d’idées, le bassin Rhône-Saône réalise un trafic supérieur à celui de la Seine pourtant bien plus accessible. En 2005, le trafic fluvio-maritime sur Rhône-Saône a atteint 855.000 tonnes contre moins de 450.000 tonnes sur la Seine. Le bassin rhodanien est certes mal classé dans l’analyse d’accessibilité, il est cependant hétérogène. Arles peut accueillir des navires à pleine charge jusqu’à 3.000 tpl (tonnes de port en lourd) contre seulement 1.300 tpl pour Chalon.