2) Aides à l’investissement :

VNF soutient le renouvellement de la flotte fluviale par un plan d’aide à la modernisation. L’objectif est de répondre à des trafics spécifiques et d’accroître la sécurité des marchandises transportées. Ce type d’assistance n’est pas dénué d’intérêt pour la cale fluvio-maritime jugée globalement vieillissante par les acteurs portuaires de Rhône-Saône. Ce vieillissement s’accompagne d’un déclin qualitatif rendant les unités fluvio-maritimes beaucoup plus difficiles à travailler lors des manutentions : problème d’ouverture des écoutilles. Ceci n’est, par ailleurs, pas sans conséquence quant à l’image renvoyée par ce mode de transport (baisse de la productivité des ports et des navires, un manque certain de fiabilité, inquiétude quant au respect des règles de sécurité…). Une extension du plan de modernisation de la flotte à destination des unités fluvio-maritimes pourrait être envisagé sous conditions de fréquentation des voies navigables françaises. A l’image de ce qui se fait dans le secteur du transport fluvial, une aide à l’achat d’unités fluvio-maritimes pourrait être mise en oeuvre. Ce type de mesure aurait deux missions principales :

Les unités les plus vieilles et donc les plus potentiellement dangereuses pour la navigation sur le fleuve et l’infrastructure (heurt des murs guides d’écluse) pourraient être écartées du corridor rhodanien.

La cale fluvio-maritime aurait la possibilité de s’adapter au plus près des exigences des chargeurs tout en incorporant les contraintes techniques et nautiques de l’infrastructure fluviale (tirants d’eau, d’air, largeur, longueur des sas d’écluses…).

Le concours financier de la sphère publique ne concernerait que l’achat d’un navire. L’assistance apportée pourrait consister en une aide sous forme d’un prêt à taux zéro. Le prêt accordé serait d’une durée équivalente à l’emprunt bancaire. Il viendrait en complément des fonds propres et de l’emprunt bancaire boucler le montage financier de l’acquisition d’un navire.

Ce montage permet de réduire la charge des frais financiers et donc d’accroître la rentabilité et le degré de compétitivité de l’activité fluvio-maritime par une réduction des coûts fixes. L’objectif de la démarche est d’éviter un régime de subventions directes dans lequel l’opérateur stoppe son activité lorsque cesse la subvention, comme ce fut le cas pour la ligne Lyon-Barcelone. La nature de l’activité fluvio-maritime sur le bassin Rhône-Saône ne permet pas à la grande majorité des armateurs fréquentant l’axe rhodanien de prétendre au programme européen Marco Polo : manque de régularité des flux et de nombreuses liaisons avec des pays tiers (hors Union Européenne). Il s’agit donc de créer une incitation de manière à pérenniser l’exploitation de navires sur Rhône-Saône.

L’aide à l’investissement viendrait en déduction des fonds propres et limiterait donc la prise de risque des investisseurs par une source de financement sur laquelle aucuns frais financiers (intérêts bancaires ou dividendes) ne s’appliquent. Cette aide (prêt à taux zéro) pourrait couvrir de 5 à 20% du montant total de l’investissement.

Le caractère « volatil » des navires fluvio-maritimes – le navire peut-être positionné sur n’importe quelle mer du globe – nécessite de conditionner l’aide à une présence régulière sur le bassin Rhône-Saône. Les modalités d’application de cette assistance restent à définir. Nous pouvons, néanmoins, mesurer l’impact de ce levier d’action sur la compétitivité du fluvio-maritime.

Nous simulons l’achat d’un navire et évaluons l’impact des différents scénarios de financement sur le coût journalier d’exploitation.

Le navire de référence est le Rhodanus. Les caractéristiques de ce fluvio-maritime sont reprises ci-dessous :

Fin 2005, début 2006, ce type de navire était valorisé à hauteur de 3,6 millions d’euros.

Le financement du navire s’effectue selon les modalités suivantes :

Les actionnaires se comportent comme un établissement bancaire. Ils apportent leurs concours financiers en échange de la rémunération de leurs actifs. Les investisseurs attendent une rémunération de leurs fonds équivalente à celle du marché (taux d’intérêt) majorée d’une prime de risque liée à la nature de l’activité dans laquelle ils engagent des fonds.

Pour un montant de l’aide à l’investissement compris entre 5 et 20% de la valeur d’achat du navire, le montant de l’annuité diminue d’un peu moins de 12.000 euros à plus de 45.000 euros par an (cf. graphique 19).

Une aide à l’investissement correspondant à 5% du montant total de l’investissement génère un gain d’environ 3% des frais fixes en capital (amortissement du navire). L’économie réalisée est de 6% pour une aide à hauteur de 10% de l’achat du navire ; 8% pour une aide de 15% et plus de 11% pour une aide de 20%.

Sans aide, le montant de l’annuité est inférieur à 425.000 euros contre plus de 375.000 euros pour une aide à hauteur de 20% de la valeur d’achat du navire – cf. annexe 8 pour le détail des tableaux d’amortissement.

Le graphique ci-dessous établit la comparaison entre une annuité sans aide et une situation aidée.

Graphique 19 : Amortissements aidés et non aidés, éléments de comparaison.
Graphique 19 : Amortissements aidés et non aidés, éléments de comparaison.

L’aide à l’investissement se substitue à une partie des fonds propres. Les frais financiers couvrant l’intérêt bancaire et la rémunération des actionnaires se réduisent donc (cf. graphique 19).

Graphique 20 : Évolution des frais financiers entre une annuité sans aide et annuité aidée à hauteur de 20%.
Graphique 20 : Évolution des frais financiers entre une annuité sans aide et annuité aidée à hauteur de 20%.

Outre un allégement de la charge financière de l’investissement, ce système d’aide à l’investissement devrait faciliter les démarches des opérateurs fluvio-maritimes auprès des établissements bancaires. En effet, certains acteurs fluvio-maritimes ont été confrontés à un problème de cautionnement bancaire dans le montage de leur projet d’investissement. Ces sociétés ne disposaient pas d’une surface financière suffisante pour assurer le renouvellement de leur outil de transport – compagnie propriétaire d’un seul voire de quelques navires relativement âgés.

Par son concours financier la sphère publique apporte aux banques une garantie supplémentaire. En tant que bailleur de fonds, elle devra néanmoins s’assurer de la solvabilité du créditeur, de la solidité de son projet et conditionner son aide au positionnement du navire sur le bassin rhodanien ou l’axe concerné.

Le coût de cette mesure pour la collectivité correspond à l’actualisation des fonds prêtés ; c’est-à-dire la perte monétaire des intérêts si cette somme était placée sur le marché financier pour la période correspondante. Selon les différents scénarii, la Collectivité devrait prêter aux opérateurs bénéficiaires de l’aide à l’investissement les sommes suivantes :

Tableau 19 : Montant de l’aide à l’investissement.
Tableau 19 : Montant de l’aide à l’investissement.

L’aide à l’investissement en réduisant la charge des frais financiers accroît la compétitivité du fluvio-maritime. Le coût total du fluvio-maritime se réduit. La baisse induite des coûts de transport est comprise entre 1% et 5% selon le niveau de l’aide. L’économie ainsi réalisée sur le coût journalier du navire varie d’environ 50 euros à près de 150 euros. Cette baisse des coûts contribue également à accentuer l’aire de navigation des fluvio-maritime. Au départ d’Arles la zone de pertinence du fluvio-maritime de référence (Rhodanus – FM3 selon notre typologie) augmente de 10% à 30%. Pour une aide équivalente à 20% et à pleine charge, le navire peut parcourir une distance maritime 30% supérieure, environ 6.000 kilomètres contre 4.600 kilomètres sans aide – avec un jour de repositionnement maritime. Outre cette aide financière la compétitivité des fluvio-maritimes pourrait être accrue par des innovations technologiques.