4. Synthèse du Chapitre 1

Dans ce premier chapitre, nous nous sommes penchés sur la définition de la syllabe d’un point de vue linguistique. Nous avons présenté différentes conceptions structurales de la syllabe nous permettant de retenir certaines constantes : une syllabe comporte obligatoirement un noyau vocalique (i.e., une voyelle) tandis que la coda est optionnelle et que l’attaque, bien que facultative, permet de construire des syllabes CV présentes dans toutes les langues du monde (Clements & Keyser, 1983).

Nous avons montré que chaque phonème d’une syllabe dispose d’un degré de sonorité propre qui va déterminer une syllabe optimale, à savoir celle dont l’attaque croît progressivement jusqu’au noyau vocalique et décroît minimalement en fin de syllabe. Le prototype idéal correspond ainsi à une syllabe de type CV (e.g., Clements, 1990).

Nous avons également présenté les différentes théories de segmentation syllabique dans un mot, contraintes par les règles phonotactiques et par la sonorité aux frontières syllabiques. Celles-ci déterminent les stratégies disponibles et applicables dans une langue donnée. Ainsi, en français, la syllabification peut être influencée d’une part par les profils de sonorité aux frontières syllabiques, car ils fournissent des renseignements acoustico-phonétiques utiles pour délimiter chaque syllabe (i.e., le pattern ‘diminution faible de la sonorité en fin de syllabe-accroissement progressif en début de syllabe subséquente’ est un indice pertinent permettant de situer la frontière syllabique dans un mot comme bal.con ; e.g., Murray & Vennemann, 1983). La syllabification peut dépendre du nombre maximal de consonnes pouvant être positionnées en attaque de syllabe (i.e., Principe de l’Attaque Maximale ; Spencer, 1996), tant qu’elle ne transgresse pas les règles phonotactiques du français ; une attaque de mot n’est possible que si elle est attestée en début de mot.

Enfin, nous avons insisté sur l’importance des caractéristiques – statistiques – du français pour justifier du recours aux unités syllabiques plutôt qu’aux rimes, comme en anglais. Il s’agit notamment de la position plus prédictible de l’accentuation, de la proportion plus élevée de mots plurisyllabiques (i.e., 93.3% ; Content al., 1990) et de la prédominance de structures syllabiques optimales (i.e., CV ; e.g., Encrevé, 1988 ; Wioland, 1985).

Contrairement à des langues telles que l’anglais, le français dispose d’un ensemble de caractéristiques linguistiques optimisées pour l’utilisation de la syllabe. Cependant, nous avons dépeint un portrait assez controversé du rôle de la syllabe dans d’autres langues et même, dans certains cas, en français. Son rôle ne semble donc pas universel et systématique.