3.2. Théorie des schémas vs. théorie des chunks

Cependant, l’encodage phonologique d’unités infralexicales telles que les syllabes dans la production de mots met en concurrence deux conceptions théoriques de la représentation des syllabes : les schémas et les chunks.

La conception selon laquelle les syllabes seraient des schémas est notamment soutenue par les arguments expérimentaux de Costa et Sebastián-Gallés (1998), Ferrand et Seguí (1998) ou Sevald, Dell et Cole (1995). Ces travaux font notamment écho au modèle de Dell (1986) selon lequel les mots seraient déjà syllabifiés dans le lexique, la récupération des mots ne s’effectuant pas uniquement sur la base du contenu phonologique des syllabes (i.e., chunks) mais aussi sur la base de leur structure abstraite (i.e., schémas). À l’inverse, certains modèles (e.g., Levelt, Roelofs & Meyer, 1999 ; pour une synthèse, voir Levelt, 2001) défendent le point de vue selon lequel la production de mots parlés reposerait sur un processus de syllabification (i.e., les mots ne seraient donc pas représentés dans le lexique sous une forme syllabifiée, et ce, en s’appuyant sur le processus de resyllabification de la parole continue). Pourtant, la syllabe jouerait un rôle en production de parole à l’interface entre l’encodage phonologique et un encodage phonétique qui inclut la computation des gestes articulatoires (Cholin et al., 2006). Ainsi, la syllabe serait générée à la volée sur la base du contexte. Comme le soulignent Seguí et Ferrand (2000), le regroupement des différents résultats obtenus sur le rôle de la syllabe en production de parole permet principalement « de conclure à l’existence d’un modèle mixte de la syllabe, dans lequel les syllabes correspondent à la fois à des schémas (structure abstraite) et à des chunks (contenu phonologique […]) » (Seguí & Ferrand, 2000, p. 116).