5. Conclusion

Les résultats expérimentaux issus des travaux chez l’adulte sont loin d’être limpides, mais révèlent plutôt des controverses assez marquées. En réalité, il est important de constater qu’il n’y a pas de véritable consensus d’une étude à l’autre sur la systématicité du recours aux syllabes bien que les chercheurs s’accordent de plus en plus à reconnaître l’intervention d’un code syllabique qui varierait selon la langue, la modalité perceptive, le délai d’encodage…

Par ailleurs, après avoir longtemps considéré la syllabe comme unité pertinente pour la classification de la parole (e.g., Mehler et al., 1981 ; Seguí et al., 1990), les données récentes abondent dans le sens d’une syllabe en tant qu’unité de segmentation de la parole (e.g., Content et al., 2001b ; Cutler et al., 2001 ; Jansma & Schiller, 2004). Si les caractéristiques lexicales (e.g., fréquence), phonologiques, phonotactiques ou acoustiques apparaissent comme déterminantes dans les stratégies de segmentation, il semblerait que d’autres éléments puissent moduler l’apprentissage de la lecture et l’utilisation d’unités spécifiques.

Concernant l’écrit, l’une des observations majeures et redondantes des études insiste sur l’aspect inhibiteur des syllabes initiales fréquentes des mots en décision lexicale alors qu’elles sont facilitatrices en production de mots (Carreiras & Perea, 2004a ; voir Conrad et al., 2006 pour des effets inhibiteurs en allemand dans les deux conditions). En revanche, le rôle du voisinage orthographique demeure beaucoup plus obscur. Il apparaît être contraint par la langue, la tâche et le contrôle strict des facteurs. Cependant, l’introduction et la combinaison de ces deux indices, complémentaires, permettent de rendre compte dans une certaine mesure des effets inhibiteurs ou facilitateurs de la fréquence lexicale et/ou syllabique. Enfin, l’un des points centraux de ces diverses recherches concerne l’aspect dissociatif de l’intervention d’informations orthographiques et phonologiques qui laisse de nombreuses questions en suspens.

Un de nos objectifs est de définir si la syllabe est une unité phonologique utilisée par les adultes français en lecture silencieuse au travers de deux paradigmes distincts (i.e., paradigme des conjonctions illusoire et tâche de reconnaissance bimodale audio-visuelle de pseudomots) tout en essayant de mieux comprendre le rôle potentiel des caractéristiques linguistiques du français et de facteurs tels que les fréquences syllabiques et lexicales.