3.3. Habiletés épi- et métaphonologiques : étude longitudinale en français

En français,Écalle et Magnan (2002b) (voir aussi Écalle et Magnan, 2007 pour une réplication de leurs résultats) ont examiné le niveau des habiletés phonologiques et leur rôle prédictif des compétences en lecture. Il s’agissait d’une étude longitudinale d’enfants de Grande Section de Maternelle (GSM) à la première année de primaire (CP). Deux tâches étaient proposées : une tâche épiphonologique (i.e., tâche de catégorisation) et une tâche métaphonologique (i.e., tâche de détection d’unité commune). Les deux tâches manipulaient trois types d’unités partagés : syllabe, unité infrasyllabique ou phonème. Les résultats ont montré que les performances épiphonologiques étaient supérieures et qu’elles augmentaient de GSM à CP. L’écart entre les deux tâches était plus important en GSM qu’en CP. Grâce à l’introduction de l’apprentissage de la lecture, les capacités métaphonologiques augmentaient plus significativement. En GSM et en CP, au niveau épiphonologique, les phonèmes étaient moins bien détectés que les syllabes. Au niveau métaphonologique, en GSM, le traitement des unités ne différait pas statistiquement. En CP, les unités infrasyllabiques étaient moins bien détectées que les phonèmes et les syllabes. Les analyses de régression conduites sur les performances ont montré que le niveau de recodage phonologique en CP était prédit par le score métaphonologique observé en CP. Conformément aux travaux présentés précédemment, la capacité à manipuler des phonèmes prédit efficacement les performances en reconnaissance de mots écrits. Par ailleurs, les résultats observés dans la tâche épiphonologique en GSM et en CP rendaient compte avec force des performances métaphonologiques en CP. Enfin, cet ensemble de données suggérait que le niveau d’habiletés phonologiques acquis avant l’apprentissage de la lecture était un bon prédicteur du niveau métaphonologique en CP, lui-même excellent prédicteur du niveau de recodage phonologique.

Castles et Coltheart (2004) nuancent l’existence d’un lien causal entre conscience phonologique (quelle que soit la taille des unités linguistiques) et performances en lecture. Ils estiment que lorsque les entraînements ne portent que sur le développement de la conscience phonémique, sans connaissancespréalables, aucune étude ne parvient à conclure à un lien de causalité strict, car, selon eux, de nombreux facteurs se confondent et les recherches ne parviennent pas à les isoler les uns des autres. Ziegler et Goswami (2005) contre-argumentent toutefois leurs propos en insistant sur le fait que les auteurs avaient exclu beaucoup d’études développementales influentes pour évaluer leur hypothèse causale.