5.3.2. Tâche de jugement d’identité

Dans deux expériences utilisant une tâche de jugement d’identité de pseudomots, Magnan et Biancheri (2001) ont évalué et comparé les performances d’enfants bons et faibles lecteurs de CP et de CE1. Les auteurs ont utilisé des pseudomots dont la complexité phonologique de la syllabe initiale avait été manipulée. Il s’agissait soit de structures syllabiques CV comportant une voyelle nasale (e.g., can) soit de structures syllabiques complexes CVC (e.g., bar) ou CCV (e.g., cni). La tâche consistait à juger si un pseudomot présenté auditivement était identique ou non à un pseudomot présenté visuellement. Le pseudomot visuel pouvait être identique (e.g., barli et barli), comporter l’ajout (e.g., barli et barali) ou l’omission d’un segment (e.g., barli et bali), avoir seulement la fin identique (e.g., barli et suvli) ou être présenté dans une condition neutre (e.g., barli et motnu).

Les résultats obtenus ont mis en évidence que seuls les enfants bons lecteurs de CP et de CE1 n’étaient pas gênés par la présence d’une voyelle nasale. Par contre, les enfants faibles lecteurs de CP et de CE1 étaient sensibles à la structure phonologique des syllabes. Ils commettaient davantage d’erreurs pour juger non identique un pseudomot dont la syllabe initiale contenait une voyelle nasale par rapport à un pseudomot contenant une syllabe initiale CVC. Par ailleurs, les enfants faibles lecteurs tendaient à simplifier une syllabe CVC ou une syllabe CV avec voyelle nasale par une syllabe initiale simple CV, plus accessible et optimale. Lors du traitement des syllabes constituées d’un cluster consonantique, les résultats ont montré que les bons lecteurs de CP et CE1 n’étaient pas affectés par la complexité syllabique. En revanche, les faibles lecteurs des deux niveaux scolaires réduisaient en une structure syllabique minimale de type CV ou déplaçaient la consonne pré-vocalique en position de coda pour former une syllabe CVC les structures CCV.

Ces données s’orientent dans la direction d’une sensibilité à l’unité syllabique et plus particulièrement à la complexité syllabique. Les syllabes préférées s’apparent à celles décrites par Clements (1990) comme étant optimales et universelles, à savoir les structures CV, qui seraient ainsi celles extraites et maîtrisées en premier par les enfants lors de leur expérience avec le langage oral et réutilisées prioritairement lors de l’apprentissage de la lecture.