Les manifestations en faveur d’un déficit magnocellulaire ont mis en évidence des troubles de sensibilité aux bas contrastes, à savoir une réduction du seuil de traitement des basses fréquences spatiales (e.g., Slaghuis & Ryan, 1999), des basses luminances (mésopique) mais pas des hautes luminances (photopique) (e.g., Cornelissen et al., 1995), des courtes durées et des hautes fréquences temporelles (Cornelissen et al, 1995 ; Talcott, Hansen, Willis-Owen, McKinnell, Richardson & Stein, 1998). Ils présentent aussi des troubles de sensibilité aux mouvements cohérents (e.g., Demb, Boynton & Heeger, 1997), de discrimination des différences de vitesse de cibles mouvantes (Demb et al., 1998b) et de l’intégration des changements temporels dynamiques des mouvements cohérents (Talcott, Hansen, Assoku & Stein, 2000a ; Hansen, Stein, Orde, Winter & Talcott, 2001). Pour Ben-Yehudah, Sackett, Malchi-Ginzberg et Ahissar (2001), les dyslexiques présentent bien une sensibilité réduite aux hautes fréquences temporelles, mais uniquement lorsque les stimuli sont présentés séquentiellement et causée, selon Slaghuis et Ryan (2003), par des difficultés à retenir les stimuli en mémoire à court terme. Comme l’attestent de nombreuses études, le système magnocellulaire serait impliqué dans l’orientation visuo-attentionnelle, le contrôle des mouvements oculaires et l’exploration visuelle (Stein & Walsh, 1997 ;Iles, Walsh & Richardson, 2000). Il a pour fonction de détecter les mouvements involontaires des images sur la rétine afin de stabiliser le regard. Il serait aussi chargé d’envoyer un influx inhibiteur au système parvocellulaire à chaque saccade oculaire (Breitmeyer, 1980)18. Un déficit magnocellulaire s’accompagnerait ainsi d’une instabilité de la fixation oculaire et d’une augmentation des mouvements oculaires involontaires (troubles du contrôle binoculaire, Stein, Richardson & Fowler, 2000). Ces troubles expliqueraient les retours en arrière fréquents, l’impression de superposition des lettres ou de les percevoir en mouvement, l’inversion des lettres (Stein & Walsh, 1999). Stein (2001) propose que le dysfonctionnement magnocellulaire puisse être compensé par un apport nutritif d’acides gras polyinsaturés qui assurent la perméabilité de la membrane et donc l’hyper-conduction des informations.
Par ailleurs, les sujets souffrant de troubles visuels montrent des performances diminuées au niveau des habiletés orthographiques (Sperling, Lu, Manis & Seidenberg, 2003). Comme l’avaient déjà montré Talcott et al. (2000b) chez les adultes, bons ou mauvais lecteurs, la sensibilité aux mouvements cohérents prédirait les habiletés orthographiques, mais pas les habiletés phonologiques. En effet, ces deux types de compétences – sensibilité aux mouvements cohérents et habiletés orthographiques – apparaissent comme étroitement corrélés (Sperling et al., 2003 ; Witton et al., 1998), notamment dans l’encodage de la position des lettres (Cornelissen, Hansen, Gilchrist, Cormack, Essex & Frankish, 1998).
Les travaux de Burr, Morrone et Ross (1994) sont venus contredire l’hypothèse de Breitmeyer (1980) puisqu’ils ont plutôt montré pendant les saccades une inhibition du système magnocellulaire.