3.6.3. Hypothèse de l’empan visuo-attentionnel

Consistante avec les arguments en faveur de dysfonctionnements visuels ou visuo-attentionnels, l’hypothèse d’un trouble de l’empan visuo-attentionnel a été récemment proposée par Sylviane Valdois (i.e., visual attentional span hypothesis, Bosse et al., 2007). En lecture, la notion d’empan visuo-attentionnel fait référence au nombre de lettres dans un mot qui peut être identifié lors d’une seule fixation oculaire. Cette théorie s’inscrit parfaitement avec le modèle MTM proposé par Ans et al. (1998) dans lequel une fenêtre attentionnelle de taille variable est chargée d’extraire les informations orthographiques, soit globalement, soit séquentiellement de manière analytique (cf., Chapitre 3, Partie 3.5.). La fenêtre visuo-attentionnelle comprend l’ensemble des éléments sur lesquels l’attention visuelle va se focaliser pendant les traitements. Concrètement, un déficit visuo-attentionel entraverait le traitement en parallèle d’éléments distincts que sont les lettres, rendant ainsi laborieux, voire impossible, le traitement des unités infralexicales et l’utilisation de règles CGP. Deux études de cas menées par Valdois et al. (2003) ont, par exemple, clairement démontré l’existence possible d’un trouble sélectif de l’empan visuo-attentionnel, c’est-à-dire une double dissociation entre des troubles de l’empan visuo-attentionnel et des troubles phonologiques. Certains dyslexiques peuvent ainsi manifester une atteinte des capacités visuo-attentionnelles sans pour autant avoir des troubles phonologiques alors que le profil inverse est également vrai. Afin de vérifier l’existence plus générale d’une double dissociation, Bosse et al. (2007) ont étudié les performances de deux populations d’enfants dyslexiques (i.e., francophones et anglophones) sur leur conscience phonémique et leur empan visuo-attentionnel. Dans les deux populations, les résultats ont amené les auteurs à constater qu’il existait une double dissociation entre les troubles phonologiques et visuo-attentionnels. Par ailleurs, il semblerait qu’il existe une forte corrélation entre les performances des dyslexiques dans les tâches visuo-attentionnelles et les épreuves de lecture tandis qu’il n’y a aucune corrélation entre les tâches visuo-attentionnelles et métaphonologiques. Enfin, les analyses de régression conduites par les auteurs ont permis de conclure que faibles capacités visuo-attentionnelles étaient prédictives du niveau de lecture, indépendamment des compétences phonologiques.