Attentes tonales et traitement précoce de la hauteur

L’Etude IV a repris les mélodies et la tâche de discrimination de hauteur de l’Exp.3 de l’Etude III, et a cherché à observer des corrélats électrophysiologiques indiquant l’influence précoce des attentes tonales. La tâche de discrimination de hauteur entre l’avant-dernière et la dernière note permettait d’observer l’influence des attentes tonales sur l’avant-dernière note indépendamment des processus décisionnels liés à la tâche (qui intervenaient sur la dernière note), mais tout en gardant un fort niveau d’attention sur la hauteur des notes (à l’inverse des études EEG où les participants doivent ignorer les stimuli sonores, Koelsch et al., 2000 ; Poulin-Charronnat et al., 2006). Un effet précoce de la relation tonale a été observé sur les avant-dernières notes : des positivités antérieures plus larges (P1) ont été observés pour les toniques (tonalement reliées) que pour les sous-dominantes (tonalement moins reliées). Ce résultat peut être rapproché d’études EEG qui ont montré une influence précoce de l’attention dès 20 ms, dans des tâches de détection de sons purs peu fréquents parmi des trains de sons purs présentés en écoute dichotique (Woldorff et al., 1987 ; Woldorff & Hillyard, 1991). L’Etude IV indique donc que les connaissances implicites tonales des auditeurs influencent, via des mécanismes attentionnels, des traitements corticaux très précoces. L’effet observé sur l’onde P1 est plus précoce que les effets des attentes tonales précédemment observés en EEG (N1, MMN/ERAN, N5, P3a, P3b/P600/LPC, passées en revue au 1.3.2.2). Cette différence est peut-être due à l’importante charge attentionnelle exigée par la tâche de comparaison de hauteurs. Dans notre étude, les participants devaient mémoriser la hauteur de l’avant-dernière note des mélodies afin de la comparer à la hauteur des dernières notes, et la différence de hauteur entre les deux notes était faible. Au contraire, les études EEG précédentes utilisaient des conditions passives (pas de tâche) ou des tâches de détection de stimuli déviants (les déviances étant plus forte que la différence de hauteur utilisée dans notre étude) (cf. 1.3.2.2 pour une revue).