1. Visualisation de la perpétuelle fuite de « je » du personnage

Souvenons-nous encore une fois de l’équivoque du « moi » des personnages romanesques de Siegfried et le Limousin et des effets d’irréalisme que cette conscience narratrice y produit sans cesse. Alors que Jean, qui est le narrateur, Geneviève, Siegfried et Zelten paraissent souvent comme des sortes d’apparitions oniriques, flottantes et impersonnelles, le correspondant dramatique de ces quatre existences se retrouve bien doté de l’individualité ; la relation interhumaine est bien établie entre eux. Jean se transformant en Siegfried dans son rêve, Geneviève ressemblant à celui qu’elle aime, Zelten se montrant dans la rêverie de son ami français par le pouvoir magnétique sont tous, sous contraintes de la norme du « drame absolu », privés de la capacité de se dégager de la contrainte corporelle ou bien de la capacité visionnaire. Il semble que dans Cantique des cantiques créée en 1938 à la Comédie Française Giraudoux essaie de faire ce qu’il n’osa pas faire lors de l’adaptation théâtrale de son roman : transposition scénique de l’impersonnalité de personnages ; par ailleurs dans Judith, il tente de mettre en scène des images que voient ces visionnaires.