I.2.5. La tradition orale

Au Congo, l'écriture n'existait pas avant l'arrivée des missionnaires européens, cependant la tradition orale était particulièrement développée et riche.

En Afrique, en général, et au Congo en particulier, les vieilles gens sont encore des puits de "science" qu'ils lèguent aux jeunes générations par le biais du bouche à oreille. Ils transmettent des connaissances sur les origines des peuples, les rapports avec les peuples voisins, l'histoire souvent épique des grands chefs de clans et des royaumes, les enseignements des ancêtres, le respect des interdits permettant d'éviter la colère des génies et toutes sortes de rites et de recettes permettant de guérir une maladie.

Les femmes aussi contribuent largement à enrichir cette tradition orale par leurs chants au cours des veillées mortuaires, au moment de bercer un enfant ou pendant des travaux champêtres collectifs.

La sagesse des anciens se transmet aussi, de manière plus élégante et moralisante, par le biais des nombreux contes, devinettes et proverbes qui sont l'apanage de toutes les ethnies congolaises.

A l'heure de l'audiovisuel et des nouvelles technologies, les vieux sages analphabètes trouvent là des supports facilitateurs pour perpétrer une tradition aussi vieille que l'humanité ; car le principal problème de l'oralité est que, les connaissances disparaissent parfois avec leurs détenteurs. D'où la célèbre maxime énoncée à cet effet par Amadou Hampaté Bâ : "en Afrique, un vieillard sage qui meurt est une bibliothèque qui brûle". Ne dit-on pas, d'ailleurs, dans le langage courant que "les écrits restent et les paroles s'envolent !" En d'autres termes, la pérennité qui caractérise l'écriture en fait un moyen efficace pour conserver l'information sous une forme de référence durable.

Malgré cette perte possible de l'information que nous venons d'évoquer, l'expression orale est, de nos jours, omniprésente au sein de la société congolaise. Le pays possède pourtant un grand nombre d'écrivains de talents reconnus dans les milieux littéraires internationaux, mais la parole revêt une importance particulière. Presque tout se communique de façon verbale, à tel point qu'on ne peut pas se passer d'adresser la parole aux autres (voisins, parents, amis), même aux personnes que l'on ne connaît pas. Cette habitude se retrouve même au sein de l'administration pourtant composée principalement de personnes instruites. A titre d'exemple, lorsqu'une note de service est affichée, dans une administration ou une entreprise congolaise, il suffit qu'elle soit lue par une ou deux personnes. Certains fonctionnaires ou employés préfèrent et se contentent de s'informer directement auprès de leurs collègues de la prise d'une décision concernant leur service plutôt que de lire les affiches.