Chapitre VI. Les techniques de recueil des données

Du point de vue de la méthode et des techniques de recueil des données, l'étude des représentations pose quelques problèmes, du fait de leur nature. Ce qui pose problème ici, c'est tant le recueil des données que l'analyse des données. Sur le plan du recueil des données, il convient de choisir convenablement sa population, les items de la grille d'interviews que l'on souhaite utiliser, voire le corpus à analyser. C'est d'après nous au chercheur de décider de la démarche à suivre et de choisir les indices qui permettent de considérer que dans telle situation tel terme renvoie à tel champ particulier, car un même terme peut renvoyer à plusieurs champs représentationnels. Cette situation soulève donc aussi le problème de la quantité de discours à traiter.

D'après Jean-Pierre BROUAT (1990) 107, une représentation n'est pas une sorte de photographie de la réalité, elle est d'abord une notion construite par le chercheur qui a pour fonction de rendre compte de tel ou tel segment de la construction symbolique du monde réalisée par les groupes sociaux objets de son attention. Ensuite le même auteur précise que "les représentations ne sont pas des ensembles d'images rangées dans le grenier de la conscience (ou de l'inconscient) et qui seraient citées à comparaître au moment de l'interview, si interview il y a. Les représentations ne peuvent être que produites pour la circonstance dans une situation contraignante (même si l'interview est dite "non directive"). De ce point de vue il n'y a pas de point zéro de la neutralité du chercheur (ou de l'intervieweur) au terme duquel il ne structurerait pas une situation spécifique pendant l'entretien" 108.

Il soutient en plus que la représentation n'est un élément ou une dimension observable qu'en tant qu'elle est le résultat de l'observation opérée par le chercheur en fonction de ses orientations problématiques. La représentation pourrait être ainsi appréhendée en amont par l'ensemble des institutions qui la génèrent, c'est-à-dire par l'ensemble des systèmes normatifs qui structurent les légitimités de tous ordres (comportementales, perceptives, évaluatives, cognitives, discursives,...), c'est en cela qu'elle est essentiellement sociale. La représentation pourrait être aussi appréhendée en aval par ses traces discursives qui ne sont pas les seules traces repérables. Autrement dit, dans le discours, nous n'avons jamais affaire aux représentations elles-mêmes, mais à leurs traces. C'est donc par une série de déductions que le chercheur se croira fondé à observer une représentation. Ce qui signifie que sur le plan méthodologique, l'étude des représentations devra s'opérer selon un dispositif à deux entrées conjointes :

Notes
107.

BROUAT J.P. : La notion de représentation, une notion bien pratique à utilisation délicate in Représentations et handicaps ; CTNERHI ; PUF ; Paris 1990 ; p. 21.

108.

Idem, p. 22.