5.2.2.2 Chronique de l’acte II : réalisation de la première tranche de la Z.A.C. de la Cité Internationale

Des débuts difficiles, l’opération semble compromise

Le montage institutionnel de l'opération de la Cité Internationale requiert la signature de nombreux contrats qui retardent le démarrage des travaux. De 1990 à 1993, la SPAICIL (Société Privée d’Aménagement et d’Investissement de la Cité Internationale de Lyon), société créée par la SARI et le groupe Compagnie Générale des Eaux (CGE) pour l’aménagement de la Cité Internationale négocie ces contrats et les modalités opératoires de l’opération avec les collectivités locales. Les discussions portent essentiellement sur les charges foncières redevables et les équipements publics à réaliser par la SPAICIL au titre de la location du foncier (cf. infra au sujet des baux emphytéotiques). L’opération avance à grand peine.

En mars 1990, Etienne Tête dépose un recours au tribunal administratif concernant la délibération du 5 mars 1990. En effet, par cette délibération, Michel Noir (président de la communauté urbaine de Lyon) était autorisé à signer le protocole d’accord. Or, pour Etienne Tête, on ne peut signer un tel document, tant que la Z.A.C. n’est pas créée et que son dossier de réalisation (définissant entre autres le programme) n’a pas été approuvé. La procédure est donc caduque. Il relève également plusieurs « largesses » prises par les deux collectivités locales, notamment au sujet du non-respect de l’article L 300-2182 du Code de l’Urbanisme et de l’irrégularité de la désignation de Renzo Piano en tant que maître d'œuvre183. Toutefois, pour leur défense, les collectivités locales ont considéré devant le tribunal administratif de Lyon que le protocole signé n’a pas la valeur juridique du terme de protocole : il s’agit seulement d’inscrire de façon plus formelle, les engagements des partenaires sur cette opération (Lettre du 27 juin 1990 du service juridique et contentieux de la communauté urbaine de Lyon au Directeur du service des Opérations d’urbanisme). Etienne Tête recevra finalement gain de cause en novembre 1990 et son recours sera accepté. Le protocole d’accord est donc annulé au sens juridique mais il reste une base solide pour poursuivre les négociations entre les acteurs.

Parallèlement, la S.E.M. travaille sur les documents de la Z.A.C. et sur le montage foncier de l’opération qui est très complexe. Mais encore une fois, un recours est déposé contre la communauté urbaine concernant l’approbation du Schéma Directeur184. Le 29 octobre 1990, le dossier de création-réalisation de la Z.A.C. est arrêté, mais toujours pas approuvé par les conseils municipal et communautaire. Le projet défini suppose deux enquêtes publiques, qui relèvent finalement de la simple formalité. L’une porte sur le Plan d’Aménagement de Zone, puisqu’une tour haute de 120 mètres est prévue ; l’autre sur e révision partielle du P.O.S., car une partie des terrains jusqu’alors classés en zone naturelle dans le P.O.S. devient constructible (ce qui suppose un changement de zonage). Les enquêtes publiques recueilleront peu d’avis défavorables185.

Pendant ce temps c’est le statu quo pour l’opération, la crise immobilière sévit à partir de 1992 dans la région lyonnaise, rend caduque les bilans financiers estimés de l’opération à la fin des années 1980. Les dirigeants de la SARI doutent alors de la réussite de l’opération, d’autant plus que leur président et directeur général, Christian Pellerin vient d’être mis en examen pour l’affaire du CNIT à la Défense. La CGE reprend alors l’intégralité des parts de la SARI qui quitte momentanément le projet. Conséquence de la crise immobilière, la CGE tente de revoir les engagements établis par la SARI sur le programme de construction, notamment sur les surfaces de bureaux attendues et menace de se retirer de l’aménagement de l’opération, ne conservant que la partie promotion. Cette idée déplaît fortement à Michel Noir, d’autant plus que la collectivité, étant engagée sur d’autres projets ambitieux, ne peut endosser une telle responsabilité et une telle charge financière. Michel Noir menace alors la CGE de remettre en jeu, les concessions que ce groupe possède pour l’assainissement et la distribution d’eau potable sur l’agglomération lyonnaise (entretien Cochard). La CGE décide de garder sa fonction d’aménageur, à condition de prévoir une « porte de sortie » au cas où la crise immobilière serait trop forte et mettrait en péril la société ou au minimum la poursuite et le bon achèvement de l’opération (entretien Raquin).

Les contrats vont être progressivement signés. Le 22 juillet 1991, une convention foncière lie la Ville de Lyon et la SPAICIL sur l’utilisation du foncier dont la ville reste propriétaire (ébauche d’un premier programme quasi définitif) et sur le principe des baux emphytéotique. Le 13 mai 1992, suite à la création de la nouvelle Z.A.C. de la Cité Internationale (11 mai 1992) la convention d’aménagement intervenant entre la communauté urbaine de Lyon et la SPAICIL est signée. Elle sera suivie de l’obtention du premier permis de construire en décembre 1992 portant sur le Palais des Congrès, une première tranche de bureaux et des parkings. Le bail emphytéotique est signé le 6 août 1993 entre la SPAICIL et la Ville de Lyon, confirmant l’engagement de la SPAICIL sur l’aménagement de la première tranche de la Z.A.C. (le palais des congrès, le complexe hôtelier international, le musée d’art contemporain, le complexe cinématographique, l’extension du parc, les parkings, des bureaux et des commerces pour 42 000m² SHON).

Notes
182.

Depuis les lois n°85-729 du 18 juillet 1985 et n°88-1202 du 30 décembre 1988, le conseil municipal ou les autres personnes publiques ayant l’initiative d’opérations d’aménagement sont tenus d’organiser une concertation et de fixer ses modalités pour toute modification ou révision du P.O.S., pour toute création ou modification de Z.A.C., pour toute opération d’aménagement modifiant de façon substantielle, le cadre de vie ou l’activité économique de la commune.

183.

Ce dernier a remporté le concours d’architecture en 1985, mais les collectivités locales ne peuvent contraindre juridiquement l’opérateur privé à l’engager en tant que maître d’œuvre exclusif sur l’ensemble de l’opération.

184.

Le SDAU a été annulé pour vice de forme : l’une des communes de l’agglomération n’a pas reçu les documents dans les délais légaux impartis. Cette annulation n’a rien à voir avec l’opération de la Cité Internationale, mais retarde l’ensemble du processus de révision et d’acceptation des documents d’urbanisme : SDAU et révision partielle du P.O.S.

185.

hormis ceux de ceux qui avaient déposé des recours contre la communauté urbaine sur ce projet