2. Le terme

Selon l’ISO, un terme est : « un mot ou groupe de mots servant à désigner une notion »46. Selon Greimas le terme est un « ensemble de termes, définis rigoureusement, par lesquels toute science désigne les notions qui lui sont utiles »47. Dubois le définit comme « un mot qui assume, dans une phrase, une fonction déterminée »48. Xavier Lelubre considère que le terme ou encore l’unité terminologique a pour fonction de dénommer une unité référentielle49.

Selon X. Lelubre50, le terme n’est que la dénomination d’une unité référentielle, extra-linguistique. Il ne se définit pas par rapport à d’autres termes mais par rapport à son référent. X. Lelubre souligne – selon le rapport existant entre le terme et le référent – que, dans le schéma de Saussure, le lien entre le référent et le signifiant passe par l’intermédiaire mental du signifié. Signifiant et signifié sont linguistiques tandis que le référent ne l’est pas.

L’unité référentielle représente une classe — ensemble d’objets définis par le fait qu’ils possèdent tous et possèdent seuls un ou plusieurs caractère(s) commun(s) — d’entités particulières, de référents individuels.

Il ajoute, en précisant le rapport entre terme et unité référentielle :

« - à une unité référentielle doit correspondre un terme et un seul (sinon, il y a synonymie) ;

- à un terme doit correspondre une unité référentielle et une seule (sinon, il y a polyvalence — homonymie ou bien polyréférentialité —) »51. Xavier Lelubre affirme également : « Dans un contexte définitoire, le terme alors défini est mis en relation directe avec l’unité référentielle qu’il dénote ; pour d’autres contextes l’on peut se demander s’il en est de même. En effet, les termes qui se trouvent dans une partie du texte relative à un micro-monde réfèrent à des entités intervenant dans ce micro-monde. Est-ce à l’unité référentielle elle-même, telle que nous l’avons définie plus haut, comme représentant d’une classe de particuliers ou bien à l’un des particuliers que réfère tel ou tel de ces termes ? »52

Les dictionnaires linguistiques européens spécialisés dans les terminologies de la science de la langue ne se sont intéressés au mot terme que depuis ces dernières années, après que la science de la terminologie a pris place dans les sciences linguistiques appliquées. Selon Dubois, « terme s’emploie parfois comme synonyme de mot » 53 . En 1951, dans le lexique de Marouzeau, le mot terme est synonyme, dans son emploi courant, de la notion de mot. Cependant, cette définition n’est d’aucune utilité dans le domaine de la science de la terminologie.

D’autres définitions modernes de la terminologie précisent sa nature sur la base de sa relation avec le concept. G. Rondau définit la terminologie comme un signe linguistique, « essentiellement un signe linguistique à double face (notion et dénomination) faisant partie d’un ensemble notionnel donné et se définissant par rapport à cet ensemble dans un domaine scientifique ou technique excluant la langue commune. » 54

Selon Xavier Leleubre55, cette définition indique, comme F. De Saussure en a défini le sens, que le terme est identique à un signe linguistique. C’est-à-dire qu’il est un élément linguistique qui contient le signifiant et le signifié. Néanmoins, cette définition n’a été que peu retenue du point de vue de la distinction référentielle de la terminologie.

Alain Rey estime que la terminologie « s’occupe d’ensembles structurés de noms dénotant des ensembles d’objets (les référents individuels, les particuliers de la logique) groupés en classes par des critères qu’expriment leurs définitions » 56.

Il est pertinent de poser la question de savoir ce qu’est la référence ? Selon Dubois, il est possible de définir la référence comme « la propriété d’un signe linguistique lui permettant de renvoyer à un objet du monde extra linguistique réel imaginaire »57. Cela est la résultante de la jonction entre les deux faces concomitantes de l’élément linguistique, c’est-à-dire le signe. Il s’agit du concept et de la forme phonétique dans la théorie saussurienne.

Une autre possibilité existe, qui semble faire consensus : en corrélation avec Rousseau, Manuel Celio ajoute à propos de la définition des termes en général, que le référent « est l’objet du monde que la forme linguistique dénomme. Cette affirmation pose le problème du rapport entre la langue et la réalité. La langue, par les termes, dénomme-t-elle la réalité ou bien une perception de la réalité? »58.

Prenons le concept français de connotation, qui se traduit en arabe par « dilālat ’al-’īÎā’ ». Certes, on ne peut percevoir ce concept et le comprendre que dans son support référentiel, c’est-à-dire sa définition et sa concrétisation dans les contextes et les textes. Cela s’applique aux dénominations qui désignent des références qui n’ont pas d’équivalents dans la civilisation arabe. On en a pour exemple des herbes, des couleurs et des phénomènes naturels qui sont particuliers à un pays donné, à des cultures spécifiques pouvant être nommées et transférées dans d’autres langues en les appuyant sur un support référentiel. Les traducteurs des terminologies appartenant à une tendance spécialisée dans les langues nouvelles rencontrent des difficultés particulières lors de leur traduction ou lors de leur tentative de recherche des équivalents dans les langues vers lesquelles ils veulent les traduire59.

Notes
46.

Voir [ISO 88] Recueil de normes ISO 1-1988, Documentation et information, organisation internationale de normalisation, p. 249.

47.

Voir A. J. Greimas, Sémantique structurale, Paris, 1966, p. 79.

48.

Voir Jean Dubois, et al., Dictionnaire de linguistique, p. 480.

49.

Voir Xavier Lelubre, Introduction à la terminologie arabe, p. 1.

50.

Ibid., p. 1. Voir aussi à ce sujet :

- Xavier Lelubre, « Les relations d’ordre en arabe entre les éléments d’unités terminologiques correspondant à des unités terminologiques simples à formant gréco-latins en français et en anglais », in Aspects du vocabulaire, sous la direction de Pierre J. L. Arnaud et Philippe Thoiron, Travaux du C.R.T.T., Presses Universitaires de Lyon, 1993, pp. 63-80.

51.
Voir Xavier Lelubre, Introduction à la terminologie arabe, p. 1. Voir aussi à ce sujet Kleiber, G. (1981) Problèmes de référence : descriptions définies ou noms propres, Paris, Klincksieck.
52.

Voir Xavier Lelubre, « La question de l’article et du terme dans les textes de spécialité (domaine de la physique) », in Revue turjman, pp. 131-132. Voir aussi Anne Condamines « Terminology between language and knowledge : an example of terminological knowledge base », Actes du colloque TKE 93, Indeks Verlag. Francfort. 1993. pp. 316 à 323.

53.

Cf. Jean Dubois, Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage, p. 480.

54.

Voir Guy Rondeau, Introduction à la terminologie, Québec, Gaëtan Morin, p. 43.

55.

Voir Xavier Lelubre, Introduction à la terminologie arabe, p. 1.

56.

Voir Alan Rey, « La terminologie Noms et Notions » in " Que sais-je ? ", p. 24. Voir aussi pour la définition de la terminologie : « La revue de la langue arabe », n° 22, p. 206 ; n° 24, p. 221, où l’organisation internationale de l’indexation (ISO) a défini le terme du concept comme étant : « n’importe quel signe convenu pour donner la signification d’un concept et qui est formé de voix interdépendantes ou de leurs formes écrites (lettres). Le terme peut être un mot ou une expression. Quant au terme technique, c’est un terme dont l’utilisation ou le contenu sont limités aux spécialistes dans un domaine précis ».

57.

Voir Jean Dubois, Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage, p. 404. Voir aussi

- Manuel Celio, Concei Cao, Concepts, termes et reformulations, p. 61.

- Chukwu, Uzoma Everest, Le repérage des termes dans un corpus bilingue anglais/français, thèse de doctorat nouveau régime, Lyon 2, septembre 1993.

58.

Cf. Manuel Celio, Concei Cao, Concepts, termes et reformulations, p. 60. Voir aussi Helmut Felber, Manuel de terminologie, UNESCO, Paris, 1987.

59.

Cf. Nabil Esber, La terminologie de la linguistique : problème de traduction, français-arabe, tome III, textes traduits, pp. 35-36.