4.2. Modèles théoriques de la mondialisation culturelle

4.2.1. La théorie de l’impérialisme culturel

Le modèle de mondialisation culturelle le plus connu est la théorie de l’impérialisme culturel. Ce modèle porte sur les rôles des gouvernements et des sociétés multinationales et transnationales dans la dissémination des différentes formes de culture mondiale. Il pose l’hypothèse selon laquelle la culture mondiale est disséminée à partir de pays riches et puissants situés au centre du système culturel mondial, vers les pays plus pauvres et moins développés situés en périphérie du système.

La théorie de l’impérialisme culturel a émergé dans les années 1960. Elle trouve sa source dans la critique marxiste des cultures capitalistes avancées de leur propension au consumérisme et à la communication de masse. Le rôle des pays du centre, par opposition aux pays en périphérie, tient à l’idée de base de la théorie des systèmes mondiaux à savoir que le système économique mondial est dominé par un noyau central constitué de pays avancés, alors que les pays du Tiers-monde demeurent en périphérie du système et n’exercent qu’une emprise très limitée sur leur propre développement économique et politique. Les sociétés multinationales et transnationales sont les protagonistes essentiels de ce système.

À l’aide de techniques semblables, les pays libéraux, les multinationales, produisent des biens, dominent les marchés et disséminent les produits. La théorie présuppose une culture « de masse » relativement homogène acceptée sans discussion par des auditoires « de masse ».

La théorie de l’impérialisme culturel fait référence à un pays donné qui impose ses croyances, ses valeurs, son savoir, ses modèles de comportement et son style de vie aux autres. L’impérialisme culturel est défini comme une sorte de domination culturelle exercée par des pays puissants sur des pays plus faibles, une pratique jugée déterministe et intentionnelle puisqu’elle correspond aux intérêts politiques des États-Unis et d’autres sociétés capitalistes puissantes. Les effets de ce genre de domination culturelle sont jugés extrêmement convaincants et mèneraient à l’homogénéisation de la culture mondiale. À ce propos, un chercheur australien (White, 1983 :120-121) laissait entendre que le processus d’américanisation devient carrément redoutable lorsque les concepts à la base de l’identité nationale d’une société sont remodelés à l’américaine.

La notion d’impérialisme culturel en elle-même est vague et sous-entend une évaluation négative du comportement et des intentions des pays avancés, notamment des États-Unis, à la fois envers les autres pays avancés et envers les pays pauvres. La critique soutient que le terme « impérialisme », lequel peut se traduire par une forme de pouvoir des riches sur les pauvres ou desplus forts sur les plus faibles, suppose un degré de domination politique de la part des pays puissants qui n’existe plus. Selon Tomlinson (1991 :175),la notion d’impérialisme contient l’idée d’un projet déterministe, c’est-à-dire l’empiétement planifié d’un système social sur toute la planète à partir d’un centre de pouvoir. Il oppose l’impérialisme à la notion de mondialisation, laquelle sous-entend l’interconnexion et l’interdépendance de toutes les régions du monde d’une façon beaucoup moins déterministe.

Malgré ses points faibles, la théorie de l’impérialisme culturel ou dans sa version plus récente, de l’impérialisme des médias, demeure une perspective utile pour vérifier à quel point certains protagonistes nationaux ont davantage d’impact que d’autres sur la culture mondiale, car ce sont eux qui façonnent et remodèlent les valeurs, les identités et les perceptions culturelles. Il s’agit là de questions importantes puisque l’étendue et l’influence des cultures à l’échelle mondiale prennent rapidement de l’ampleur.