5. Les rôles contraires des TIC et des défis identitaires et culturels dans les pays en voie de développement

Quand en 1990 l‘union soviétique a fait naufrage, le monde connaît une nouvelle grande mutation, qu’Ignacio Ramonet a appelée la « seconde révolution capitaliste ». Cet événement résulte de la convergence d’un faisceau de transformations survenues dans quelques champs dont les TIC furent le premier. Pour le champ des technologies de l’information et de communication, (sous toutes ses facettes d’activités avec le passage au numérique : son, texte et images désormais transmis à la vitesse de la lumière, au moyen d’un code unique) le travail, l’économie, les communications, l’éducation, la création, les loisirs, tout est bouleversé (Ramonet, 2002 :150). L’impact des nouvelles technologies de l’information et de la communication confère un caractère distinctif au processus actuel de mondialisation, comparé à des épisodes similaires du passé. Dans la nouvelle génération des technologies de l’information et de la communication, les barrières naturelles du temps et de l’espace ont été considérablement réduites et la circulation des informations, des personnes, des idées, des cultures, des biens et des capitaux tout autour de la planète a été facilitée de manière spectaculaire. Tous ces facteurs ont augmenté la faisabilité des changements sociaux et culturels, comme ils ont généralisé lestransactions économiques dans le monde entier.

En fait, aujourd’hui, les TIC ont joué un rôle central dans le processus de la mondialisation pendant les vingt dernières années. La partie précédente l’a montré, la mondialisation est généralement un phénomène de grande ampleur qui s’est produit sous l’effet combiné de deux facteurs, à savoir les politiques visant à réduire les barrières nationales aux transactions économiques internationales et l’impact des nouvelles technologies, notamment dans la sphère de l’information et des communications. Ces développements ont créé les conditions qui ont permis à la mondialisation de démarrer.

Dans le même temps, la civilisation traverse une mutation profonde sous ses aspects sociaux, culturels, politiques et économiques. Grâce aux TIC qui se caractérisent par le passage d’une "société de production" à une "société d’information et de savoir", le monde a connu un changement tellement fort par rapport aux relations internationales. En effet, aujourd’hui les technologies de l’information, devenues hautement perfectionnées, diversifiées et interdépendantes, sont largement tributaires de l’apport des ressources humaines. Si la technologie de l’information et de la communication avait avant le pouvoir demanipuler, distribuer, utiliser ou abuser de l’information aux échelles locale et nationale, elle joue aujourd’hui un rôle incroyable à tous les échelons de la vie culturelle et sociale : local, national et international. C’est pourquoi le développement généralisé des TIC offre de nouveaux challenges et de nouvelles opportunités dans tous les domaines de la société.

Dans le domaine éducatif, l’environnement de l’information et de la communication évoluant rapidement, de nombreux pays dans le monde utilisent les TIC pour accéder à l’information dans les écoles et accélérer l’amélioration de la vie scolaire. En revanche « dans l’éducation, l’utilisation des TIC est un potentiel prometteur pour réduire fortement les coûts et améliorer la qualité de la formation et de l’éducation qui sont considérées comme une priorité pour promouvoir une chance égale de tous les pays à participer à la société de l’information et à en bénéficier. L’intégration des TIC dans le curriculum et dans l’éducation et la formation des maîtres doit être renforcée puisque les maîtres sont des multiplicateurs de connaissances grâce à l’utilisation des TIC. L’acquisition des compétences technologiques à tous les niveaux de l’enseignement et en particulier, l’élargissement des connaissances en informatique sont essentiels pour attirer l’investissement, nourrir la création d’entreprises vitale pour le développement économique » (Chaker, 2002).

En fait,les TIC, qui maintenant concernent la quasi-totalité des pays et couvrent tout le spectre de la vie sociale et culturelle, révolutionnent aussi les systèmes éducatifs des pays en voie de développement. Autrement dit, après avoir fait leurs preuves sur le terrain dans les pays développés, les TIC ont poursuivi leur pénétration dans les pays en voie de développement où l’introduction des TIC a permis d’améliorer largement les communications et de partager l’information dans l’environnement éducatif. Les pays en voie de développement peuvent aussi utiliser les TIC dans différents domaines de l’éducation : la direction et la gestion du système éducatif et des établissements scolaires, les , apprentissages, l’éducation à distance, etc.

Cependant le rôle des TIC dans les pays en voie de développement est extrêmement paradoxal. Pour Daniel Salgado Lemos (2003): « Le modèle qui soutient le développement des technologies de l’information cherche la délocalisation des espaces en fonction des intérêts du Nord, en utilisant les TIC comme instrument d’homogénéisation et de domination culturelle ; et comme moyen de dérégulation et de libéralisation, ce qui transforme le cyberespace en une zone unifiée de libre-échange.

Mais en opposition à ce modèle, les TIC sont aussi un puissant outil d’intégration sociale et économique, de valorisation des savoir-faire locaux et de reconnaissance des diversités culturelles, c’est-à-dire que les TIC constituent un enjeu pour la société actuelle, un moteur de changement vers deux scénarios possibles et opposés. D’un côté, elles représentent un élément renforçant des inégalités entre les pays du Nord et du sud et vers une mondialisation de la culture occidentale, de l’autre, les TIC permettent aux pays du Sud, isolés des ressources informationnelles, un facile accès à l’information et son partage dans le monde entier. Examinons maintenant l’ambivalence du des TIC dans les pays en voie de développement où aspects positifs et négatifs se côtoient et s’entremêlent.