Troubles de la mémoire

Certains processus mnésiques, de leur côté, semblent aussi être affectés par la douleur. Pour ce qui est de réactiver un souvenir simple, on peut mettre cette difficulté sur le compte de la capture des capacités attentionnelles par la douleur. En effet, le rappel d’un souvenir procède avant tout d’une opération mentale et demande ainsi une faculté à mobiliser sa concentration, faculté qui se voit amoindrie, nous l’avons vu, chez les sujets douloureux chroniques.

Par ailleurs, il est à noter la différence significative, chez un sujet sain, entre la mémoire de la sensation nociceptive et la mémoire de toute autre expérience sensorielle (Moroni et al., 2006) : le souvenir douloureux se présenterait comme plus intense et plus invalidant. La douleur ne modifierait pas, ainsi, uniquement la capacité à réactiver une expérience mnésique, mais elle transformerait également les modalités du souvenir lui-même.

On peut déduire de cette distorsion cognitive l’hypothèse d’un potentiel traumatogène plus important issu du vécu douloureux que d’une autre activation sensorielle. Les individus souffrant de douleur persistante se verraient ainsi, probablement, plus exposés aux symptômes d’un tableau traumatique que les sujets sains.

Il est à noter (Mollica et al., 2007) que, comme le souvenir douloureux, les souvenirs traumatiques, chez des personnes souffrant de stress post-traumatique (PTSD), restent inscrits dans la mémoire avec une intensité forte et ne perdant pas cette intensité avec le temps, contrairement aux souvenirs courants.

Un rapprochement entre douleur chronique et stress post-traumatique a été avancé par Honda et al. (2007) qui ont montré une baisse du débit sanguin dans le gyrus CCA dorsal chez les douloureux chroniques, et constatent une même baisse dans les cas de stress post-traumatique, suggérant une implication commune du CCA (ayant une fonction à la fois affective et cognitive dans le traitement de l’information douloureuse) dorsal au cours du stress post-traumatique et de la douleur chronique.