B- Étude de la lombalgie chronique et de l’hypnose par tomographie d’émission de positons

B.1- Introduction

B.1.1- Objectifs

La base de réflexion du psychologue est la modélisation du système psychique et des relations intersubjectives. Chaque modèle sert de support au thérapeute pour accompagner son patient vers un mieux-être, et, outre sa conviction personnelle, on ne peut pas affirmer qu’un modèle vaille significativement mieux qu’un autre.

Comme le dit Christophe Dejours,

‘“Une théorie ne se démontre pas, elle s’argumente”.’

Ma conviction, comme je l’ai développée et argumentée précédemment, est celle de l’efficacité d’une approche systémique de la problématique individuelle, et plus particulièrement de l’efficacité de l’hypnose dans la prise en charge de la douleur chronique, du fait des vertus “associatives” de cette technique.

En tant que psychologue, cette conviction me semble suffisante pour effectuer mon travail correctement et avec plaisir.

En revanche, en tant que “chercheur”, je ne peux fermer les yeux sur l’incontournable corrélation entre le phénomène psychique et son substrat neuronal. Il m’est impossible, me semble-t-il, de me revendiquer du modèle biopsychosocial, sans questionner la dimension “bio”.

Ainsi, si l’expérience clinique montre les bienfaits de l’hypnose sur la douleur chronique, comment ce processus se traduit-il au niveau neuronal ? Par ailleurs, existe-t-il une différence neurophysiologique notable entre les actions respectives de d’une suggestion hypnotique d’analgésie, et de la même suggestion, sans état hypnotique, sur la douleur chronique ?

L’objectif général de ce protocole expérimental est donc de caractériser les réseaux cérébraux impliqués dans l’atténuation de la lombalgie chronique par hypnose, en utilisant la tomographie par émission de positons (TEP) comme technique d’imagerie cérébrale ; et évaluer l’impact de l’hypnose sur le ressenti douloureux, à l’aide d’une échelle d’évaluation de la douleur (Échelle Visuelle Analogique, EVA).

En outre, les objectifs spécifiques sont d’évaluer, chez des lombalgiques chroniques :

  • l’intérêt de la communication de la suggestion d’analgésie en état d’hypnose en comparaison avec sa communication en état d’éveil ;
  • l’efficacité de deux types de suggestion communiquée, dites “directe” et “indirecte”, et leur corrélation avec l’imagerie cérébrale.
    • La suggestion basée sur la représentation directe vise essentiellement à induire une figuration mentale de la zone douloureuse. S’agissant ici de sujets souffrant de lombalgie chronique, la suggestion se présente, schématiquement, de la manière suivante : “Imaginez l’endroit de votre dos qui vous fait mal ; laissez venir à présent une sensation de chaleur qui vous fait du bien à ce même endroit…” ;
    • La suggestion indirecte fait appel aux représentations plus générales de bien être chez le sujet et se révèle, bien sûr, plus relative à la subjectivité de chacun. Il s’agit ici non plus de focaliser la suggestion sur la zone douloureuse, mais de travailler avec les symboles et associations spécifiques à chaque sujet, concernant ce qui lui procure une sensation de bien être. Aucune évocation de la douleur n’est donc communiquée. Évidemment, pour ne pas biaiser les résultats au niveau de l’imagerie cérébrale, il convient d’éviter, dans ce cadre, toute représentation axée sur des sensations “somatiques” trop spécifiques, notamment autour de la zone douloureuse. Enfin il est nécessaire, pour mettre en place ce deuxième type de suggestion, d’effectuer un entretien préalable visant à connaître les symboles et associations relatifs au bien être auprès de chaque sujet. La suggestion est alors de l’ordre de “Vous êtes sur une plage au soleil…” ;
  • l’efficacité de la suggestion en fonction de la capacité de suggestibilité des sujets examinés, en les corrélant avec les données d’imagerie cérébrale.