La théorie des prospects

Kahneman et Tversky (1979), qui ont vu leurs travaux couronnés par un prix Nobel en 2002, ont suggéré la construction d’un modèle alternatif allant au-delà de UE et le contredisant partiellement.

Alors que UE est axiomatique, la théorie des prospects (TP) est descriptive. Elle est née par induction à partir d’observations empiriques.

On peut dégager trois différences par rapport à UE.

Dans TP, l’individu s’intéresse aux variations de sa richesse par rapport à un niveau de référence et non pas aux niveaux absolus. Ce point de référence peut être le niveau actuel de richesse de l’individu, et peut aussi être un niveau désiré. Seuls les résultats qui dépassent le niveau de référence sont codés comme des gains.

La deuxième différence concerne la fonction de valeur. Elle a la forme suivante :

Graphique 3 : Préférence et aversion pour le risque dans la théorie des prospects
Graphique 3 : Préférence et aversion pour le risque dans la théorie des prospects

Outre le fait qu’elle est exprimée en variations de richesse, cette fonction est en forme de (S) : concave en cas de gains et convexe en cas de pertes. Elle est déformée près de zéro, plus raide. Cela signifie, contrairement à notre schéma 2, que les individus sont plus risquophobes pour les faibles pertes que nous n’en avions l’intuition.

Troisièmement, la fonction de pondération des différents choix (decision weight function) transforme les probabilités d’occurrence d’événements, donnant plus de poids aux probabilités faibles et moins de poids aux probabilités plus fortes.

La « prospect theory » apparaît conforme aux constatations selon lesquelles les individus choisissent différemment en fonction de la présentation d’un problème. Le fait que la fonction de pondération surestime les probabilités faibles et sous-estime les plus fortes peut aussi expliquer le paradoxe d’Allais. Elle permet également de comprendre plusieurs régularités, qui sont des anomalies dans la théorie économique classique.