Utilisons les concepts de la théorie de l’utilité espérée pour comparer les comportements de deux entrepreneurs, le premier dans un pays développé (Nord) et le second dans un PED (Sud).
Nous avons :
La courbe A est celle de Nord, la B celle de Sud. Le premier a moins d’aversion au risque que le second. Soit au point C un investissement donné. m1 intersection du segment C avec la courbe B donne en ordonnées l’investissement réalisé par Sud, m2 intersection de C avec la diagonale permet d’obtenir l’espérance exigée pour cet investissement ; à partir de m1 on peut obtenir f1 qui est l’investissement de même montant fait par Nord et f2 l’espérance exigée pour cet investissement. On voit tout de suite que le rendement exigé par Sud est presque de 100 %, alors que le rendement exigé par Nord est de 10 %. On voit aussi que pour les petits investissements la différence de rendement exigé est faible, mais qu’elle augmente nettement pour des investissements plus élevés.
Nous allons dessiner maintenant les deux courbes de demande et une courbe d’offre. Il est vraisemblable que l’offre se fera à un prix plus faible pour une demande plus faible.
Cela donne :
La courbe C est la courbe de demande de Sud, B est celle de Nord et O est la courbe d’offre. Dès que O dépasse la courbe C, elle s’infléchit. Le point de rencontre de O avec B devient beaucoup plus éloigné. Les investissements sont donc plus importants et rapportent proportionnellement plus à celui qui est moins risquophobe.
En outre, à moyen terme, dans un PED, pour les investissements qui sont hors de la zone des investissements désirables, c’est-à-dire à la droite de la courbe C dans le graphique 4, il y a trois conséquences possibles :
Envisageons maintenant la question sous l’angle du choix du pays d’investissement.
Nous avons un entrepreneur qui a le choix entre un investissement dans un pays à risque et un autre dans un pays à risque plus faible. Dressons deux courbes d’indifférence qui reflètent son attitude face au risque de chacun des pays. Choisissons un investissement I qui a un certain risque spécifique.
On aura :
Au point I, il faudrait que le prix de l’investissement soit divisé par deux dans le pays le plus risqué ou que le rendement double pour que l’entrepreneur le fasse dans ce pays.
Ainsi, le risque existant dans les PED entraîne un double effet : d’une part, les agents ont tendance à réfréner leurs envies d’entreprendre dans les PED et, d’autre part, à tenter leur chance dans les pays moins risqués.
Dans un monde de plus en plus global, la différence de risque entraîne donc un puissant mouvement de répartition en faveur des pays les plus riches. Dans la pratique, les agents des PED pouvant difficilement appréhender les risques spécifiques dans les pays développés, ils investissent dans des placements bancaires ou boursiers dans ces pays56.
On pourrait en théorie déterminer un taux marginal de substitution qui donnerait le rapport entre les investissements locaux et ceux faits à l’étranger, et qui serait déterminé par le rapport des risques systémiques. On pourrait ainsi prévoir les flux d’investissement entre deux pays ayant de fortes ressemblances et une différence dans le degré de risque et également expliquer le différentiel de développement entre des pays limitrophes ayant des niveaux de risque différents.
. On a ici un paradoxe intéressant : l’amélioration du fonctionnement des marchés boursiers du Nord est bon pour les économies du Nord, mauvais pour les économies du Sud (parce que les opportunités étant meilleures, la substitution d’investissement entre Sud et Nord se fait plus aisément) et bon pour les revenus des habitants du Sud (parce qu’ils peuvent placer leur épargne plus efficacement et avec une meilleure rentabilité).