2. Modélisation de la fable

Nous allons maintenant essayer de généraliser notre exemple en le présentant de manière graphique.

Nous allons tout d’abord prendre l’hypothèse de deux fonctions d’aversion de risque croissantes pour deux agents et admettre que l’équivalent certain (EC) est un substitut à l’utilité (ce qui est acceptable ex ante).

On a donc :

Graphique 18 : Intérêt pour l’échange de risque en fonction de la préférence pour le risque
Graphique 18 : Intérêt pour l’échange de risque en fonction de la préférence pour le risque

Dans notre schéma, plus la pente de la courbe est aplatie et plus l’agent est risquophobe. À la diagonale, l’EC est égal à l’espérance, l’agent est indifférent au risque.

Dans notre construction, l’agent A est moins risquophobe que l’agent B.

À la droite X (qui pourrait être un projet d’investissement), il existe une différence (d) entre l’EC de A et celui de B. Les deux agents ont intérêt à échanger le risque et pourront se partager (d).

Ainsi pour peu que deux agents aient des fonctions de risque différentes, ils auraient intérêt à échanger le risque.

Prenons maintenant une hypothèse de deux fonctions identiques pour les deux agents. Ont-ils néanmoins intérêt à faire une transaction ?

On a :

Graphique 19 : Échange entre deux agents ayant la même préférence pour le risque
Graphique 19 : Échange entre deux agents ayant la même préférence pour le risque

Supposons que les agents décident de s’associer dans le projet moitié-moitié, c’est-à-dire qu’ils partagent le risque et la rentabilité à égalité. La droite B est l’investissement projeté, la droite A est l’investissement qui serait fait par chacun s’ils faisaient une association. Au point I, nous avons l’EC d’un agent s’il faisait seul l’investissement. L’intersection de la droite A (médiatrice du segment OB) avec la fonction d’aversion au risque représente l’EC de chacun des agents après association, soit P. Le point S est l’image de P sur la droite B par la transformation : OP égale à PS. S est l’EC cumulé des deux agents.

Le partage de risque a donc généré une augmentation d’utilité égale à (d).

Notons que dans nos deux exemples nous n’avons même pas pris en compte ce que Knight appelle la consolidation : c’est-à-dire le fait pour un preneur de risque de l’étaler sur un grand nombre de cas – technique typique de l’assurance. Les risques objectif et subjectif n’ont pas changé pour les agents.

Nous avons donc comme première conclusion que l’échange de risque au sens large, c’est-à-dire incluant échange et partage, produit dans tous les cas (pour peu que cela soit possible et que les coûts de transaction soient raisonnables) une amélioration de l’utilité des agents. Le risque joue en quelque sorte le rôle d’une réserve pour repousser plus loin la barrière de l’optimum de Pareto.