2- Le suburbium

a) Les difficultés d’une définition trop précise

a.1) Les textes

La notion de suburbium ne s’applique d’abord qu’à la ville de Rome216. Le terme s’est trouvé ensuite transposé à d’autres villes importantes. A Pompéi, le pagus Aug(ustus) Felix est qualifié de suburbanus sur plusieurs inscriptions217 ; en Bétique, Suburbanus est le nom d’un pagus, probablement proche de Merida218. En littérature, il peut également servir à nommer les alentours de certaines villes : Suétone l’emploie afin de qualifier la propriété de Tibère près de Rhodes219 ; Martial l’utilise pour désigner les environs de Corinthe220… Les occurrences sont finalement nombreuses221. Pour la Gaule, la seule mention connue de suburbium est tardive et associée à Lutèce222. Dans tous les cas, le terme, qu’il soit utilisé comme adjectif ou comme substantif, désigne la zone contiguë à la ville.

On sait par les lois municipales espagnoles que les extensions bâties de la ville lui sont administrativement rattachées. La loi d’Irni reprend la notion de continentia qui sont régis par la même proscription qui vaut en ville : il est interdit d’y détruire des édifices si on ne les reconstruit pas223. Une disposition identique figure dans la loi d’Urso224, de même que l’interdiction du stockage de tuiles au sein du périmètre urbain afin de contrôler la récupération de matériau et d’éviter la prolifération de bâtiments en ruine225. Elle est destinée à garantir la continuité de l’urbanisme et ainsi l’intégrité physique de la ville. La loi d’Urso mentionne le chiffre de 1000 pas qui est le rayon dans lequel devaient résider les magistrats et prêtres municipaux autour de la ville226. A quoi peut correspondre cette distance ? Il s’agit peut-être d’un simple mimétisme de la colonie par rapport à Rome, où la distance de I mille correspond à une réalité administrative227. P. Arnaud met en avant que cette distance de I mille correspond à une demi-heure de marche pour un piéton228.

Il s’agit vraisemblablement aussi d’une distance théorique correspondant à une exigence juridique, car à l’évidence les continentia d’Urso ne couvrent pas entièrement cette surface et il ne faut pas s’imaginer non plus que la zone habitée à l’extérieur de la ville fasse une couronne complète autour de cette dernière. La taille que peut atteindre les continentia n’est pas précisée dans la Lex, mais ils devaient se développer en étoile le long des voies d’accès. Il s’agit toutefois clairement d’une zone d’influence de la ville sur la campagne.

Notes
216.

I, p. 24.

217.

ILS,6377 ; CIL X, 924 et 1027 ; AE 1990, 186a.

218.

CIL II, 1041.

219.

Suétone, Tibère XI, 3.

220.

Martial, Epigrammes V, 35, 3.

221.

Voir le recensement de Agusta-Boularot S., 1998, p. 44 et p. 56-61.

222.

Ammien Marcellin, Histoire XX, 4, 11-12.

223.

AE 1986, 333 (article 62).

224.

CIL II, 5439 = ILS, 6087 = AE 1946, 123 (article 75).

225.

CIL II, 5439 = ILS, 6087 = AE 1946, 123 (article 76). Béal J.-C., 2002, p. 7-10.

226.

CIL II, 5439 = ILS, 6087 = AE 1946, 123 (article 91).

227.

I, p. 19, 26.

228.

Arnaud P., 1998a, p. 72 et 80.